La remontée des taux d’intérêt est enclenchée dans plusieurs pays, ou elle le sera sous peu dans la plupart des économies du monde. La guerre à l’inflation n’en est qu’à ses débuts, mais beaucoup d’emprunteurs commencent à moins bien dormir la nuit.

L’ère de l’argent pas cher dure depuis longtemps et a conduit à un endettement accéléré des pays, des entreprises et des ménages. L’endettement total dans le monde est passé de 230 % du PIB mondial à 320 % avant la pandémie. La crise sanitaire a encore fait grimper la dette globale à 355 % du PIB mondial en 2021, selon le calcul du périodique britannique The Economist.

Ce sont des chiffres qui dépassent l’entendement. Aux États-Unis, la dette publique a franchi la semaine dernière un nouveau seuil, à 30 000 milliards US. C’est une augmentation de 7000 milliards par rapport à avant la pandémie, en 2019.

Si la dette publique a pu augmenter autant aux États-Unis et ailleurs, c’est d’abord et avant tout parce que le coût de cette dette a baissé avec le temps, à presque zéro et même en bas de zéro en Europe et au Japon. Depuis le début de l’année 2000, le rendement d’une obligation de 10 ans du gouvernement américain, soit son coût de financement, est passé de 6,5 % à 1,8 %.

Cette période bénie pour les emprunteurs achève et certains pays en souffriront plus que d’autres. La somme des dettes en proportion de la taille d’une économie donne une indication de la capacité d’un pays à soutenir cette dette. Mais ça ne dit pas tout. Les pays qui ont la dette la plus importante en proportion de la taille de leur économie sont normalement plus à risque quand les taux augmentent, mais pas toujours.

Les États-Unis, dont la dette publique équivaut à 133 % du PIB, sont un exemple. Personne ne doute de la capacité des Américains à gérer cette dette, pas même le président de la Réserve fédérale. Le Japon, champion depuis des décennies de la plus lourde dette publique par rapport à son produit intérieur brut, ne faillit jamais à ses obligations.

Un classement

Ceux qui ont le plus profité du crédit bon marché risquent de souffrir davantage. Dans un récent numéro, The Economist s’est livré à un exercice intéressant. Il a tenté de savoir où dans le monde se trouvaient ceux qui sont les plus exposés à la hausse des taux d’intérêt.

Le calcul a été fait pour les pays, pour les ménages et pour les entreprises à l’aide de deux indicateurs, soit le rapport entre la dette et le revenu moyen, et l’évolution de ce rapport depuis 10 ans. Ça donne une idée de ceux qui ont le plus profité des taux très bas pour accumuler des dettes et qui sont maintenant les plus exposés à leur remontée.

Le Japon a beau avoir la plus lourde dette en fonction de la taille de son économie, il ne figure pas dans la liste des 10 pays qui ont le plus accru leur exposition au risque d’augmentation de taux. C’est le Liban et le Nigeria qui arrivent en premier.

Dans le cas des entreprises privées, le calcul de la dette en fonction des revenus d’exploitation et l’évolution de ce rapport depuis 10 ans indiquent que c’est en France et en Suisse que les entreprises sont le plus « étirées » et donc plus exposées à la hausse des taux.

Pour ce qui est des ménages, il faut aller du côté des Suisse, des Sud-Coréens, des Norvégiens et des Chinois pour trouver ceux qui ont le plus de raisons d’être inquiets.

L’exercice n’est pas une liste de ceux qui ne pourront pas honorer leurs dettes. Mais il nous donne une idée de ceux qui commencent à moins bien dormir la nuit.