(Montréal) Les étagères de la boutique de souvenirs de Mohamed Ghodhbane, dans le Vieux-Montréal, regorgent de toutes sortes de marchandises que l’on trouve dans les endroits touristiques du monde entier : t-shirts, verres à liqueur, porte-clés, boules à neige et plaques d’immatriculation fantaisistes.

Depuis plus d’un an maintenant, il ne vend presque rien.

Alors que la COVID-19 a dévasté de nombreux secteurs de l’économie, peu ont été plus durement touchés que les propriétaires de boutiques de souvenirs du Vieux-Port de Montréal, qui dépendent presque entièrement d’un flux de touristes qui s’est tari.

M. Ghodhbane, qui estime que ses ventes sont en baisse de 95 %, tente de rester optimiste. « C’est un peu difficile ces jours-ci, mais on espère le mieux », a déclaré M. Ghodhbane, qui dirige Noor Souvenirs depuis 15 ans. « Avec l’avancement du vaccin, l’ouverture des frontières, on pense que ça va aller. On garde l’espoir. »

Le long des rues pavées de la rue Saint-Paul, d’autres marchands ont raconté une histoire similaire. Quatre propriétaires ou employés de boutiques de souvenirs qui se sont entretenus avec La Presse Canadienne ont tous déclaré que leurs ventes avaient diminué de 90 à 95 %.

Bien que la réouverture progressive de la province leur ait donné un peu d’espoir, ils pensent que les affaires ne reprendront probablement pas avant la réouverture des frontières avec les États-Unis et l’Ontario et la reprise des vols en provenance de l’Europe.

Un lundi férié ensoleillé ― normalement au début d’une saison touristique estivale chargée ― Ali Hussain était assis seul derrière le comptoir de Souvenirs Caribou.

« Depuis qu’ils ont fermé la frontière, les vols et les ports, depuis mars 2020, c’est difficile », a-t-il déclaré. « Sans l’aide du gouvernement, cela aurait été impossible. »

Même avec des programmes de subvention qui paient la majeure partie de son loyer, il a dit qu’il était difficile de payer le reste lorsqu’il ne fait aucune vente pendant plusieurs jours.

Le gouvernement du Québec mettra en œuvre la première étape de son plan de déconfinement plus tard cette semaine, ce qui comprendra la fin du couvre-feu et la réouverture des terrasses des restaurants.

M. Hussain a dit être heureux pour les restaurateurs, mais ne pense pas que cela aidera son entreprise. « Ça, c’est pour la population locale, nous ne nous attendons pas à ce que ce soit d’une grande aide pour les magasins de souvenirs », a-t-il déclaré.

Même certains des magasins d’art du Vieux-Montréal, qui vendent des articles plus haut de gamme, n’ont pas été en mesure d’attirer une forte demande de la part des acheteurs, des propriétaires et des employés locaux.

Dans le marché historique Bonsecours, le magasin d’art contemporain de Jerry Joseph, MTL Decor, est l’un des rares à être encore ouvert. M. Joseph a expliqué que les tours guidés et les navires de croisière menaient d’habitude des milliers de personnes à son magasin.

Maintenant, il n’y a que des Montréalais, qui « ne font pas leurs achats dans le Vieux-Port ».

Contrairement à M. Hussain et à M. Ghodhbane, M. Joseph a expliqué qu’il n’était pas éligible à de nombreux programmes d’aide gouvernementale, car les commerçants du marché Bonsecours auraient convaincu la Ville de suspendre les paiements de loyer jusqu’à ce que de nouvelles conditions puissent être négociées.

Il survit grâce aux ventes en ligne, dont la plupart proviennent des États-Unis. Il avait autrefois deux employés, mais il a été contraint de les licencier et de travailler seul au magasin.

En mars dernier, Montréal et la province de Québec ont annoncé un plan de 25 millions pour aider à relancer les quartiers centraux de la ville, avec notamment du stationnement gratuit, des divertissements, des règles plus souples pour les terrasses et des subventions aux entreprises.

Bien que les propriétaires qui se sont entretenus avec La Presse Canadienne ont dit apprécier toute l’aide qu’ils ont reçue, ils croient que la seule chose qui les aiderait vraiment serait l’assouplissement des restrictions frontalières.

Et même lorsque cela se produira, M. Ghodhbane sait que les touristes ne reviendront pas tout de suite, ce qui lui fait envisager de quitter complètement le métier.

« On a toujours de l’espoir, mais [partir] m’est passé beaucoup dans la tête », a-t-il dit. « La décision n’est pas facile, car quand on est jeune, on peut changer facilement, mais après des dizaines d’années de travail, ce n’est pas facile. »