« Môman travaille pas, a trop d’ouvrage. » Cette boutade de l’humoriste Yvon Deschamps dans les années 1960 et 1970 n’est plus vraie : le Québec est aujourd’hui l’un des endroits au monde qui intègre le mieux les femmes – particulièrement les mères – à son marché du travail.

Taux d’emploi : le Québec deuxième au monde

Tout d’abord, le Québec occupe le deuxième rang parmi 32 États de l’OCDE (31 pays et le Québec) au chapitre du taux d’emploi chez les femmes de 25 à 54 ans, soit 83,4 % en 2019. Seule la Suède fait mieux que le Québec, avec un taux d’emploi de 83,7 % chez les femmes. Le Canada (sans le Québec) arrive au 15e rang sur 32, avec un taux d’emploi de 78,7 % chez les femmes. La moyenne des pays de l’OCDE : 70,2 %.

Écart entre les hommes et les femmes : le Québec premier au monde

Le Québec est donc le deuxième endroit au monde où les femmes intègrent le mieux le marché du travail.

Mais on pourrait aussi dire que c’est le meilleur endroit. Car c’est au Québec que l’écart entre le taux d’emploi des hommes et celui des femmes (de 25 à 54 ans) est le plus petit sur les 32 pays de l’OCDE, selon les chiffres de l’organisation répertoriés par la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke.

Au Québec, pour l’année 2019, le taux d’emploi des femmes de 25 à 54 ans est de 83,4 % et celui des hommes de la même tranche d’âge, de 86,8 %. L’écart défavorable aux femmes est de 3,4 points de pourcentage. La moyenne de l’écart défavorable aux femmes dans les 32 pays de l’OCDE : 17,1 points, soit cinq fois plus qu’au Québec.

Premier rang ou deuxième rang ? Pour le professeur Luc Godbout, le classement final importe peu.

En matière de taux d’emploi des femmes, le Québec a fortement progressé et est maintenant parmi les États au sommet. C’est encore plus le cas quand on regarde spécifiquement les mères d’enfants de moins de 6 ans.

Luc Godbout, titulaire de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke

À noter que le taux d’emploi des hommes de 25 à 54 ans au Québec (86,3 %) est en deçà de la moyenne de l’OCDE (87,3 %) pour l’année 2019. De 1996 à 2019, le taux d’emploi chez les hommes est passé de 88 % à 87 % en moyenne dans les pays de l’OCDE, et de 84,1 % à 86,8 % au Québec.

Grâce aux CPE de Pauline Marois

Si le Québec est l’un des endroits au monde où les femmes accèdent le plus au marché du travail, c’est en grande partie grâce au réseau des centres de la petite enfance (CPE) mis sur pied en 1997 par Pauline Marois, alors ministre de l’Éducation.

Environ 25 ans après la création des CPE subventionnés (tarif actuel : 8,50 $ par jour), les effets sur le taux d’emploi des femmes sont impressionnants : il est passé de 65,5 % en 1996 (moyenne de l’OCDE : 62,4 %) à 83,4 % en 2019 (moyenne de l’OCDE : 70 %). Ce bond de 17,9 points au Québec est le cinquième en importance parmi les 32 États de l’OCDE.

Seuls l’Espagne (+ 27,7 points), l’Irlande (+ 22,4), le Chili (+ 21,5) et les Pays-Bas (+ 19,1) ont réussi un plus grand bond que le Québec depuis 1996. Mais de ces quatre pays, seuls les Pays-Bas ont réussi à monter dans le peloton de tête du taux d’emploi chez les femmes, au septième rang avec un taux de 81,1 %.

« L’“expérience” québécoise attire les regards de certains organismes comme l’OCDE ou la Banque du Canada pour ses effets positifs sur l’emploi », écrivent le professeur Luc Godbout et Suzie St-Cerny, chercheuse à la Chaire en fiscalité et en finances publiques, dans une note de recherche publiée cette semaine par l’Institut C.D. Howe. Pour la première fois, M. Godbout et Mme St-Cerny ont pu calculer le taux d’emploi des mères âgées de 25 à 54 ans au Québec et dans le reste du Canada.

3,3 milliards par an

Le programme de garderies à contribution réduite pour les parents coûte environ 2,7 milliards par an au gouvernement du Québec. En ajoutant le crédit d’impôt pour frais de garde d’enfants (pour les garderies non subventionnées), qui coûte 610 millions par an, on arrive à une facture totale de 3,3 milliards par an pour la politique familiale du gouvernement du Québec.

Le Canada imitera-t-il le Québec ?

Dans sa mise à jour économique de l’automne, le gouvernement fédéral de Justin Trudeau a annoncé sa volonté de créer un programme national de garderies, en prenant exemple sur ce qui existe au Québec depuis 1997. Ottawa doit toutefois s’entendre avec les provinces pour débourser une partie des coûts. Le cas échéant, Québec pourrait recevoir une compensation financière annuelle d’Ottawa pour payer une partie du coût de son réseau de CPE.

Les femmes gagnent 22 % de moins que les hommes

Il reste encore toutefois beaucoup à faire en matière d’égalité au travail au Québec. Par exemple, les femmes ont un revenu médian total inférieur de 22 % à celui des hommes, selon les chiffres de Statistique Canada pour les 15 ans et plus en 2019. Au Canada, l’écart salarial entre les deux sexes est de 25 %. Selon les chiffres de l’OCDE pour l’année 2014, l’écart salarial moyen entre les deux sexes est de 10 % en France, 17 % en Allemagne et au Royaume-Uni, 18 % aux États-Unis, 19 % au Canada et 26 % au Japon.

Les chiffres de l’OCDE sur le taux d’emploi sont toujours chez les 25 à 54 ans.