(Ottawa) La ministre des Finances, Chrystia Freeland, doit jouer soigneusement les cartes économiques à sa disposition dans son prochain budget fédéral, attendu en mars. Car la survie de milliers de petites et moyennes entreprises (PME) au pays pourrait bien dépendre des mesures contenues dans ce plan budgétaire, souligne la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).

Dans un mémoire remis à la ministre Freeland cette semaine, la FCEI estime que le budget dévoilé – le premier budget en deux ans produit par le gouvernement Trudeau – doit impérativement contenir « une feuille de route précise » pour la reprise de l’économie canadienne.

Alors que l’organisme vient de dévoiler qu’un propriétaire de PME sur six risquait de mettre la clé sous la porte avant la fin de la pandémie – mettant du coup en péril 2,4 millions d’emplois au pays –, la FCEI exhorte d’abord la ministre Freeland à maintenir les programmes de soutien pour la COVID-19 destinés aux petites entreprises jusqu’au démarrage complet de l’économie canadienne.

Ensuite, Ottawa doit éviter d’alourdir le fardeau fiscal des entreprises alors qu’elles peinent à payer leurs factures mensuelles d’électricité, a illustré Jasmin Guénette, vice-président des affaires nationales à la FCEI.

Pardonner des dettes

Parmi les autres mesures à privilégier, le gouvernement Trudeau devrait envisager de pardonner davantage de dettes des PME reliées à la COVID-19 et accorder des délais de remboursement plus longs pour les prêts. La réduction de la « paperasserie » doit aussi être une priorité afin d’éliminer les règlements inutiles qui peuvent être un casse-tête pour les entreprises.

Alors que le gouvernement Trudeau a déjà fait connaître son intention d’investir entre 70 et 100 milliards de dollars pour relancer l’économie au cours des trois prochaines années, la FCEI juge que l’on doit choisir minutieusement le moment d’injecter un tel stimulus.

À titre d’exemple, rien ne sert d’introduire des mesures incitatives pour les consommateurs avant que les petites entreprises canadiennes puissent rouvrir et en bénéficier pleinement, a fait valoir M. Guénette.

Stimuler la consommation peut être utile, mais si des mesures allant dans ce sens arrivent trop tôt, elles ne serviront qu’aux géants comme Costco et Amazon et laisseront sur la touche les petites entreprises qui commencent tout juste à rouvrir.

Jasmin Guénette, vice-président des affaires nationales à la FCEI

« Nous devons aider les PME à traverser la crise actuelle et à faire la transition entre les subventions gouvernementales et la reprise de leurs ventes. C’est ainsi qu’on pourra commencer le long processus de redynamisation de notre économie, de nos communautés et de l’emploi », a-t-il ajouté.

Alors que le taux d’épargne des ménages canadiens atteint des sommets inégalés depuis des décennies, certains économistes s’interrogent sur l'opportunité d’injecter près de 100 milliards de dollars dans un plan de relance comme l’envisage le gouvernement Trudeau. D’autant que le déficit frisera les 400 milliards durant le présent exercice financier qui prend fin le 31 mars et que la dette accumulée du gouvernement fédéral va dépasser les 1000 milliards de dollars cette année.

Les priorités de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

Également en prévision du prochain budget fédéral, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain a dévoilé, jeudi, les priorités de ses membres qui ont participé à un coup de sonde. Et la majorité des entreprises de la CCMM estime qu’il faut détailler un plan de retour à l’équilibre budgétaire dès le prochain budget.

En effet, 85,5 % des répondants au coup de sonde de la CCMM soutiennent qu’il est essentiel que le gouvernement du Canada se dote d’une stratégie de retour à l’équilibre budgétaire. Plus de la moitié (55,4 %) estiment que ce retour devrait s’effectuer d’ici dix ans, alors que 36,8 % suggèrent un horizon plus strict, soit d’ici cinq ans.

Selon le président et chef de la direction de la CCMM, Michel Leblanc, le coup de sonde a permis de relever trois autres priorités du milieu des affaires montréalais dans l’immédiat : des investissements massifs dans la relance de l’économie, l’accélération du virage vers une économie plus sobre en carbone, et la bonification des mesures pour stimuler l’investissement des entreprises.

« Les répondants se sont montrés préoccupés par la situation des secteurs les plus affectés par la crise, comme la restauration et l’hôtellerie, le tourisme et l’aérospatiale. Une très grande majorité soutient que ces secteurs doivent bénéficier d’une aide ciblée. C’est le cas de l’aérospatiale et du transport aérien. Nous réclamons une aide spécifique pour ces secteurs depuis plusieurs mois et nous espérons que ça se retrouvera au prochain budget », a indiqué M. Leblanc dans un courriel à La Presse.