Un groupe de travail mis sur pied pour songer à la reprise économique de la métropole présente ce vendredi ses propositions

Le centre-ville de Montréal « pourrait entrer dans une spirale économique déstructurante », et le secteur touristique local, pâtir d’une « mauvaise réputation sur le plan sanitaire », selon le groupe responsable de réfléchir à la relance de Montréal et d’éviter ces écueils.

Un document obtenu par La Presse et qui sera présenté ce vendredi en présence de représentants de tous les paliers de gouvernement trace un portrait inquiétant de la situation qui prévaut actuellement dans certains secteurs économiques.

Il propose aussi des solutions, dont l’orientation du secteur aéronautique vers l’invention de l’« avion vert » de l’avenir, la possibilité de pousser les étudiants vers l’emploi plus rapidement et la mise en place de multiples aides publiques.

La démarche, baptisée « Relançons MTL », est menée par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) en collaboration avec les gouvernements. La mairesse de Montréal, Valérie Plante, ainsi que les ministres Mélanie Joly et Pierre Fitzgibbon participeront en avant-midi au dévoilement de ses résultats.

« À travers les travaux de Relançons MTL, nous avons [déterminé] quatre conditions gagnantes pour y arriver : commencer rapidement ; bien accompagner les petites entreprises ; poursuivre les pivots des modèles d’affaires ; et adopter une vision à long terme », affirme le président de la CCMM, Michel Leblanc, dans un communiqué de presse à paraître.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

« Des gestes doivent être [faits] urgemment pour assurer la pérennité des entreprises dans des secteurs encore très vulnérables – les entreprises des secteurs du tourisme et du transport aérien sont les exemples les plus criants », indique Relançons MTL dans son document. Parmi les entreprises qui vivent du tourisme, « la situation est catastrophique », avertit la CCMM.

« D’autres décisions sont tout aussi urgentes pour permettre aux entreprises de planifier maintenant leurs stratégies futures ou encore de procéder sans attendre à des investissements stratégiques pour l’avenir. »

Relançons MTL fait valoir que les gouvernements ont un rôle important à jouer dans la reprise économique espérée, mais que les entreprises doivent aussi se préparer à fonctionner en mode post-COVID-19.

Avion vert

Le document de Relançons MTL, qui sera dévoilé plus tard ce vendredi, fait 150 pages et contient des dizaines de recommandations.

Parmi celles-ci, un projet de réorientation de l’importante industrie aéronautique montréalaise – heurtée indirectement par l’effondrement du trafic aérien – vers un nouveau projet : imaginer l’avenir de l’aviation, qui pourrait être encadré par des normes environnementales de plus en plus strictes. Les entreprises montréalaises du secteur pourraient donc « développer une proposition intégrée de R-D stratégique pour le développement de l’avion "vert" et de ses composants », explique Relançons MTL. Il s’agit d’une piste d’action jugée prioritaire par le milieu.

Parallèlement, le secteur du transport et de la logistique a mis de l’avant l’idée de faire de l’Est de Montréal une zone où seraient concentrées les entreprises qui planchent sur les véhicules électriques de l’avenir.

Du côté public, Relançons MTL propose aux gouvernements d’impartir des fonds pour accélérer le virage numérique de plusieurs secteurs. On compte aussi sur l’État pour mettre en place davantage de zones d’innovation qui attireraient les investissements étrangers, pour avantager les technologies vertes dans les appels d’offres publics et pour alléger la réglementation encadrant certaines industries.

Des aides directes sont aussi demandées, notamment pour le secteur du transport aérien, du commerce de détail, de la restauration et du tourisme.

Des formations plus courtes ?

Parmi les idées les plus concrètes proposées par Relançons MTL, on compte aussi des demandes pour s’assurer que la pénurie de main-d’œuvre ne vienne pas mettre des bâtons dans les roues de l’économie montréalaise. Relançons MTL voudrait voir s’« accélérer les efforts visant à assurer un bassin de main-d’œuvre suffisant dont les compétences répondent aux besoins du marché ».

Des entreprises de la construction et des technologies ont ainsi évoqué « la possibilité d’écourter ou d’accélérer certains programmes de formation dans le but d’alimenter plus rapidement les secteurs en main-d’œuvre et de favoriser la requalification ».

Du côté des entreprises de transport, on voudrait que les établissements d’enseignement adaptent leurs formations « aux nouvelles réalités du secteur pour assurer un bassin de main-d’œuvre suffisant ». Celles des sciences de la vie voudraient accueillir des étudiants en alternance études-travail, alors que d’autres aimeraient que soient assouplis les critères d’acceptation des travailleurs étrangers temporaires qualifiés.

Une longue convalescence pour le centre-ville

Le centre-ville de Montréal ne guérira pas du jour au lendemain, avertit Relançons MTL, en traçant le portrait d’un quartier très amoché par la crise.

Seulement de « 5 à 10 % des employés du centre-ville travaillent à partir du bureau, tendance appelée à ne pas disparaître », indique le document obtenu par La Presse. « Le modèle hybride intégrant le télétravail pourrait demeurer dans plusieurs entreprises. » L’automne dernier, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain calculait qu’une faible proportion des entreprises s’étaient prévalues des assouplissements qui permettaient un certain retour dans les tours de bureaux.

Du côté du magasinage, la situation n’est pas beaucoup plus rose. « La rue Sainte-Catherine est la grande artère commerciale la plus touchée au pays (- 76 % d’achalandage), et le retour est incertain », avertit Relançons MTL. Et dans les trois universités installées au centre-ville, « plus de 90 % des étudiants suivent leurs cours en virtuel, tendance qui, si elle demeure, diminuera la vie des campus ».

Relançons MTL ne propose pas de solution magique pour faire revivre le cœur de la métropole. Son rapport met toutefois de l’avant l’importance de « faire la promotion des avantages du travail en présentiel » et d’honorer publiquement « les employeurs qui favorisent le retour des travailleurs au centre-ville ».

À plus long terme, il faudrait diversifier le profil économique du centre-ville de Montréal en y favorisant les entreprises de secteurs émergents, estime Relançons MTL.