(Ottawa) Le gouvernement Trudeau compte adopter une approche plus combative à l’égard du protectionnisme américain.

C’est ce qui ressort des lettres de mandat rendues publiques jeudi après-midi, près de trois mois après son élection. Il demande à la ministre des Finances, Chrystia Freeland, à la ministre du Commerce international, Mary Ng, et à la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, Filomena Tassi, d’adopter une approche plus ferme.

Mme Freeland devra, en collaboration avec sa collègue au Commerce international, « mettre en place une politique d’approvisionnement réciproque qui garantira que les biens et services sont acquis auprès de pays qui accordent aux entreprises canadiennes un niveau similaire d’accès au marché. »

PHOTO PATRICK DOYLE, THE CANADIAN PRESS

La ministre du Commerce international, Mary Ng

Les directives du premier ministre Justin Trudeau à la ministre Ng sont sans équivoque : « De plus, vous traiterez les enjeux commerciaux bilatéraux et les mesures protectionnistes avec les États-Unis, notamment en ce qui concerne les marchés publics et dans les secteurs de l’automobile, de l’énergie et de l’agriculture. »

La ministre Tassi aura, quant à elle, pour tâche de continuer la modernisation « des pratiques d’approvisionnement » du gouvernement, « ce qui comprend des possibilités d’approvisionnement équilibrées avec les partenaires commerciaux du Canada ».

« C’est sûr qu’il y a une approche plus agressive, plus intentionnelle pour défendre les intérêts canadiens », a observé Robert Asselin, le premier vice-président du Conseil canadien des affaires et ancien conseiller de l’ex-ministre des Finances Bill Morneau.

« C’est cohérent avec la dernière visite aux États-Unis où le gouvernement avait sonné l’alarme par rapport aux mesures protectionnistes », a-t-il ajouté. Son organisme souhaite que l’esprit de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) sur le libre-échange.

Le président américain Joe Biden a mis de l’avant un plan « Buy American » qui contient un crédit d’impôt pouvant atteindre 12 500 $ pour l’achat de véhicules zéro émission fabriqués aux États-Unis. Le Canada craint les répercussions sur son industrie automobile.

Le bois d’œuvre absent

Or, si la ministre Ng doit tenter de protéger les secteurs de l’automobile, de l’énergie et de l’agriculture, sa lettre ne fait aucune mention de l’industrie forestière. Pourtant, les États-Unis ont récemment doublé leurs droits compensatoires perçus sur le bois d’œuvre canadien. Ils sont passés d’une moyenne de 8,99 % à 17,9 %.

« Je trouve ça absolument aberrant », a dénoncé le député du Bloc québécois, Simon-Pierre Savard-Tremblay. « C’est carrément de faire comme si ça n’existait pas, d’ignorer complètement le problème même si quand on interpelle le gouvernement là-dessus, on nous répond que c’est une question importante. »

Le Bloc québécois note également une lacune concernant la gestion de l’offre. La lettre de mandat de la ministre Ng fait bel et bien mention d’une « indemnisation complète et équitable » pour la brèche ouverte par l’ACEUM. M. Savard-Tremblay estime qu’elle aurait dû également contenir une phrase sur la brèche future qui pourrait être ouverte avec la négociation d’un accord de libre-échange avec le Royaume-Uni.