(Ottawa) L’économie canadienne semble avoir rebondi au troisième trimestre, après avoir trébuché et s’être contractée lors des trois mois précédents.

Selon l’estimation préliminaire dévoilée vendredi par Statistique Canada, le produit intérieur brut (PIB) du pays aurait enregistré une croissance annualisée de 1,9 % au troisième trimestre.

Ce résultat pourrait cependant changer une fois que l’agence aura reçu des données supplémentaires. Les données seront finalisées le mois prochain.

Même si une telle croissance représentait un revirement bienvenu par rapport à la contraction de 1,1 % enregistrée d’avril à juin, son ampleur semble décevante, a souligné l’économiste en chef de la Banque de Montréal, Douglas Porter.

« Le fait que l’économie n’ait réussi à croître qu’à un taux annuel d’environ 2 % après avoir chuté au deuxième trimestre montre à quel point elle a du mal à progresser », a indiqué M. Porter.

Nous avons eu un très bon début d’année, mais l’économie, franchement, a eu du mal à s’appuyer sur cet élan.

Douglas Porter, économiste en chef de la Banque de Montréal

Et le niveau de difficulté ne diminuera pas, puisque les vents contraires économiques liés aux problèmes de la chaîne d’approvisionnement mondiale devraient s’aggraver, pour éventuellement entraîner une nouvelle série d’évènements malheureux qui empêcheront l’économie d’atteindre tout son potentiel, a estimé M. Porter.

Après s’être contracté en juillet, le PIB réel a augmenté de 0,4 % en août, a indiqué vendredi Statistique Canada, tiré par une augmentation de l’activité dans les secteurs où les interactions en personne sont nécessaires, qui ont profité de l’assouplissement des restrictions de santé publique.

La production dans les restaurants et les bars a augmenté de 5,4 %, et celle des services d’hébergement, de 11,3 %. L’industrie du transport aérien a quant à elle progressé de 24,2 %, enregistrant un sixième mois d’affilée de croissance de plus de 10 % alors qu’un plus grand nombre de voyageurs optaient pour les déplacements en avion.

Le secteur agricole a été une source de faiblesse, la production ayant chuté de 10,9 % en raison de la chaleur et de la sécheresse record dans l’Ouest.

Statistique Canada a souligné que le deuxième mois de suite de baisse pour ce secteur marquait ses plus fortes contractions mensuelles consécutives depuis que l’agence a commencé à recueillir des données comparables, en 1997.

Pour clôturer le trimestre, Statistique Canada a estimé que le PIB était resté essentiellement inchangé en septembre, une baisse importante dans le secteur manufacturier et un déclin du commerce de détail ayant contrebalancé les gains d’autres secteurs.

Un écart difficile à combler

Statistique Canada a calculé que l’activité économique totale en août avait été inférieure d’environ 1 % à son niveau de février 2020, soit avant la pandémie. Cet écart n’aurait pas changé en septembre.

L’économiste Sri Thanabalasingam, de la Banque TD, a noté qu’il pourrait être difficile de combler cet écart, parce que les perturbations de la chaîne d’approvisionnement mondiale et les pénuries de main-d’œuvre pourraient réduire la production pour les mois à venir.

La Banque du Canada, écrit-il, « pourrait devoir, une fois de plus, ajuster son discours sur l’économie canadienne ».

La banque centrale a révisé à la baisse mercredi ses prévisions de croissance annualisée pour le troisième trimestre, les faisant passer à 5,5 %, par rapport à 7,3 % précédemment. Sa prévision de croissance pour 2021 a aussi été abaissée à 5,1 %, par rapport à 6 % précédemment.

Même si la croissance est tombée en deçà des attentes, M. Porter a noté que la banque centrale envisageait toujours de relever les taux plus tôt que prévu parce que l’inflation est au-dessus de sa zone de confort.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a averti que l’inflation devrait continuer de grimper à mesure que les problèmes de chaîne d’approvisionnement s’aggraveront dans les semaines à venir. Il a ajouté que les goulots d’étranglement devraient éventuellement se résoudre d’eux-mêmes.

L’économiste en chef de la Banque CIBC, Avery Shenfeld, a indiqué vendredi que l’effet des goulots d’étranglement devrait s’atténuer en 2022 si la source des problèmes – souvent des épidémies de COVID-19 à l’étranger – finissait par s’estomper.