Investir et innover. C’est le chemin que doit obligatoirement emprunter le Québec pour rattraper son retard de productivité et profiter de la relance économique post-pandémie, estiment les dirigeants des trois principaux investisseurs institutionnels québécois qui étaient les invités du Cercle canadien de Montréal pour son dernier évènement de la saison.

Du retard à rattraper

Même si les prévisions économiques sont au beau fixe pour les prochains mois, les problèmes de productivité de l’économie québécoise ne sont pas disparus avec la pandémie, souligne Bicha Ngo, première vice-présidente d’Investissement Québec. « La productivité de l’économie québécoise, exprimée en PIB par heure travaillée, est de 50 $ comparativement à 52 $ en Ontario et à 56 $ pour le Canada », a-t-elle dit.

Seulement 20 % des entreprises québécoises sont automatisées à 50 %, alors que cette proportion est de 50 % aux États-Unis et de 75 % en Allemagne. La réponse à ce problème tient en un seul mot : investir. « Il faut investir dans la robotisation, la numérisation et l’automatisation », a-t-elle souligné.

De nouvelles balises

« Comme investisseurs, on doit faire des choix », a expliqué Dany Pelletier, chef des investissements au Fonds FTQ. Si les indicateurs financiers traditionnels ont encore leur importance, d’autres balises s’ajoutent. L’importance accordée par les entreprises aux normes ESG (environnement, société et gouvernance) est devenue un incontournable, selon lui.

C’est aussi l’avis de Kim Thomassin, première vice-présidente et cheffe des placements au Québec de la Caisse de dépôt et placement du Québec. « Il faut que les entreprises aient un plan sur le E, le S et le G », renchérit-elle.

Investissement Québec s’intéresse aussi à « l’indice féminin », soit les entreprises gérées par des femmes, a fait savoir Bicha Ngo, avec l’objectif d’accroître ses investissements dans les entreprises qui appartiennent à des femmes.

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Bicha Ngo, première vice-présidente d’Investissement Québec

Des modèles d’affaires à repenser

La création d’emplois reste un déterminant dans la décision d’investir, selon le dirigeant du Fonds FTQ, mais la qualité des emplois est maintenant tout aussi importante. Même chose pour les chaînes d’approvisionnement, dont la pandémie a montré la fragilité. « C’est le début de quelque chose », estime Dany Pelletier. Avec la traçabilité qui se développe, il y a lieu de s’interroger sur le sens qu’on accorde au « local » dans une chaîne d’approvisionnement, pour ne pas seulement mettre un peu de « peinture locale ».

La Caisse de dépôt porte une attention particulière à « la maturité numérique » des entreprises. « C’est une indication de performance future », estime Kim Thomassin. C’est aussi une façon d’évaluer les risques qu’un modèle d’affaires soit chamboulé complètement du jour au lendemain.

Des raisons d’être optimiste

La Caisse de dépôt, Investissement Québec et le Fonds FTQ travaillent fort pour garder les sièges sociaux au Québec et en attirer de nouveaux. À ce chapitre, leurs dirigeants affichent un optimisme prudent. « Entre 2015 et 2020, deux fois plus d’entreprises du Québec ont fait des acquisitions à l’étranger que d’entreprises étrangères qui ont acheté des entreprises québécoises », a fait valoir Bicha Ngo.

Le chef des investissements du Fonds FTQ estime pour sa part qu’il y a lieu d’être optimiste, si on se fie au nombre de transactions actuellement en chantier dans son organisation. « Le Québec est un prédateur », dit M. Pelletier.