(Washington) La récession 2020 avait été historique. L’économie mondiale se remet désormais plus vite que prévu de la pandémie, stimulée par la robuste croissance américaine et relancée par la vaccination, a annoncé mardi le FMI, qui s’inquiète toutefois d’une reprise « à plusieurs vitesses ».

« Malgré la grande incertitude sur l’évolution de la pandémie, on discerne de plus en plus la sortie de cette crise sanitaire et économique », a estimé Gita Gopinath, l’économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI).

L’institution de Washington, qui a publié mardi ses dernières prévisions mondiales à l’occasion de ses réunions de printemps, table à présent sur une croissance du Produit intérieur brut mondial de 6 % cette année (+0,5 point comparé à sa projection de janvier), et de 4,4 % l’an prochain (+0,2 point).  

Preuve de la reprise, le volume d’échanges de biens et services dans le monde va rebondir de 8,4 % cette année.

Pour les États-Unis, qui ont récemment adopté un plan d’aide de 1900 milliards de dollars, les projections de croissance pour 2021 et 2022 s’établissent respectivement à 6,4 % (+1,3 point) et 3,5 % (+1 point).

La première économie du monde reprend de la vigueur grâce à une campagne de vaccination accélérée – plus de 3 millions de doses injectées par jour – ce qui a permis d’assouplir les restrictions dans les secteurs de la restauration, de l’hôtellerie et du tourisme.  

Les États-Unis sont même « la seule grande économie » dont le PIB 2022 va dépasser la prévision qui avait été faite avant la pandémie, souligne le FMI.

Et la croissance américaine pourrait s’avérer encore plus forte si l’administration Biden parvenait à faire voter au Congrès son plan d’investissements de plus de 2000 milliards de dollars dans les infrastructures.

Reprise inégale

Si le FMI se félicite des retombées positives de la croissance américaine dans le monde, il fait aussi le constat d’une reprise « à plusieurs vitesses » avec de « nombreux pays » qui ne reviendront pas à leur niveau d’avant la pandémie avant 2023, quand la Chine a déjà retrouvé le sien dès 2020.

Au sein même des pays avancés, l’écart se creuse avec des pays de la zone euro à la traîne : la croissance devrait atteindre 4,4 % cette année, un rythme insuffisant pour effacer la contraction de 6,6 % enregistrée l’an passé.  

C’est que sur le Vieux Continent, la campagne de vaccination a pris du retard. La France, dont la croissance devrait atteindre 5,8 % après une baisse du PIB de 8,2 %, a même dû se résoudre à reconfiner sa population et fermer ses écoles.  

Ailleurs dans le monde, la Chine et l’Inde vont enregistrer des bonds de leur PIB supérieurs à la moyenne mondiale (+8,4 % et +12,5 % respectivement) mais la zone Amérique latine et Caraïbes va s’accroître de seulement 4,6 % après un plongeon de 7 % en 2020.  

Les pays émergents et les pays à bas revenus devraient souffrir encore longtemps en raison de ressources budgétaires limitées et d’une vaccination poussive.

« Grand degré d’incertitude »

Le FMI reconnaît qu’un « grand degré d’incertitude » entoure ses projections mondiales qui pourraient ainsi être meilleures si la vaccination s’accélérait partout dans le monde ou au contraire, être moins bonnes si la pandémie venait à se prolonger en raison de l’apparition de variants du nouveau coronavirus.

Avec une reprise économique désynchronisée à travers le monde, une remontée brutale des taux d’intérêt, en particulier aux États-Unis, fragiliserait encore un peu plus les pays émergents qui seraient confrontés à l’augmentation du coût de leur dette.

Gita Gopinath recommande de garder le cap en matière de politique monétaire et de continuer à soutenir les économies, mais avec des plans de relance « plus ciblés ».

Elle s’est également dite « favorable » à l’imposition d’un impôt mondial minimum sur les sociétés, au lendemain d’un appel en ce sens de l’administration Biden.

Les gouvernements sont confrontés à une évasion fiscale à grande échelle et au transfert d’argent vers les paradis fiscaux, ce qui « nous préoccupe beaucoup » parce que cela « réduit l’assiette fiscale sur laquelle les gouvernements peuvent percevoir des revenus et effectuer les dépenses sociales et économiques nécessaires », a-t-elle expliqué lors d’une conférence de presse.  

« Nous sommes donc très favorables à un impôt global minimum sur les sociétés », a-t-elle ajouté.

« Si tous les regards sont tournés vers la pandémie, il est essentiel de faire des progrès en matière de résolutions des tensions commerciales et technologiques », a également souligné Gita Gopinath.

A l’avenir, les pays devront aussi se concentrer sur le rattrapage scolaire et sur la requalification de millions de travailleurs dont les emplois auront disparu à jamais avec cette crise.