(New York) Les prix du pétrole se sont repliés lundi après avoir franchi brièvement, pour le Brent, le seuil des 70 dollars le baril, dopé par des attaques contre les installations pétrolières d’Arabie saoudite et par les limitations volontaires de production de l’OPEP+.

Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai a culminé à 71,38 dollars en cours de séance asiatique, à son plus haut depuis le 8 janvier 2020. Il s’est ensuite replié pour terminer en retrait de 1,61 % ou 1,12 dollar à 68,24 dollars par rapport à la clôture de vendredi.

Le baril américain de WTI pour avril a lâché 1,57 % ou 1,04 dollar à 65,05 dollars.

Malgré ces replis, les deux contrats de référence évoluent à des niveaux proches de ceux d’avant la pandémie de COVID-19.

Le ministère saoudien de l’Énergie, cité par l’agence officielle Spa, a annoncé dimanche soir qu’un drone avait frappé un port pétrolier alors qu’un missile balistique avait visé des installations du géant de l’énergie Aramco, dans l’Est saoudien.

« L’un des parcs de réservoirs pétroliers du port de Ras Tanoura (est), un des plus grands ports pétroliers du monde, a été attaqué ce matin par un drone venant de la mer », a indiqué le ministère dans son communiqué, précisant que le drone avait été détruit.

Les États-Unis ont condamné lundi des attaques « odieuses » et « inacceptables », attribuées aux rebelles yéménites houthis.

Les prix ont rapidement effacé leurs gains du début de la séance. « La production de pétrole n’a pas été affectée », explique Louise Dickson, analyste chez Rystad.

« Le marché a relâché ses gains quand il a été clair que l’attaque n’avait pas provoqué de dommages et il y a eu des prises de profits après la remarquable hausse de ces derniers mois », a indiqué également Andy Lipow de Lipow Oil Associates.  

Le seuil des 70 dollars « est certainement un seuil psychologique dont les membres de l’OPEP+ doivent être satisfaits », a ajouté l’analyste.  

Prudence de l’OPEP

« L’or noir était déjà proche des 70 dollars », remarquent pour leur part les analystes de Commerzbank, profitant de la prudence de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et de ses partenaires (OPEP+), qui se sont réunis la semaine passée.

Alors que les analystes s’attendaient à des tensions entre l’Arabie saoudite et la Russie, c’est la prudence du premier qui a prévalu, la réunion n’ayant débouché jeudi que sur une ouverture modérée du robinet de brut à compter du mois prochain.

« Les Saoudiens sont très prudents sur la perspective d’une relance de la demande post-COVID-19 », explique Stephen Brennock, analyste chez PVM.

« Les inquiétudes sur une potentielle destruction de la demande en raison de la hausse des prix, ou sur un déséquilibrage du marché avec une offre insuffisante, n’ont pas été entendues », résument les analystes de JP Morgan.

Les prix du brut ont renoué avec leur niveau de début 2020, avant que la pandémie de coronavirus ne paralyse l’économie mondiale et ne fasse plonger les cours.

Inflation et guerre des producteurs

Depuis fin 2020, les marchés espèrent que les vaccinations vont permettre une relance rapide, notamment pour le secteur des transports.

Aux États-Unis, le passage au Sénat du plan de relance géant voulu par Joe Biden promet une demande forte chez le premier consommateur mondial.

D’une manière générale, selon Andy Lipow, « le marché est enthousiaste avec le déploiement des vaccins aux États-Unis et le passage du plan de relance de 1900 milliards de dollars ce qui va encourager la demande ».

Mais la hausse des prix du brut « pourrait faire plus de mal que de bien » à l’économie mondiale, prévient Stephen Brennock. « Cette dernière montée devrait alimenter la crainte des marchés sur un retour de l’inflation », prévient-il.

Par ailleurs, des prix aussi élevés pourraient inciter des producteurs américains à relancer de coûteuses exploitations de pétrole de schiste, commentent les analystes de JP Morgan.

« Avec un baril de WTI au-dessus de 60 dollars cette année, la production devrait grimper, cela veut dire que l’année prochaine sera marquée par une nouvelle guerre pour les parts de marché », prévoient-ils.