(Montréal) Après avoir acquiescé à la demande du gouvernement Trudeau de suspendre les vols vers les destinations soleil jusqu’au 30 avril et en offrant des remboursements aux voyageurs dans certains cas, les transporteurs aériens lui demandent maintenant de passer à l’action en offrant un soutien financier à l’industrie.

Le Conseil national des lignes aériennes du Canada, qui représente des compagnies comme Air Canada, Air Transat, WestJet et Jazz Aviation, a également appelé à la mise en place d’une « stratégie de redressement », alors que des syndicats et observateurs s’inquiètent des répercussions du plus récent tour de vis.

« Nous devons veiller à prendre rapidement des mesures de fond », a souligné son président-directeur général, Mike McNaney, dans un communiqué.

À compter de dimanche, les quatre principaux transporteurs au pays cesseront d’offrir des liaisons vers les Caraïbes et le Mexique. Cette situation a incité Transat A. T. à suspendre ses activités jusqu’à la fin avril. À compter du 3 février, les Canadiens revenant au pays seront redirigés vers quatre aéroports, soit Montréal, Toronto, Vancouver ou Calgary.

En plus du test de dépistage négatif à la COVID-19 requis avant le départ, ils seront soumis à un test obligatoire à leur arrivée à l’aéroport. Ils devront rester dans un hôtel supervisé, à leurs frais, en attendant le résultat du second test. Le séjour pourrait durer trois jours et le coût osciller autour de 2000 $.

Les compagnies aériennes négocient depuis des mois à propos d’une aide sectorielle avec Ottawa, qui exige qu’une intervention s’accompagne de remboursements aux voyageurs dont les vols ont été annulés depuis le début de la crise sanitaire.

Service réduit

Plusieurs dizaines de liaisons sont ainsi temporairement suspendues. Les sociétés n’avaient pas annoncé de nouvelles mises à pied dans l’immédiat, mais le couperet devrait vraisemblablement tomber de nouveau. Plus tôt ce mois-ci, Air Canada (1900 postes) et WestJet (plus de 1000 personnes) avaient annoncé des réductions.

Les nouvelles restrictions ont toutefois engendré de nouvelles répercussions.

Deux jours après avoir annoncé la fin de son service depuis Toronto, Transat A. T. a indiqué que les activités seraient sur pause jusqu’au 30 avril. Sa filiale Air Transat ne devrait offrir que six destinations – dont une vers Paris – depuis Montréal. Le voyagiste comptait 1300 employés actifs.

« Nous sommes impatients de planifier notre éventuel retour en service au printemps », a souligné Sunwing, dans une déclaration envoyée par courriel, sans préciser davantage l’impact sur ses activités et ses employés.

De son côté, Air Canada a souligné qu’elle évaluait ses besoins de personnel à « chaque fois » qu’il y a des réductions de service, sans aller plus loin. À l’échelle de son réseau, la suspension de 15 liaisons vers le Sud ne devrait pas avoir une incidence « considérable » sur « l’épuisement du capital », a souligné la compagnie.

Remboursements et retours

Air Canada, Transat et Sunwing ont fait savoir que leurs clients touchés seraient remboursés. Dans tous les cas, des plans de contingence seront déployés dans le but de rapatrier les voyageurs qui se trouvent actuellement à l’étranger.

« Air Transat exploitera plusieurs dizaines de vols au cours des deux prochaines semaines pour rapatrier ses clients au Canada. Les clients de Transat dont le vol de retour au pays est prévu d’ici le 13 février conserveront leur vol initial alors que les clients dont le vol est annulé seront automatiquement réacheminés sur un autre vol d’Air Transat », a précisé l’entreprise dans un communiqué.

« C’est comme si l’industrie chutait avec un petit parachute et qu’on vient lui couper le parachute », a estimé le directeur du groupe d’études en management des entreprises en aéronautique à l’UQAM, Mehran Ebrahimi, au cours d’un entretien téléphonique, en soulignant néanmoins qu’Ottawa avait réglé une question de santé publique.

Mais au-delà des compagnies aériennes, cette nouvelle réduction de service découlant de la suspension des vols vers les destinations vacances viendra aggraver la situation chez les sous-traitants des compagnies aériennes, les aéroports et les agences de voyages, a expliqué l’expert.

Parallèlement, des syndicats comme Unifor, le Syndicat canadien de la fonction publique, l’Association internationale des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale et l’Association des pilotes d’Air Canada ont effectué des sorties distinctes pour exprimer leurs craintes en demandant une nouvelle fois une intervention gouvernementale.

« J’espère que s’il y a de l’aide, elle ne sera pas générique pour tout le monde, a dit M. Ebrahimi. Elle doit être au cas par cas, parce que les besoins d’Air Canada, de Transat A. T. et WestJet sont différents. »

La décision d’Ottawa a fait piquer du nez les titres d’Air Canada et de Transat A. T. à la Bourse de Toronto. L’action du plus important transporteur aérien au pays a clôturé à 20,02 $, en baisse de 4,8 %, ou 1,01 $. Celle du voyagiste québécois a abandonné 3 %, ou 14 cents, pour terminer à 4,58 $.