(Washington) La croissance est de retour aux États-Unis après le plongeon économique du printemps, et le rebond est historique, mais cela ne met pas fin à la crise provoquée par la pandémie de COVID-19.  

Ce rebond s’est invité dans la dernière ligne droite de la campagne présidentielle du 3 novembre, le président Donald Trump, qui brigue un second mandat face au démocrate Joe Biden, s’en attribuant le mérite et promettant une économie « fantastique » s’il était réélu.

Le Produit intérieur brut (PIB) des États-Unis a bondi entre juillet et septembre de 33,1 % en rythme annualisé, du jamais-vu, selon une estimation préliminaire du département du Commerce publiée jeudi.

Le niveau de création de richesses lors des trois derniers mois est nettement supérieur au bond de 16,7 % du PIB enregistré au premier trimestre 1950, le précédent record.  

Mais cela reste loin des niveaux précédant les confinements décidés au printemps dans de nombreux États du pays pour limiter la propagation de la COVID-19, faisant plonger l’économie de 31,4 % au deuxième trimestre.

Les États-Unis privilégient l’évolution du PIB en rythme annualisé, qui le compare à celui du trimestre précédent puis projette l’évolution sur l’année entière à ce rythme.

« Meilleur PIB »

Ainsi, le rebond n’a-t-il été que de 7,4 % après une chute de 9 % au trimestre précédent si on prend en compte le mode de calcul d’autres économies avancées, comme la France, qui compare un trimestre sur l’autre corrigé des jours ouvrés. La France s’attend de son côté à un rebond de 16 % de son PIB au troisième trimestre, par rapport au deuxième.

Cela n’a pas empêché le locataire de la Maison-Blanche Donald Trump de célébrer sur Twitter : « Le plus grand et le meilleur (PIB) de l’histoire de notre pays », promettant que « l’année prochaine sera FANTASTIQUE ! ! ! ».

Il a égratigné au passage son rival qui le distance dans la plupart des sondages nationaux : « Joe Biden l’Endormi et sa proposition d’augmentation record des impôts, tuerait tout. Je suis tellement content que ce grand chiffre du PIB soit sorti avant le 3 novembre », jour de l’élection.

M. Biden, qui estime, comme M. Trump, être celui qui redonnera ses lettres de noblesse à l’économie américaine, a, lui, jugé que le rebond de la croissance n’était pas assez fort.

« La reprise ralentit, voire même stagne », a dénoncé l’ancien vice-président de Barack Obama, disant que le léger sursaut n’aidait que « ceux qui sont au sommet, mais laisse derrière eux des dizaines de millions de familles de travailleurs et de petites entreprises ».

Le rebond de l’activité économique enregistré entre juillet et septembre a été essentiellement soutenu par les aides généreuses versées par le gouvernement fédéral aux ménages et entreprises face à la pandémie de COVID-19, qui ont pour la plupart désormais pris fin.

Ralentir

La consommation, moteur de la croissance, a été en hausse de 40,7 %, ce qui démontre « la puissance de la politique budgétaire à un moment où des millions de personnes sont restées sans travail, en raison de la pandémie », a fait remarquer Ian Shepherdson, chef économiste chez Pantheon Macroeconomics, dans une note.

Les achats de voitures neuves par les ménages ont par exemple augmenté de 17 %, ceux des équipements de la maison de 12 % et les dépenses pour les soins de santé de 18 %. Ce dernier chiffre suggère que les Américains retournent chez le médecin et reprogramment les opérations chirurgicales. Les ménages américains se sont aussi jetés sur les vêtements (+27,2 %).

Il sera difficile de reproduire de tels chiffres dans les prochains mois, préviennent des économistes, qui font valoir que le rythme de la croissance dépendra non seulement de l’évolution de la pandémie, mais aussi, et surtout, des discussions sur un nouveau plan de soutien à l’économie actuellement dans l’impasse en attendant les résultats de l’élection présidentielle.

De nombreux voyants sont à l’orange, à l’exemple du marché du travail qui a certes enregistré une baisse du nombre de chômeurs indemnisés, ils sont encore quelque 7,75 millions à toucher des allocations. Et des millions d’autres arrivent en fin de droits.

« Après le confinement et les dynamiques de réouverture (de l’activité économique) qui ont entraîné d’importantes fluctuations de l’activité entre mars et septembre, les réalités de la situation économique apparaissent », avertit notamment Brian Coulton, chef économiste de Fitch.

Selon lui, « la croissance devrait ralentir fortement, nous sommes encore loin de la normalisation et la flambée des cas de virus signifie que la distanciation sociale et toutes ses conséquences économiques vont perdurer ».