(Londres) La Banque d’Angleterre a annoncé jeudi le maintien de son taux d’intérêt directeur et de son programme de rachat d’actifs massif, tout en évoquant la possibilité d’instaurer un taux négatif si la situation économique se dégrade compte tenu de la pandémie et du Brexit.

Actuellement, le taux d’intérêt est à 0,1 %, un plus bas historique fixé en mars, en pleine pandémie de COVID-19.

Le Comité de politique monétaire (MPC) s’est vu présenter la manière dont « un taux d’intérêt négatif pourrait être implanté efficacement », explique le communiqué, à propos d’une hypothèse évoquée depuis plusieurs mois et à laquelle les responsables de l’institution se sont jusqu’alors montrés réticents.

Le programme de rachat d’actifs massif, porté à 745 milliards de livres (environ 800 milliards d’euros) en juin, pourrait également gonfler si « les conditions de marché se détériorent significativement ».

Les analystes sont partagés sur le montant de l’augmentation, qui pourrait être décidée début novembre, hésitant entre 50 et 100 milliards de livres en plus.

Si le discours sur un renforcement de ce programme d’assouplissement quantitatif (QE) avait été anticipé par les observateurs, l’accélération des travaux quant à la possible instauration d’un taux négatif les a en revanche surpris.

« Schématiquement, si nous avons un Brexit sans accord, des taux d’intérêt négatifs et une augmentation du QE sont presque certains », a réagi Naeem Aslam, analyste pour Avatrade.

Cette perspective a fait fléchir la livre : alors qu’elle était relativement stable face à l’euro et au dollar avant l’annonce de la décision, elle perdait vers 8 h 15 plus de 0,5 % face à la devise européenne et 0,7 % face au billet vert.

« Nouvelles inquiétudes » sur le Brexit

Pour autant, l’institut monétaire continue de tabler sur un rebond de la croissance en 2021, et s’est même dit légèrement plus optimiste que lors de la précédente réunion en août.

Cependant, « la trajectoire de la croissance et de l’inflation dépendra de l’évolution de la pandémie et des mesures prises pour protéger la santé publique, ainsi que de la nature des nouveaux accords commerciaux entre l’Union européenne et le Royaume-Uni », a averti le MPC qui rappelle que, dans ce contexte, les perspectives économiques sont particulièrement floues.

Les négociations commerciales autour du Brexit, dans l’impasse, ont été peu évoquées par la Banque d’Angleterre, qui continue de baser ses prévisions sur un accord, le Comité se bornant à signaler de « nouvelles inquiétudes » à ce sujet sur les marchés financiers.

Les négociations sur la relation post-Brexit entre le Royaume-Uni et l’Union européenne se sont en effet fortement envenimées la semaine dernière, lorsque le gouvernement de Boris Johnson a confirmé sa volonté de modifier l’accord sur le Brexit conclu l’an passé, en violation du droit international. L’initiative a fait bondir les Européens qui ont menacé le Royaume-Uni d’une action en justice.

L’institut monétaire a également rappelé qu’il n’y aurait pas de resserrement de la politique monétaire sans reprise nette de l’activité et si « l’objectif d’inflation de 2 % n’est pas durablement atteint ».  D’après ses dernières prévisions, ce ne sera pas avant 2022.

Entre temps, la hausse des prix a subi un gros coup de frein en août, à 0,2 % contre 1 % en juillet, principalement en raison d’un programme gouvernemental de subventions des repas pris dans les restaurants pour dynamiser le secteur.

Quant au chômage, autre indicateur important, celui-ci tend à augmenter, avec 4,1 % en moyenne glissante sur les trois mois achevés fin juillet.

Surtout, économistes et milieux d’affaires craignent une déferlante de licenciements à la fin octobre quand le programme de chômage partiel mis en place par le Trésor pour aider les entreprises à affronter le choc du coronavirus et du confinement prendra fin.