Le Québec tout entier est engagé vers la reprise économique et chacune de ses régions, chacun de ses secteurs industriels le vivent de différentes façons. Notre chroniqueur est parti sur la route pour témoigner de la vitalité de nos régions et des difficultés avec lesquelles elles doivent composer.

(MONT-TREMBLANT) Moteur de l’activité touristique de la région des Hautes-Laurentides, la station de ski Mont Tremblant émerge bien timidement du confinement dans lequel elle a été plongée depuis le 14 mars dernier. La station fonctionne en mode survie et la forte fréquentation traditionnelle générée par le ballet incessant d’évènements d’envergure – Festival de blues, Ironman, Fête de la musique… – ne sera pas au rendez-vous cet été, mais au moins la montagne commence à reprendre vie.

Patrice Malo, président et chef des opérations de Mont Tremblant, était content de me rencontrer jeudi après-midi, il avait enfin une bonne nouvelle à communiquer. Les autorités de la Santé publique venaient d’autoriser la reprise des activités de la télécabine qui permet aux visiteurs d’accéder au sommet du mont Tremblant.

« On relance samedi les opérations et cela va nous permettre de rappeler au travail 260 de nos employés qui ont été mis à pied à cause de la pandémie. On va au moins avoir des activités à offrir à nos invités. La luge en montagne, notre parcours nocturne Tonga Lumina de Moment Factory », se réjouit celui qui gère la crise en temps réel depuis plus de trois mois maintenant.

PHOTO FOURNIE PAR TREMBLANT

Patrice Malo, président et chef des opérations de Mont Tremblant

Il faut se rappeler que la décision de fermer toutes les activités à Mont Tremblant a été prise le 14 mars dernier, un jour avant le début du congé scolaire ontarien alors que la station affichait complet.

« En une journée, il a fallu aviser les occupants de 2500 unités d’hébergement [avec une moyenne de quatre personnes par unité] que leur séjour avait été annulé. Les 11 hôtels du village piétonnier ont fermé leurs portes. Actuellement, un seul hôtel est ouvert sur le site, mais il y en a huit qui vont ouvrir en fin de semaine », souligne Patrice Malo.

PHOTO YVES TREMBLAY, LES YEUX DU CIEL

Vue de la ville de Mont-Tremblant, dans les Laurentides

Le gestionnaire ne se fait toutefois pas d’illusions. La station Mont Tremblant va être en mode survie jusqu’à la prochaine saison de ski sans savoir exactement quelle sera la situation à ce moment-là. Patrice Malo prévoit que les hôtels du village piétonnier vont afficher un taux d’occupation de 20 % durant la saison estivale, contrairement à 60 % en période normale.

On est une station de ski qui a développé une forte activité évènementielle pour attirer les visiteurs durant l’été. Mais là, aucun évènement sportif ni culturel ne va se dérouler durant l’été.

Patrice Malo, président et chef des opérations de Mont Tremblant

Le week-end dernier, Mont Tremblant devait accueillir le demi-Ironman, un évènement où l’on dénombrait 5500 athlètes inscrits qui venaient accompagnés de leur famille. À lui seul, le Festival de blues qui s’étire sur une dizaine de jours attire 120 000 visiteurs quotidiennement.

« Là, on va devoir compter sur une clientèle essentiellement québécoise durant l’été. Habituellement, on a 15 % de visiteurs américains, de 30 à 35 % de visiteurs ontariens et 50 % de visiteurs du Québec. On voit quelques plaques ontariennes, mais on ne prévoit pas beaucoup d’achalandage cet été », observe Patrice Malo.

Tremblant n’a d’ailleurs ouvert qu’un seul de ses deux parcours de golf. Le Géant a été gardé fermé et on a transféré les voiturettes au parcours du Diable. Un arrêt au golf voisin La Bête nous a appris que la fréquentation n’était qu’à 50 % du taux habituel.

Un retour à la vie

Mais il y avait toutefois un peu de vie dans le village piétonnier de Mont Tremblant jeudi après-midi. Des visiteurs se promenaient paisiblement dans les allées et constataient qu’une boutique sur deux environ avait rouvert ses portes. Les restaurants ont redémarré leurs activités, mais les terrasses étaient désertes. Rien à voir avec l’animation caractéristiques des lieux.

« Ça recommence tranquillement. Il y a au moins 5 des 60 boutiques qui vont rester fermées. Sinon, je prévois un retour à la presque normale d’ici deux semaines. Tous les hôtels vont rouvrir, mais avec un nombre plus limité de clients », anticipe Patrice Malo.

Dans le secteur de l’ancienne municipalité de Saint-Jovite, j’ai été surpris de constater qu’il y avait une circulation automobile relativement dense pour un milieu de semaine.

L’activité commerciale et touristique reprend vie tranquillement là aussi et a profité d’une belle collaboration des autorités municipales.

Stéphane Éthier, propriétaire depuis 20 ans du restaurant Le Vieux Four, estime qu’il enregistre depuis la réouverture de son établissement il y a 10 jours un achalandage de 60 % par rapport à celui de l’an dernier.

Je n’ai pas à me plaindre. Les gens reviennent et vont revenir. Ce qui m’inquiète, c’est de retrouver des employés. Sur le plancher, tout le monde est revenu, mais il me manque trois ou quatre personnes en cuisine. Je n’arrive pas à trouver du monde. La PCU n’aide pas, c’est certain.

Stéphane Éthier, propriétaire du restaurant Le Vieux Four

Mais Stéphane Éthier n’a que des éloges à l’endroit de la municipalité de Mont-Tremblant qui a décidé d’assumer la moitié des coûts d’installation d’une terrasse rue de Saint-Jovite qui a permis au Vieux Four de récupérer des tables qui ont été sacrifiées à l’intérieur du restaurant pour respecter les règles de distanciation physique.

« On a pris cette initiative pour épauler nos commerçants et dynamiser notre centre-ville, m’explique Louis-Martin Levac, responsable du développement économique de Mont-Tremblant. On a construit 14 terrasses dans la municipalité et 3 dans le village de Mont-Tremblant. Et c’est un legs parce que les commerçants vont pouvoir les réinstaller l’an prochain. »

Comme ces terrasses ont empiété sur l’espace de stationnement de la rue principale, la municipalité a loué deux terrains vacants pour y aménager une centaine d’espaces additionnels. Une belle initiative simple, mais qui fait plaisir à tous.