Ce n’est pas pour rien que le gouvernement fédéral vient de nommer Monique Leroux à la tête du Conseil sur la stratégie industrielle canadienne, qui aura pour mandat de conseiller et de guider Ottawa dans ses interventions pour assurer la relance de tous les grands secteurs industriels au pays. C’est que l’ex-PDG du Mouvement Desjardins a une certaine expérience des crises. Elle a surmonté celle de 2008-2009 alors qu’elle amorçait son mandat à la direction du mouvement coopératif.

Mardi, le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, Navdeep Bains, a annoncé la création d’un groupe conseil sur la stratégie industrielle canadienne dans le but d’assurer la meilleure collaboration possible entre les acteurs industriels du secteur privé et le gouvernement canadien pour assurer la relance économique tant espérée.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Monique Leroux vient d'être nommée à la tête du Conseil sur la stratégie industrielle canadienne.

Et c’est à Monique Leroux que le gouvernement fédéral a confié la mission de présider et de coordonner les travaux du Conseil sur la stratégie industrielle. Il doit tenir sa première rencontre lundi prochain en vue d’arrimer solidement les interventions du gouvernement aux besoins des entreprises afin d’émerger de la violente récession induite par la crise du coronavirus.

Monique Leroux s’est dite très honorée – et même un peu surprise – que le gouvernement fédéral nomme une femme, et francophone de surcroît, à la tête de ce comité de relance.

Ça n’arrive pas souvent, mais c’est un geste de confiance que j’apprécie beaucoup. Je pense que c’est lié au fait que j’ai dirigé une grande institution [le Mouvement Desjardins] pendant la crise de 2008-2009.

Monique Leroux

Elle avoue se préparer fébrilement à la première des multiples rencontres que son Conseil va organiser au cours des prochains mois.

Le gouvernement fédéral avait déjà mis sur pied en 2017 des tables sectorielles pour mieux coordonner ses interventions auprès des acteurs de sept grands secteurs industriels, soit l’agroalimentaire, le numérique, le manufacturier, le tourisme et l’accueil, les sciences de la vie et de la santé, les technologies vertes et les ressources naturelles.

« On a ajouté deux secteurs qui ont été frappés très durement par la crise et qui sont encore lourdement affectés, soit le commerce de détail et le transport, notamment le transport aérien », précise la présidente du Conseil. Elle souligne que c’est une autre Québécoise, Sylvie Vachon, PDG du Port de Montréal, qui préside la table sectorielle du transport.

« On a une première réunion lundi et on en aura une toutes les deux semaines durant les trois prochains mois. Lundi, on va définir notre mandat et on va se mettre à l’ouvrage en identifiant les expertises dont on aura besoin et la géographie de chacun des secteurs », résume Monique Leroux.

Une reprise lente avec changements structurels

L’ancienne PDG du Mouvement Desjardins de 2008 à 2016, qui a été présidente du conseil d’Investissement Québec de 2016 à 2020 et qui est aujourd’hui vice-présidente du conseil de Gestion Fiera, explique que son groupe va déployer ses travaux en différentes phases.

Il faudra d’abord établir le diagnostic de chacun des secteurs industriels pour ensuite proposer dès septembre prochain des solutions afin de bien se positionner pour profiter au maximum de la reprise et enfin arriver à moyen terme à identifier les enjeux les plus structurants pour chacun des secteurs d’activités.

« Je participais ce matin à un webinaire animé par Olivier Blanchard, l’ex-économiste en chef du Fonds monétaire international, qui estime comme plusieurs que le creux de la crise a été atteint.

« Certains pensent que la reprise va se faire sur une lancée progressive, mais de façon assez rapide avec quelques turbulences en cours de route, et d’autres, comme Olivier Blanchard, sont plutôt d’avis que la relance va prendre de 18 à 24 mois, mais qu’elle va impliquer des changements structuraux importants. C’est ce que je pense moi aussi », expose la présidente.

La numérisation va s’imposer davantage dans tous les secteurs d’activités, notamment celui du commerce de détail où la gestion des bilans devra considérablement s’améliorer et les chaînes d’approvisionnement vont se rapprocher des centres de production pour devenir plus locales.

Le Conseil de la stratégie industrielle va compter sur une équipe permanente de chercheurs et d’analystes et son grand objectif sera de donner une vue intégrée de l’activité économique canadienne, insiste Monique Leroux, et des solutions pour réparer les fractures causées par la pandémie.

« La crise que l’on a connue en 2008-2009 était une crise financière qui s’est réglée avec l’intervention massive des banques centrales et des gouvernements. La crise actuelle déborde largement de ces cadres-là puisqu’on fait face une crise sanitaire qui implique une intervention globale qui nécessite l’intervention d’instances mondiales comme l’Organisation mondiale de la santé.

« La crise du coronavirus nous démontre surtout toute la fragilité de notre environnement. La responsabilité sociale et environnementale des entreprises va être au cœur d’une reprise économique durable », anticipe Monique Leroux.