(Londres) La Banque d’Angleterre (BoE) prévoit une chute historique de 14 % du produit intérieur brut au Royaume-Uni cette année à cause du choc économique provoqué par la pandémie de coronavirus, mais choisit de garder sa politique monétaire inchangée pour le moment.

Dans le détail, la production britannique a baissé de 3 % au premier trimestre et devrait chuter de 25 % au deuxième, avant de se reprendre progressivement, a souligné l’institution.

« Les mesures de distanciation sociale mises en place pour ralentir la propagation de la maladie nécessitent une diminution de l’activité économique radicale, mais temporaire », a expliqué le gouverneur Andrew Bailey, dans un enregistrement publié en ligne, pour justifier ce recul massif du PIB attendu.

Il y a deux semaines, Gertjan Vlieghe, membre du Comité de politique monétaire, avait déjà prévenu que le Royaume-Uni était parti pour connaître une récession « plus rapide et profonde que tout ce à quoi nous avons assisté au siècle précédent, voire depuis plusieurs siècles » à cause de l’épidémie.

Dans son rapport trimestriel, l’institution indique toutefois s’attendre à un vif rebond en 2021, projeté à +15 %.

« La Banque est toujours assez confiante dans un rebond en V », à savoir une brusque contraction de l’économie avant un redémarrage en trombe, a commenté Laura Suter, analyste pour AJ Bell.

« Nous nous attendons à ce que la reprise de l’économie se produise au fil du temps, mais beaucoup plus rapidement que lors de la crise financière mondiale » de 2008, a confirmé M. Bailey.

Une hypothèse jugée « plutôt optimiste » par Neil Wilson, analyste chez Markets.com, tandis que plusieurs observateurs évoquent une reprise plus lente, en U.

À l’annonce de la décision, la livre sterling, qui évoluait en baisse face à l’euro et au dollar, a soudainement grimpé, avant d’effacer ses gains.

Selon plusieurs analystes, les regards vont maintenant se tourner vers le premier ministre Boris Johnson et ses annonces concernant le déconfinement attendu dimanche.

Si l’institut monétaire n’a pas annoncé de nouvelles mesures, maintenant son taux d’intérêt à 0,1 %, un plus bas historique, et son programme de rachat d’actifs (QE) à 645 milliards de livres (environ 740 milliards d’euros), il s’est dit « prêt » à agir « autant que nécessaire » pour soutenir l’économie et porter l’inflation à 2 %, son objectif.

Vu les prévisions économiques sombres de la BoE pour les prochains mois, « plus de QE est quasi-certain, ce n’est qu’une question de temps », a estimé Fiona Cincotta, analyste pour City Index.

Système bancaire solide

Sur les neuf membres composant le Comité de politique monétaire, deux ont d’ailleurs voté pour étendre le programme de 100 milliards de livres et Andrew Bailey n’a pas fermé la porte à un futur assouplissement monétaire si nécessaire.

Concernant l’inflation, la Banque d’Angleterre a abaissé ses prévisions à 0,6 % en 2020 et 0,5 % en 2021. Selon elle, la hausse des prix devrait cependant atteindre les 2 % en 2022.

La Banque d’Angleterre a également publié jeudi un rapport sur la stabilité financière, dans lequel elle juge que le système financier britannique dispose d’un capital « plus que suffisant » pour absorber les pertes induites par la pandémie de COVID-19.

Si la chute du PIB pourrait se révéler plus importante que celle prévue dans le test de résistance réalisé en 2019, « le système bancaire a la capacité de soutenir l’économie britannique » et de continuer à accorder des prêts, assure l’institution.

Face à la pandémie de coronavirus, qui a fait 30 000 morts au Royaume-Uni, deuxième pays le plus touché au monde après les États-Unis, la Banque d’Angleterre avait déjà tranché dans son taux d’intérêt à deux reprises en mars et augmenté son programme de rachat d’actifs de 200 milliards de livres.

Et en dehors de son soutien à l’activité, par le biais de sa politique monétaire, la Banque d’Angleterre a octroyé il y a un mois une facilité de paiement pour le gouvernement, et autorisé ce dernier à un découvert de 20 milliards de livres pour financer son programme de soutien à l’économie.

Les mesures mises en place pour atténuer les conséquences économiques des consignes sanitaires vont en effet coûter extrêmement cher aux États, ce qui alimente les craintes d’une crise des dettes souveraines.