(Bruxelles) Les 27 de l’UE ont accepté jeudi, sous la pression de l’Italie, où la pandémie provoquée par le nouveau coronavirus a fait le plus de morts, d’examiner sous quinze jours des mesures plus fortes pour faire face à la récession annoncée.

« Nous reconnaissons pleinement la gravité des conséquences socio-économiques de la crise COVID-19 et nous ferons tout ce qui est nécessaire pour relever ce défi dans un esprit de solidarité », ont-ils affirmé dans une déclaration commune.

Les dirigeants européens ont demandé à l’Eurogroupe, l’instance des ministres des Finances des pays ayant adopté la monnaie unique, de « présenter des propositions dans un délai de deux semaines » pour permettre de « renforcer la réponse par de nouvelles actions […] à la lumière des développements, afin d’apporter une réponse globale ».

Ces nouvelles propositions ont été imposées par l’Italie et l’Espagne, qui ont réclamé une riposte économique « forte et adéquate » de la part des 27.  

Lors d’un sommet laborieux, Rome a menacé de refuser d’avaliser la déclaration commune si cette demande n’était pas prise en compte.

« Il s’agit ici de réagir avec des instruments financiers innovants et réellement adéquats à une guerre que nous devons mener ensemble pour la gagner le plus rapidement possible », avait averti le président du conseil italien Giuseppe Conte.

L’Italie, dont la dette est la deuxième plus élevée de la zone euro après la Grèce, attend de l’UE une plus grande solidarité financière.

Mercredi, neuf dirigeants européens, dont M. Conte, mais aussi le Français Emmanuel Macron, avaient exhorté à « travailler à un instrument » pour lancer un emprunt commun à toute la zone euro, y voyant le fondement d’une économie européenne plus solidaire.

« Mesures extraordinaires »

Au début du sommet, le président du Parlement européen, l’Italien David Sassoli a lui aussi appelé à « des mesures extraordinaires pour répondre » à la crise.

Mais l’idée de mutualiser les dettes de pays de la zone euro, qui faciliterait l’emprunt des États du sud, ne plait guère à l’Allemagne et aux Pays-Bas.

La chancelière allemande Angela Merkel d’ailleurs clamé haut et fort à l’issue du sommet son opposition à ce que l’on surnomme les « corona bonds ». « Ce n’est pas la conception de tous les États membres » d’émettre ces emprunts européens communs, a-t-elle dit.

Un rejet soutenu par son homologue néerlandais Mark Rutte : « nous sommes contre […] et je ne peux pas imaginer quelle circonstance pourrait nous faire changer d’avis ».

Comme lors de la crise de la dette de la zone euro entre 2010 et 2012, s’affrontent les tenants d’une plus grande solidarité financière, les pays du sud, moins vertueux en matière budgétaire, et ceux du nord, méfiants face à des voisins qu’ils jugent laxistes.

Alors que la pandémie a déjà fait plus de 10 000 morts dans l’UE, principalement en Italie et en Espagne, le confinement de la population a des conséquences désastreuses sur l’économie. Il se traduit par des entreprises à l’arrêt, des Bourses dans le rouge et des prévisions de croissance dramatiques.

Les États européens ont, dès le début de la crise, privilégié des réponses nationales, notamment en dévoilant d’importants plans de dépenses, sans chercher à se coordonner au niveau européen.

Lors de ce sommet par vidéoconférence de plus de six heures, les dirigeants ont validé la suspension des règles européennes de discipline budgétaire, ce qui leur permettra de dépenser autant que nécessaire pour lutter contre le virus et ses conséquences.

Une piste explorée est la création d’un instrument dans le Mécanisme européen de stabilité (MES), le fonds de secours de la zone euro qui permette d’octroyer une ligne de crédit de précaution à un pays, un groupe de pays, voire à l’ensemble des pays de la zone euro qui en feraient la demande.

Cet argent ne serait en principe pas utilisé, mais donnerait un signal rassurant aux marchés : en cas de problème, le pays concerné pourrait théoriquement y avoir recours.