C’est du jamais vu depuis que Statistique Canada publie les données trimestrielles du produit intérieur brut (PIB), soit depuis 1961. Entre avril et juin dernier, le PIB réel a diminué de 11,5 %, après avoir reculé de 2,1 % au premier trimestre, selon des données publiées vendredi matin.

Ces résultats sont conformes aux attentes des experts et résultent évidemment du confinement et du ralentissement considérable de l’économie canadienne à partir de la mi-mars.

« La récession n’a peut-être duré que deux trimestres jusque-là, mais la chute de l’activité a été sans précédent », écrivent Jocelyn Paquet et Kyle Dahms, du groupe Économie et Stratégie de la Banque Nationale. « Par comparaison, la baisse du sommet au creux survenue pendant la grande récession de 2008-2009 n’était que de 4,4 %. »

« Selon toute vraisemblance, le pire est derrière nous, et toute l’attention est maintenant tournée vers le déconfinement et la récupération de l’économie canadienne », estime Benoit Durocher, économiste principal au Mouvement Desjardins. « La récupération de l’économie canadienne va bon train. Cela dit, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour retrouver le niveau d’avant la crise. »

Pire qu’aux États-Unis

En termes annualisés, si l’année 2020 s’était poursuivie sur cette tendance, ce recul signifierait une baisse de 38,7 %. À titre de comparaison, le PIB réel des États-Unis a diminué de 31,7 % sur la même échelle, note Statistique Canada.

Les données plus précises pour les provinces, notamment le Québec, ne sont pas publiées.

« Alors que le Canada a été en dessous de ses homologues mondiaux, comme les États-Unis, au deuxième trimestre, conséquence de restrictions plus agressives et plus longues pour lutter contre la pandémie, ces actions semblent être payantes en termes de perspectives économiques », affirme pour sa part Royce Mendes, analyste chez CIBC. L’économie canadienne devrait « nettement surpasser [celle des] États-Unis au troisième trimestre ».

Durant le deuxième trimestre, la pandémie a touché pratiquement tous les grands secteurs de l’économie canadienne, à commencer par un recul de 13,1 % des dépenses des ménages, principale composante, qui représente 54 % du PIB.

On attribue cette baisse aux pertes d’emplois et aux occasions plus limitées de consommation, avec la fermeture de magasins, de restaurants et les restrictions sur les voyages. Sur une base annualisée, les dépenses totales des ménages canadiens se sont établies à 998,4 milliards au deuxième trimestre, contre 1175,8 milliards pour la même période en 2019.

Il s’agit, une fois de plus, d’une baisse record.

Ce sont notamment les achats de véhicules qui ont connu un recul sans précédent, avec une baisse de 37,8 % pour les voitures neuves et de 26,4 % pour les camions, les fourgonnettes et les véhicules utilitaires sport neufs.

Hausse depuis juin

Chez Desjardins, on note toutefois un aspect positif : le revenu disponible des ménages a augmenté durant cette période. La baisse de revenus des employés de 8,9 %, engendrée par les pertes d’emploi et l’activité économique ralentie, « a toutefois été plus que contrebalancée par la hausse des transferts gouvernementaux aux particuliers grâce, notamment, à la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Ainsi, le revenu disponible des ménages a augmenté de 10,8 % durant le trimestre », écrit M. Durocher.

Les investissements des entreprises ont quant à eux baissé de 16,2 %, reflétant les activités de construction limitées, les fermetures d’usines et l’incertitude généralisée, selon Statistique Canada. Tant les exportations que les importations ont considérablement diminué, dans des proportions respectives de 18,4 % et de 22,6 %.

On note de plus une baisse de 14,9 % des investissements dans le logement, essentiellement attribuable à l’arrêt de la construction. « La construction de logements unifamiliaux et d’immeubles [de] logements multiples neufs a grandement diminué, le Québec ayant affiché la baisse la plus prononcée, rapporte Statistique Canada. À mesure que les restrictions sont assouplies et que l’incertitude se dissipe, l’investissement dans le logement devrait augmenter. »

Le Canada devrait enregistrer une hausse de son PIB pour le troisième trimestre, estime l’agence fédérale. « À mesure que les gouvernements ont assoupli les mesures prises pour lutter contre la pandémie, l’activité économique a augmenté. »

Cette tendance a d’ailleurs été bien amorcée dès juin, le dernier mois du deuxième trimestre, avec une hausse de 6,5 % du PIB réel. On s’attend à une hausse moins spectaculaire, mais bien concrète d’environ 3 % en juillet.