(Londres) La Banque d’Angleterre (BoE) a dévoilé jeudi des prévisions économiques moins pessimistes qu’en mai pour 2020, mais a appelé à la prudence sur les perspectives, selon son gouverneur.

Sans surprise, l’institut monétaire a opté pour le statu quo et a même conditionné tout resserrement monétaire à une « preuve claire » d’une reprise durable.

Dans une interview à CNBC, le gouverneur de l’institution, Andrew Bailey, a toutefois précisé qu’il était en désaccord avec « les gens qui pensent que la Banque d’Angleterre est optimiste ».

Et si des données montrent une reprise, le Comité de politique monétaire (MPC) « n’en tire pas d’enseignements évidents sur ce qui nous attend », a-t-il poursuivi.

L’institut monétaire s’attend dorénavant à une récession de 9,5 % cette année, contre 14 % en mai, au plus fort de la pandémie de COVID-19 en Europe.

Une révision qui s’explique par le fait que l’économie britannique a montré des signes de franche reprise en ce début d’été, notamment dans la consommation.

En revanche, le rebond annoncé pour 2021 est attendu à 9 % contre 15 % précédemment. En somme, le produit intérieur brut britannique ne reviendra pas à son niveau de 2019 avant 2022.

De plus, la prudence reste de mise alors que l’évolution de l’épidémie, qui continue de progresser au niveau mondial, n’est pas connue et qu’« il y aura des secteurs de l’économie qui ne seront pas viables » dans le futur, a averti M. Bailey.

Hausse du chômage

« À court terme, le taux de chômage est attendu en nette hausse, avec environ 7,5 % d’ici à la fin de l’année », ont par ailleurs commenté les membres du Comité de politique monétaire.

Et « une incertitude considérable demeure quant aux perspectives de l’emploi après la fin (d) es régimes de soutien », ont-ils également alerté.

Le gouvernement prévoit de retirer fin octobre son dispositif de chômage partiel censé, depuis mars, protéger des emplois et dont 9,6 millions de salariés bénéficiaient au 2 août.

Comme attendu par le marché, les responsables ont également maintenu, à l’unanimité, leur politique monétaire ultra-accommodante, avec un taux d’intérêt directeur à 0,1 %, un plancher historique, et un programme de rachat d’actifs dont le montant, augmenté à deux reprises en pleine crise de la COVID-19, atteint 745 milliards de livres (environ 825 milliards d’euros).

Pour la première fois, ils ont signalé clairement qu’il n’y aurait pas de resserrement de la politique monétaire sans « preuve claire que des progrès significatifs sont faits en vue d’éliminer des capacités (de production) inutilisées et d’atteindre durablement l’objectif d’inflation de 2 % ».  

Par cette formulation, les membres du MPC ont conditionné tout resserrement à une amélioration tangible des perspectives économiques.

Concernant la possibilité de taux d’intérêt négatifs, comme c’est le cas dans la zone euro, le MPC l’a pour le moment écarté, doutant de l’efficacité de la mesure.

Celle-ci continue cependant de faire partie de la « boîte à outils » de l’institution, a précisé M. Bailey lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes.

« Des prévisions de croissance révisées à la hausse, une reprise plus rapide que ce qui était craint initialement et aucune bascule en faveur de taux négatifs pour le moment ont envoyé la livre vers 1,32 dollar » et à un niveau inédit depuis mars, a résumé Fiona Cincotta, analyste pour City Index.

La devise britannique progressait d’ailleurs face à toutes les autres devises.

Bas les masques pour Bailey

Enfin, la BoE en a profité pour publier son rapport sur la stabilité financière, estimant une nouvelle fois que les banques britanniques avaient les reins assez solides pour surmonter l’impact de la pandémie et continuer à financer l’économie, notamment grâce aux mesures de soutien du gouvernement.

En parallèle de ces annonces, une poignée de militants écologistes portant des masques d’Andrew Bailey se sont rassemblés devant la Banque d’Angleterre pour lui rappeler sa promesse d’investir dans une économie plus verte, alors que certaines aides de la BoE, notamment destinées au secteur aérien, ont été critiquées.