Dans un budget contenant peu de nouveautés pour les particuliers, les aidants naturels ont tiré le gros lot. Et c’est amplement mérité.

Les anciennes mesures fiscales qui leur étaient destinées étaient si complexes et obscures qu’elles ne reconnaissaient pas l’effort crucial de ces personnes dans notre société.

Sur cinq ans, Québec investira plus d’un demi-milliard de dollars dans la refonte et la bonification du crédit d’impôt remboursable pour les personnes aidantes. « Avec cette mesure, nous doublons le crédit d’impôt actuel, comme nous nous y étions engagés », a dit le ministre des Finances, Eric Girard.

Le nouveau crédit revu et corrigé ne comportera que deux volets, alors que son ancienne mouture avait quatre branches dont les méandres avaient de quoi dérouter les fiscalistes les plus motivés.

« C’était bien trop compliqué ! Je suis sûr qu’il n’y avait même pas le quart des gens qui y avaient droit qui le réclamaient », lance Stéphane Leblanc, fiscaliste associé chez EY.

En fait, une étude réalisée par le Conseil du statut de la femme, en 2018, a démontré que les programmes destinés aux proches aidants passent complètement dans le beurre, rejoignant parfois seulement 3 % des personnes admissibles.

Il est temps que l’État leur tende vraiment la main avec des mesures plus simples, plus efficaces et plus généreuses. Pas juste des grenailles.

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Le premier volet du nouveau crédit s’adressera aux contribuables qui viennent en aide à des personnes âgées de 18 ans et plus atteintes d’une déficience grave et prolongée.

Un montant universel de 1250 $ sera versé automatiquement si la personne aidante cohabite avec la personne dont elle prend soin.

À cela s’ajoutera un montant réductible de 1250 $ qui sera versé, peu importe si le proche aidant vit avec la personne aidée. Ce montant diminuera graduellement lorsque les revenus de la personne aidée dépasseront environ 22 000 $ et disparaîtra entièrement lorsqu’ils excéderont environ 30 000 $.

Au total, les proches aidants pourraient donc recevoir jusqu’à 2500 $ lorsqu’ils prennent soin d’un proche avec une déficience grave : enfant, petit-enfant, père, mère, grand-père, grand-mère, frère, sœur, oncle, tante, neveu, nièce…

Les contribuables auront même droit au crédit s’ils prennent soin de leur conjoint atteint d’une déficience grave, peu importe son âge, alors qu’auparavant, ils devaient attendre qu’il ait 70 ans, ce qui était parfaitement désolant. Grâce à cet élargissement, 21 000 personnes additionnelles seront admissibles.

Québec permettra aussi à des personnes qui ne font pas partie de la famille d’obtenir le crédit, dans la mesure où elles obtiennent une attestation prouvant qu’elles prennent soin de la personne aidée. Quelque 6000 personnes supplémentaires profiteront de cet élargissement.

Dans le cadre du deuxième volet, le nouveau crédit d’impôt procurera un montant universel de 1250 $ aux contribuables qui cohabitent avec un parent de 70 ans et plus, même si celui-ci n’a aucun problème de santé. Il peut notamment s’agir du père, de la mère, d’un oncle, d’une tante… mais pas du conjoint.

Le nouveau crédit entre en vigueur dès 2020, ce qui signifie que les contribuables pourront le réclamer dans leur déclaration de revenus du printemps 2021.

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Parallèlement, Québec abolira deux autres microcrédits complexes, restrictifs et méconnus qui comptaient un nombre de bénéficiaires ridiculement faible. À peine 272 personnes réclamaient le crédit pour la relève bénévole et 681 personnes demandaient celui pour frais de relève !

Ces mesures rataient leur cible et alourdissaient inutilement la déclaration de revenus de l’ensemble des contribuables. Un peu de ménage fera le plus grand bien.

Bravo encore pour la simplification.

Mais on pourrait faire encore plus pour s’assurer que les personnes handicapées et leur entourage obtiennent tout l’argent auquel ils ont droit.

Pourquoi ne pas mieux harmoniser les critères du fédéral et du provincial ? Pourquoi ne pas demander une seule et même attestation pour toutes les mesures ? Pourquoi ne pas créer un guichet unique fiscal pour les personnes handicapées ?

Et tant qu’à y être, pourquoi ne pas rendre tous ces crédits remboursables ? Autrement, les économies d’impôt n’ont aucune valeur pour les personnes vulnérables qui n’ont souvent pas assez de revenus pour payer des impôts.

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Le budget apportera aussi un baume de 150 millions sur cinq ans aux familles d’enfants lourdement handicapés. Elles auront droit à environ cinq heures de plus de soins à domicile par semaine, ce qui équivaut à environ 4000 $ par année.

Lorsqu’un enfant lourdement handicapé atteindra 18 ans, il sera plus rapidement admissible aux prestations maximales de Solidarité sociale, ce qui offrira une transition plus fluide aux familles qui perdent le supplément pour enfant handicapé nécessitant des soins exceptionnels lorsque celui-ci atteint la majorité.

En outre, les règles du Régime des rentes du Québec (RRQ) seront modifiées pour reconnaître le fait que les parents doivent sacrifier leur carrière pour prendre soin de leur enfant lourdement handicapé.

Désormais, un parent pourra exclure du calcul de sa rente jusqu’à 18 années de revenus plus faibles. Cela permettra à un parent qui a mis sa carrière en veilleuse durant 20 ans, par exemple, d’obtenir une rente 37 % plus élevée une fois à la retraite, calcule Daniel Laverdière, directeur principal, Banque Nationale Gestion privée 1859.

Facilement des milliers de dollars par année, jusqu’à la fin de ses jours.