(Vienne) Les grands pays exportateurs de pétrole et la Russie ont trouvé un accord vendredi pour réduire encore leur production d’au moins 500 000 barils par jour afin de soutenir les cours du brut, qui ont terminé la séance à leur plus haut niveau depuis fin septembre.

Cette réduction va porter l’effort total de limitation de la production à 1,7 million de barils par jour (mbj) pour l’ensemble du groupe de 24 pays, ont indiqué à Vienne les ministres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et leurs partenaires.

Cette alliance de producteurs pompe environ la moitié du brut mondial. Leurs représentants ont passé deux jours dans des réunions marathon au siège de l’OPEP afin de s’entendre sur les modalités d’une baisse de production fébrilement attendue par les marchés.

Les deux premiers contributeurs à ces quotas renforcés, l’Arabie saoudite et la Russie, vont supporter près de la moitié de l’effort supplémentaire, avec des coupes respectives de 167 000 et 70 000 barils par jour.

« Réduction volontaire »

A ce nouvel objectif s’ajouteront des baisses « volontaires et supplémentaires » de plusieurs producteurs, le Royaume saoudien en tête.

« Nous allons poursuivre notre réduction volontaire de 400 000 barils par jour », a affirmé le nouveau ministre saoudien de l’Énergie, Abdel Aziz ben Salmane, demi-frère du puissant prince héritier Mohammed ben Salmane.  

Par rapport aux niveaux de production d’octobre 2018, le total des baisses devrait atteindre 2,1 mbj, selon les participants à la réunion.

La nouvelle a réjoui les investisseurs sur les marchés pétroliers. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en février s’est apprécié de 1,00 dollar, ou 1,6 %, pour finir à 64,39 dollars. A New York, le baril américain de WTI pour janvier a gagné 77 cents, ou 1,3 %, pour clôturer à 59,20 dollars, terminant à leurs plus hauts niveaux depuis fin septembre.

Ce coup de fouet est bienvenu pour Riyad qui s’apprête à ouvrir le capital de sa compagnie nationale Aramco et réaliser la plus grosse introduction en Bourse de l’histoire.

Les fonds levés valorisent pour l’instant l’entreprise saoudienne à 1700 milliards de dollars, mais Abdel Aziz ben Salmane a « parié » devant la presse que celle-ci serait « supérieure à 2000 milliards de dollars ».

Évaluation en mars

L’objectif que se sont fixé les producteurs fera l’objet d’un examen d’étape lors d’une « réunion extraordinaire » début mars 2020 à Vienne.

« Nous déciderons si nous continuons (à réduire la production) jusqu’à la fin de l’année », a déclaré le ministre irakien du Pétrole Thamer al-Ghadbane lors d’une conférence de presse à l’issue de la réunion.

Évoquant « quelques difficultés » lors des discussions de la veille, il a rappelé la « volonté de chacun » de respecter « l’engagement collectif ». Les négociations avaient joué jeudi les prolongations, laissant deviner des tiraillements sur la répartition de l’effort à accomplir.

« Les luttes intestines habituelles continuent au sein de l’OPEP, les Saoudiens appelant à un respect plus strict de la cible », a commenté David Madden, analyste de Markets.com.

« L’incertitude porte désormais sur le niveau de l’offre de l’OPEP “à partir du mois d’avril », a observé Caroline Bain, analyste de Capital Economics, estimant que les coupes « devraient être prolongées jusqu’à la fin de l’année ».

Avec dix autres pays pétroliers, dont le géant russe, les 14 membres de l’OPEP ont formé une alliance il y a trois ans afin de peser face au boom du gaz de schiste américain, baptisée OPEP+.

L’Arabie saoudite, premier exportateur mondial, porte à elle seule l’essentiel de l’effort et produit déjà en dessous de son quota. Riyad s’agace du non-respect des objectifs de production par plusieurs pays, comme l’Irak, le Nigeria ou la Russie.

Le contexte économique mondial laisse peu de marge au cartel : la guerre commerciale avec les États-Unis affecte la croissance chinoise, très gourmande en pétrole, tandis que celle de l’Europe, autre zone de forte demande, reste faible.

Parallèlement, les niveaux de production des pays non membres de l’OPEP battent des records, ajoutant à une offre pléthorique : les États-Unis, premier producteur mondial depuis 2018, extraient de grandes quantités de pétrole de schiste, le Brésil et le Canada ont également augmenté leur production et d’autres, comme la Norvège, projettent de le faire.