L’économie chinoise a beaucoup ralenti et la source de ses problèmes est plus profonde que les tarifs punitifs du président américain

La Chine a annoncé ces derniers jours une volée de données confirmant que la deuxième économie mondiale se porte de plus en plus mal.

Le taux de chômage dans les villes chinoises a atteint en juillet un sommet depuis que l’État compile ces statistiques.

Et même si les exportations ont rebondi le mois dernier, les secteurs immobilier, industriel et la consommation sont nettement plus faibles que prévu.

« Le ralentissement économique est encore pire qu’en 2008 [lors de la crise financière] », affirme dans une note économique la banque australienne ANZ, qui croit que Pékin devra déballer des mesures de relance pour maintenir la croissance du PIB dans une fourchette de 6 à 6,5 %.

Il n’en fallait pas plus pour que Donald Trump s’attribue tout le mérite des ratés chinois, en soutenant que la guerre commerciale « fait très mal » et forcera Pékin à négocier un cessez-le-feu avantageux pour les États-Unis.

Nul doute que les tarifs punitifs ont un impact sur la Chine et le reste de la planète, disent les experts. Mais les problèmes de l’empire du Milieu avaient commencé bien avant que Washington ne déclenche les hostilités.

Banques mal en point

La semaine dernière, on apprenait que l’État chinois avait dû voler au secours d’au moins trois banques régionales depuis le début de l’été.

La Hengfeng Bank, au bord de la faillite, a notamment reçu une aide d’urgence de près de 6 milliards de dollars (30 milliards de yuans) du gouvernement provincial du Shandong, rapporte le groupe médiatique Caixin. D’autres défaillances bancaires suivraient, selon cette source.

Or, le Fonds monétaire international (FMI) plaide depuis longtemps que les banques chinoises, les plus petites en particulier, ont besoin d’une injection massive de capitaux après une longue période de prêts à tout-va, souvent très risqués, qui commencent à contaminer leur bilan.

Le sauvetage risqué de 2009

La dégradation du système financier a commencé en 2009, peu de temps après l’annonce par le gouvernement d’un gigantesque plan de 500 milliards US pour relancer l’économie chinoise en réaction à la crise financière qui a mis à mal toute l’économie mondiale.

Sous la pression de Pékin, les banques chinoises ont financé des milliers de projets immobiliers et industriels, souvent extravagants, coûteux et pas toujours pertinents.

Résultat : les dettes des entreprises, des gouvernements et des consommateurs – totalisant quelque 40 000 milliards US – représentaient en mars dernier trois fois la taille de l’économie chinoise (PIB), affirme l’Institut de la finance internationale (IFI) dans un récent rapport.

Aucun pays du G20 n’est plus endetté que la Chine, qui cumule 15 % de l’endettement mondial, selon l’IFI.

Craignant une implosion du système financier, Pékin a dû se raviser il y a deux ans et a imposé des restrictions au crédit bancaire, en plus d’encadrer les prêteurs de l’ombre (shadow banking) qui offrent du crédit à des emprunteurs souvent très risqués.

Le problème, c’est que ces mesures freinent une économie accro au crédit.

« Le crédit ne se rend pas aux secteurs qui en ont le plus besoin », affirme la firme Vangard Markets dans un nouveau rapport cité par le réseau CNN.

Aussi, les faillites d’entreprises en Chine ont atteint un record l’an dernier. La moitié touchait le secteur manufacturier, selon Vangard.

Un modèle à bout de souffle

Quoi qu’en dise Donald Trump, la Chine était en perte de vitesse bien avant qu’il s’installe à la Maison-Blanche.

L’économie chinoise, après une croissance record de 14,2 % en 2007, ne cesse de décélérer et progresse maintenant à un rythme annuel de 6,2 %. Un creux de 27 ans.

Voyant les limites de son modèle, Pékin a entrepris il y a cinq ans de s’éloigner d’une économie basée sur la fabrication, surtout de produits de bas de gamme, vers un modèle axé sur les technologies, les services et la consommation.

Ce faisant, le gouvernement a fermé des centaines d’usines pour réduire la surcapacité industrielle, notamment dans l’acier, le ciment et la construction navale.

Cette transformation, couplée à la réduction du crédit, a laissé des trous béants dans l’économie que les secteurs de pointe ne comblent pas.

C’est sans compter que la Chine vieillit vite, conséquence de la politique de l’enfant unique des années 60. Le quart de sa population aura plus de 65 ans en 2050.

Dans l’immédiat, la solution facile pour le gouvernement serait d’annoncer d’autres mesures de relance qui passeraient, encore, par le marché immobilier – un moteur vital de l’économie. Ce remède risque toutefois d’affaiblir davantage le patient en augmentant l’endettement des ménages et en gonflant la bulle immobilière.

Bref, les problèmes de la Chine sont profonds et complexes. Et leur correction prendra du temps.