En l’absence de superproductions hollywoodiennes cette année, le Québec se tourne davantage vers le tournage de séries télé étrangères. Et il discute actuellement avec Netflix pour que le géant américain ouvre un centre de tournage permanent à Montréal.

« Ça fait des années qu’on fait des efforts pour attirer, en plus des films, des séries télé. Montréal est en train de devenir un endroit où la série télé internationale commence à avoir pignon sur rue. Comme l’avenir est là, c’est une bonne nouvelle », dit Pierre Moreau, PDG du Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ), l’organisme responsable d’attirer les tournages étrangers au Québec.

Si le Québec s’intéresse à la série télé internationale, difficile de ne pas penser à Netflix. Le BCTQ discute avec Netflix d’un centre de tournage permanent à Montréal, comme l’entreprise américaine vient d’en ouvrir un à Toronto.

On est une option sérieuse. On discute avec eux pour avoir le même genre d’arrangement qu’à Toronto. Netflix s’est donné des bases de production partout en Amérique du Nord. On discute [à savoir si] on pourrait être l’une de ces bases.

Pierre Moreau, PDG du Bureau du cinéma et de la télévision du Québec

À Toronto, Netflix loue de façon permanente des espaces de tournage d’environ 250 000 pi2 dans deux studios existants. L'entreprise y tourne notamment la série d’horreur Ten After Midnight de Guillermo del Toro. Netflix estime créer jusqu’à 1850 emplois par année avec son centre de production torontois. Au Canada, Netflix a aussi un centre de production permanent en Colombie-Britannique. L’entreprise tourne aussi de façon ponctuelle ailleurs au pays et a ainsi tourné deux fois au Québec.

Jointe par La Presse, Netflix ne s’est pas prononcée sur la création d’un éventuel centre de production à Montréal.

Une demi-douzaine de séries télé étrangères

Même sans films de la catégorie des superproductions (soit plus de 100 millions en dépenses) comme X-Men, cette année, les dépenses en tournages étrangers au Québec, films et séries télé confondus, devraient se chiffrer aux environs de 340 millions de dollars en 2019, estime le BCTQ. L’an dernier, le Québec a récolté 378 millions en dépenses de tournages étrangers. Le record ? 399 millions en 2002-2003.

Pour accueillir ces tournages étrangers, le gouvernement du Québec leur accorde un crédit d’impôt remboursable d’environ 20 % des dépenses. Sur des dépenses de tournages prévues d’environ 340 millions en 2019, il en coûterait donc environ 68 millions en crédits d’impôt québécois.

En 2019, le Québec devrait accueillir le tournage de cinq ou six séries télé d’envergure, certaines avec un budget d’environ 30 à 35 millions par série. L’an dernier, la province avait accueilli trois séries télé.

Plusieurs films à budget moyen (de 20 à 35 millions) avec des vedettes comme Margot Robbie, Kevin Hart, Samuel L. Jackson et Neil Patrick Harris seront aussi tournés à Montréal cette année.

Crédit d’impôt régional demandé

L’année 2019 est spéciale pour la ville de Québec, qui accueille un premier tournage étranger depuis des lustres. Les cinéphiles avertis se rappellent qu’au début des années 2000, l’équipe du film Catch Me If You Can, avec Leonardo DiCaprio et Tom Hanks, a tourné quelques scènes à Québec. Cette fois-ci, le tournage de la série télé Barkskins, qui a commencé en juin, durera cinq mois à Québec. La série historique produite par Fox sera tournée entièrement à Québec et dans les environs.

Le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ) espère qu’il aura un effet d’entraînement pour la ville de Québec. « Il est question d’une saison 2, dit Pierre Moreau. Les gens [producteurs] débarquent à Québec et ils voient une vieille ville fortifiée en Amérique du Nord qui est incroyable d’un point de vue architectural. »

À moyen terme, le BCTQ aimerait pouvoir attirer davantage de tournages dans les régions du Québec. Un film ou une série télé pourrait être tourné en grande majorité à Montréal tout en tournant plusieurs jours en région.

Le BCTQ demande toutefois au gouvernement du Québec de revoir son crédit d’impôt régional de tournage, accessible aux producteurs québécois, mais pas aux producteurs étrangers.

C’est une erreur historique qui est là depuis longtemps. Ça a été fait de bonne foi à l’époque, mais ça n’a pas de bon sens.

Pierre Moreau

Le BCTQ suggère un crédit additionnel de 10 % en région (en plus du crédit québécois de 20 %), comme c’est le cas en Ontario.

Avec un crédit d’impôt régional remanié, le BCTQ pourrait convaincre plus facilement les producteurs étrangers de partir en région pour une partie du tournage. Pendant leur absence, d’autres films ou séries télé pourraient prendre leur place à Montréal ou à Québec. Bref, ça permettrait de hausser la capacité d’accueil de tournages étrangers, selon le BCTQ. 

« Tout le monde gagne : le producteur débarque à Montréal, il tourne, il fait le plein d’équipement et il peut aussi partir en région. C’est un peu ce que les Ontariens ont fait. Toronto reste un grand centre de production, mais ils ont développé aussi London et Sudbury », dit Pierre Moreau.