(Pékin) Simple répit ou tendance durable ? Au moment où elle se retrouve embourbée dans une guerre commerciale avec l’administration Trump, la Chine a dévoilé lundi des chiffres pour son commerce extérieur au mois de mai bien plus solides que prévu.

De façon inattendue, les exportations de la Chine sont reparties à la hausse sur un an le mois dernier (1,1 %) en dépit de nouvelles surtaxes douanières frappant les produits chinois exportés vers les États-Unis.

Des experts interrogés par l’agence Bloomberg s’attendaient à une nouvelle dégringolade des exportations en mai (-3,9 %) après celle du mois d’avril (-2,7 %).

Le président américain Donald Trump, qui ne cesse de dénoncer l’excédent de la Chine vis-à-vis de son pays, a imposé l’an dernier des droits de douane punitifs sur de nombreux produits chinois.  

Dans un contexte de durcissement des tensions commerciales avec Pékin, Washington a décidé en mai de porter ces droits de douane de 10 à 25 % sur 200 milliards de biens chinois.

La Chine a riposté en imposant le 1er juin de nouvelles surtaxes douanières sur plus de 5000 produits américains.

Dans ce contexte, le rebond en mai des exportations chinoises – un des piliers de l’économie du géant asiatique – est à nuancer estime dans une note l’analyste Marcel Thieliant, du cabinet Capital Economics.

« L’affaiblissement de la demande mondiale et l’escalade de la guerre commerciale donnent à penser que (les exportations) recommenceront à baisser d’ici peu » après le premier recul observé en avril, selon lui.  

Chute des importations

D’autant que le président américain Donald Trump menace à présent de surtaxer la quasi-totalité des importations venues de Chine.

Dans un signe apparent d’apaisement, il n’a cependant pas exclu de rencontrer son homologue chinois Xi Jinping lors du prochain sommet du G20, réunissant les principales puissances économiques mondiales les 28 et 29 juin au Japon.

Le rebond des acheminements de ventes à l’étranger en mai est principalement lié à « un phénomène d’anticipation » des entreprises chinoises qui ont massivement exporté vers les États-Unis avant l’entrée en vigueur de nouvelles surtaxes sur les produits chinois, juge l’économiste Ting Lu de la banque Nomura.

Ce climat d’incertitude et de tensions fragilise en tout cas la demande intérieure en Chine. Les importations ont plongé en mai : -8,5 % (contre +4 % en avril).

La semaine dernière, le Fonds monétaire international (FMI) a averti des conséquences néfastes de la guerre commerciale sur l’économie et légèrement abaissé sa prévision de croissance pour la Chine cette année (de 6,3 % à 6,2 %).

Dans sa risposte face à Washington, Pékin a visé les agriculteurs américains, très dépendants du marché chinois et qui constituent une importante base électorale pour Donald Trump.  

L’arme des terres rares

Très symboliquement, les importations de soja se sont effondrées en mai (-24 % sur un an).

L’affrontement commercial se double d’un conflit technologique. Washington a placé le mois dernier le géant chinois des télécoms, Huawei, soupçonné d’espionnage, sur une liste noire des entreprises auxquelles il est interdit de céder de la technologie américaine.

Le coup est considéré comme très sévère pour Huawei, qui a besoin des puces électroniques américaines et qui compte sur des applications comme celles de Google pour équiper ses téléphones portables.

Pékin a répliqué en annonçant la création d’une « liste noire » d’entreprises étrangères « non fiables ».

Et le gouvernement chinois a aussi laissé entendre qu’il pourrait bloquer ses exportations de « terres rares », des métaux dont l’industrie américaine a besoin dans de nombreux secteurs de pointe.

En mai 2019, les exportations chinoises de terres rares ont reculé de 16 % par rapport au mois précédent.

« On ne peut pas exclure » qu’il s’agisse d’une mesure de rétorsion, souligne Betty Wang, du cabinet ANZ.