(Paris) Guerre commerciale, Brexit, ralentissement chinois et endettement privé qui se dégrade : les risques s’accumulent pour l’économie mondiale au point que l’OCDE s’attend désormais à la croissance la plus faible depuis la crise financière de 2008-2009 et appelle les États à réagir.  

La croissance mondiale devrait passer cette année sous la barre des 3 % pour chuter à 2,9 %, soit 0,3 point de moins que lors des dernières prévisions de mai, et devrait rester pratiquement stable à 3 % en 2020 (-0,4), a estimé l’institution basée à Paris dans ses prévisions actualisées publiées jeudi.

L’Organisation pour la Coopération et le développement économiques (OCDE), qui revoit ses chiffres quatre fois par an, s’attend désormais à la croissance mondiale « la plus faible depuis la crise financière » lorsqu’elle avait reculé à 2,9 % en 2008 avant de plonger à-0,5 % l’année suivante.

Aux yeux de l’OCDE, qui n’a pas pu prendre en compte dans ses calculs la récente attaque contre des installations pétrolières saoudiennes, la situation actuelle au Moyen-Orient constitue néanmoins une incertitude de plus sur une liste déjà longue.

« Les tensions commerciales et politiques alimentent les risques de faible croissance prolongée », a-t-elle estimé, redoutant la montée des représailles dans la guerre commerciale que se livrent les États-Unis et la Chine et un Brexit sans accord qui « porterait un coup à une économie britannique déjà fragile et aurait des effets perturbateurs en Europe ».

L’institution craint aussi « l’ampleur de la dette privée, dont la qualité se dégrade (et qui) pourrait amplifier les effets de chocs éventuels ».  

Relance budgétaire ?

Face à cette situation, l’OCDE appelle une nouvelle fois, sans citer de noms, les États à « mettre fin à l’envolée des droits de douane et des subventions qui faussent les échanges » et à « rétablir des règles prévisibles pour les entreprises ».

L’OCDE recommande aussi aux gouvernements de « limiter la dépendance à l’égard d’une politique monétaire sollicitée à l’excès », à un moment où les banques centrales européenne et américaine ont renoué avec une politique de soutien à l’économie.

Aux États maintenant « d’engager des investissements publics » pour « sortir du piège d’une croissance faible persistante », estime l’OCDE, un énième appel du pied aux pays disposant de marge budgétaire, comme l’Allemagne.  

La première économie européenne a connu l’une des corrections les plus sévères de la part de l’OCDE, qui n’attend qu’une croissance de 0,5 % cette année (-0,2 point) et à peine mieux l’an prochain à 0,6 %, moitié moins que prévu lors des dernières prévisions en mai.

Si l’Italie ne devrait pas croître en 2019 et rebondir légèrement l’an prochain 0,4 % en 2020 (-0,2 point par rapport à la prévision de mai), la France devrait faire mieux que ses deux principaux partenaires de la zone euro avec une croissance de 1,3 % en 2019 (sans changement) et 1,2 % en 2020 (-0,1).

L’économie britannique, en pleine incertitude sur le Brexit, ne devrait croître qu’au rythme de 1 % (-0,2 point par rapport à la dernière prévision) cette année et se replier à 0,9 % l’an prochain (-0,1).  

Les États-Unis, qui connaissent l’un des cycles de croissance le plus long de leur histoire, devraient ralentir à 2,4 % cette année (-0,4 point par rapport à la prévision de mai) pour ensuite se replier à 2 % en 2020 (-0,3 point).

Quant à la Chine, attendue par l’OCDE à 6,1 % cette année (-0,1 point), elle devrait encore reculer et passer sous la barre symbolique des 6 % l’an prochain à 5,7 %.

Dans ce contexte morose, l’institution a surtout taillé dans ses prévisions pour les pays émergents, en sabrant notamment celle pour l’Inde de 1,3 point à 5,9 % cette année et de 1,1 point celle pour 2020 à 6,3 %.

La situation la plus critique est celle de l’Argentine, en plein tumulte économique et financier, qui devrait connaître cette année une situation aggravée, avec une récession de 2,7 %, puis un nouveau recul de 1,8 % de son PIB l’an prochain.