(Zurich) Jerome Powell, le patron de la Banque centrale américaine (Fed), a indiqué vendredi, à moins de deux semaines d’une réunion monétaire, que la Fed était prête à soutenir la croissance américaine même s’il ne prévoit pas de récession à court terme.

L’économie américaine « se porte bien », a déclaré M. Powell, invité à participer à une table ronde à l’université de Zurich par son homologue de la Banque centrale suisse, Thomas Jordan.

Il a signalé les bons chiffres de l’emploi publiés vendredi, qui montrent un taux de chômage américain toujours très faible, à 3,7 % en août, proche « du plus bas niveau depuis un demi-siècle ».

Mais face aux nombreux risques qui pèsent sur l’évolution de l’économie, notamment le ralentissement à l’international, la faiblesse de l’inflation et les tensions commerciales, la Fed continuera « d’utiliser tous les outils à sa disposition pour soutenir la croissance », a-t-il promis.

Aux États-Unis, les acteurs sur les marchés financiers s’attendent, quasi à l’unanimité, à une nouvelle légère baisse des taux d’intérêt au jour le jour (-0,25 %) lors de la réunion monétaire prévue le 18 septembre. Ces taux se situent actuellement entre 2 % et 2,25 %.

Même s’il s’est gardé d’indiquer clairement les intentions du Comité monétaire, M. Powell n’a pas fait de déclaration susceptible de doucher les attentes des investisseurs en matière de baisse des taux.

À Wall Street, le Dow Jones, qui avait ouvert dans le vert, a continué de progresser modérément durant l’intervention du patron de la puissante banque centrale.

Évoquant les tensions commerciales, M. Powell a estimé qu’elles retardaient les investissements des entreprises.

La guerre commerciale entre Washington et Pékin a redoublé d’intensité avec l’entrée en vigueur de droits de douane renforcés par vagues successives, dont la dernière le 1er septembre.

D’ici la fin de l’année, Donald Trump compte surtaxer la quasi-totalité des importations en provenance de Chine (quelque 540 milliards de dollars sur la base des importations 2018).

Pour autant, M. Powell, cible continuelle des attaques de Donald Trump qui veut des taux plus bas pour l’aider dans son bras de fer commercial, s’est abstenu de commenter plus avant la politique commerciale du président républicain.

Il a relevé aussi que la faible inflation était un obstacle. « Nous ne voulons pas aller sur cette voie » d’une inflation trop basse, a-t-il ajouté, promettant que la Fed « défendrait » son objectif de 2 % d’inflation.

M. Powell a également rappelé que les outils utilisés pendant la crise tels que le Quantitative Easing (QE), consistant à injecter des liquidités dans le système financier, avaient montré leur efficacité, tout en soulignant la nécessité de trouver « d’autres outils ».

« Totalement apolitique »

Interrogé sur les critiques de Donald Trump vis-à-vis de la Banque centrale, M. Powell a assuré avec humour, devant une audience toute acquise, qu’il n’avait « aucun regret » d’être dans le service public et que la Fed était « engagée à agir de façon totalement apolitique ».

Quelques heures plus tôt, l’hôte de la Maison-Blanche, qui fait pression pour abaisser drastiquement les taux, avait tweeté sur un ton méprisant : « mais où ai-je déniché ce type, Jerome ? ».

Mais pour M. Powell, la Fed reste « un endroit formidable, avec une éthique forte et un moral d’acier ».

La campagne pour l’élection présidentielle américaine de 2020 « n’est absolument pas » sur le radar de la Fed, a-t-il encore martelé, alors qu’il était interrogé indirectement sur la position d’un ancien dirigeant de la Fed de New York, Bill Dudley, qui a récemment plaidé, dans une tribune au Wall Street Journal, pour que l’institution ne facilite pas la réélection de Donald Trump via sa politique monétaire.

« Nous ne tolérons aucune ingérence politique. […] Ce n’est pas la bonne manière de faire », a déclaré M. Powell, qui s’est vu offrir en fin de conférence par ses hôtes helvétiques une ceinture traditionnelle de cuir cloutée de silhouettes de vaches suisses.