(Washington) Le président américain, Donald Trump, en campagne pour sa réélection, a de nouveau mis la pression maximale sur la Banque centrale américaine (Fed) mercredi alors que les négociations commerciales avec Pékin piétinent et que les marchés financiers vacillent.

M. Trump a réitéré mercredi dans une longue série de tweets ses diatribes contre la Fed, exigeant qu’elle réduise les taux « plus vite et plus fort » et la traitant d’« incompétente ».

« Ils doivent baisser les taux plus vite et plus fort […] L’incompétence, c’est terrible à voir, surtout quand vous savez que tout pourrait être réglé facilement », a écrit le président.

Il a fait aussi référence à la baisse des taux par trois banques centrales mercredi (Inde, Nouvelle-Zélande et Thaïlande), ce qui a entraîné une chute des rendements obligataires.  

« Notre problème n’est pas la Chine […] C’est la Réserve fédérale qui est trop fière pour admettre avoir fait une bêtise en relevant les taux trop vite et trop haut. (J’avais raison !) », clame encore le président.

En pleine guerre commerciale sino-américaine, qui a vu la monnaie chinoise se déprécier fortement, et après la baisse des taux la semaine dernière par la Fed, trois banques centrales sensibles au marché asiatique ont pris les investisseurs de court en baissant à leur tour leurs taux mercredi.

La Banque centrale de Nouvelle-Zélande a réduit son taux d’intérêt principal à 1 %, un plus bas historique. La Banque centrale indienne a abaissé son principal taux directeur de 35 points de base, à 5,4 %, tandis que la Thaïlande a diminué le sien de 0,25 point, à 1,50 %.

Depuis un an, Donald Trump ne cesse de critiquer la Fed. Malgré le geste d’assouplissement monétaire intervenu le 31 juillet, quand la Fed a baissé les taux d’un quart de point de pourcentage, l’hôte de la Maison-Blanche a redoublé ses pressions vu les difficultés dans les négociations commerciales avec la Chine.

Les discussions entre Washington et Pékin avaient repris à Shanghaï la semaine dernière après un long hiatus depuis le printemps, Donald Trump ayant jugé que la partie chinoise revenait sur ses promesses après plusieurs mois de négociations.

Mais les tensions se sont ravivées quand Donald Trump, mécontent du manque d’avancée des discussions, a promis, à partir du 1er septembre, d’infliger 10 % de tarifs douaniers supplémentaires sur 300 milliards de dollars d’importations de produits chinois.

Dans la foulée, Pékin a laissé glisser le yuan lundi en dessous de la barre des 7 yuans pour un dollar, pour la première fois en une décennie, et, surtout, fait savoir qu’il n’achèterait pas de produits agricoles américains comme il l’avait promis.

Manipulation de devise ?

Sous les ordres de Donald Trump, le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a répliqué en accusant officiellement Pékin de manipuler sa monnaie et d’être intervenu sur le marché des changes pour la faire baisser, une façon de contrecarrer les tarifs douaniers qui renchérissent les prix des biens chinois.

Cette accusation formelle est la première depuis 25 ans, mais certains économistes doutent des critères de manipulation brandis par Donald Trump.

« La baisse du yuan lundi n’était pas artificielle […] c’est la réponse naturelle du marché aux nouveaux tarifs douaniers américains », a déclaré Larry Summers, ancien secrétaire au Trésor, dans une tribune au Washington Post mercredi. « Il n’y a pas de manipulation avérée », a-t-il affirmé.

Mercredi à New York, Wall Street s’affichait dans le rouge, semblant sur la voie de sa pire semaine de l’année. L’indice Dow Jones a perdu jusqu’à près de 600 points en cours de séance matinale, avant de réduire ses pertes.

Les investisseurs étaient surtout troublés par la chute des taux sur le marché obligataire.

Le rendement à 10 ans sur la dette américaine est brièvement passé sous le seuil de 1,6 %, un plus bas en trois ans. Craignant un ralentissement économique, les investisseurs se sont précipités sur les obligations, un actif considéré comme plus sûr, faisant monter leurs prix et donc baisser leurs taux.

De son côté, la Banque centrale américaine, dont la prochaine réunion monétaire n’est pas attendue avant le 18 septembre, n’a ni exclu ni promis de baisse des taux immédiate. La Fed s’est dite prête à continuer à soutenir l’expansion et les acteurs sur les marchés financiers misent sur encore au moins deux baisses d’un quart de point d’ici la fin de l’année.

Un haut responsable du Comité monétaire, James Bullard, président de la Fed de Saint Louis (Missouri), a, quant à lui, estimé mardi dans un entretien à l’AFP que la Fed avait déjà « fait beaucoup » pour compenser l’impact des incertitudes commerciales.