(Londres) La Banque d’Angleterre (BoE) a mis en avant jeudi des craintes accrues d’un Brexit sans accord au Royaume-Uni au moment où l’activité économique stagne, ce qui l’a poussée à maintenir ses taux.

« La probabilité d’un Brexit sans accord a augmenté » dans l’esprit des acteurs économiques, ont jugé les membres du Comité de politique monétaire (MPC) de la BoE, selon le compte-rendu de leur réunion publié jeudi.

L’institution a opté à l’unanimité pour un maintien du taux directeur à 0,75 % et la poursuite du programme de rachat d’actifs.

Après une solide croissance au premier trimestre (+0,5 %), la BoE s’attend dorénavant à une croissance nulle au deuxième trimestre, alors qu’elle tablait encore sur +0,2 % en mai.

Cette prévision rejoint plusieurs indicateurs récents qui témoignent d’un essoufflement de l’activité depuis avril.

Les membres du MPC estiment que « la constitution de stocks de certaines entreprises au Royaume-Uni et dans l’Union européenne en amont de la date limite concernant le Brexit ont […] dopé la croissance du premier trimestre ». Un effet temporaire qui devrait entraîner une croissance moindre dans le futur, le temps d’écouler les stocks constitués.

« Les données économiques moroses ont joué un rôle dans le revirement plus prudent du MPC, mais il y a aussi des signes que le Comité s’inquiète de plus en plus de la possibilité d’un Brexit sans accord », a souligné Thomas Pugh, analyste pour Capital Economics.

Initialement prévu le 29 mars, le Brexit a été repoussé du fait de l’impasse politique sur ce sujet au Royaume-Uni. Il est prévu désormais pour le 31 octobre.

Trois quarts des entreprises britanniques jugent que le report du Brexit ne change rien à l’incertitude, d’après une enquête de la BoE. « Environ un dixième des répondants a jugé que l’incertitude avait augmenté, surpassant la part de ceux qui pensent que l’incertitude a diminué », ont souligné les responsables de la Banque.

Depuis la précédente réunion, le contexte politique a radicalement changé. Theresa May a démissionné de son poste de premier ministre, ouvrant peut-être la voie à Boris Johnson, un fervent supporter de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, ce qui ravive le spectre d’un Brexit sans accord.

Tensions commerciales

La BoE s’est également inquiétée des tensions commerciales croissantes. Evoquant l’augmentation des taxes américaines sur les produits chinois importés, la menace de droits de douane croissants à l’encontre du Mexique et le délai de 180 jours accordé à l’Union européenne avant la mise en place de taxes sur les véhicules, le MPC a jugé que « les conséquences indirectes, sur la situation financière et sur la confiance, pouvaient être importantes pour l’offre aussi bien que pour la demande ».

Le ton adopté contraste avec celui de la réunion de mai, lorsque les responsables de la BoE avaient relevé leurs prévisions de croissance pour 2019 et 2020, prenant acte de la bonne santé de l’économie du Royaume-Uni et de la résilience de l’économie mondiale.

L’institution avait alors relevé de 0,3 point sa prévision de croissance pour 2019, à 1,5 %, et de 0,1 point sa prévision pour 2020, à 1,6 %.

« Les signes de stabilisation de la croissance mondiale, que le Comité avait notés lors de sa précédente réunion, sont apparus un peu moins clairs ces dernières semaines », ont commenté les responsables.

La BoE est certes moins optimiste, mais continue de vouloir remonter à terme progressivement et en douceur ses taux, pour peu que ses prévisions économiques se confirment et que le pays opte pour un Brexit doux.

Cette position tranche avec le discours de la Réserve fédérale américaine (Fed) et de la Banque centrale européenne (BoE), qui se tiennent prêtes à de nouvelles mesures de soutien face au ralentissement économique.

Vers 8h45, la livre sterling restait en hausse face au dollar, mais effaçait une partie de ses gains accumulés en début de séance. Elle baissait face à l’euro.