L’annonce mercredi par Ottawa de la construction de 18 nouveaux bateaux pour la Garde côtière canadienne ne suffit pas à rassurer la Société de développement économique du Saint-Laurent (SODES), échaudée par la fermeture pendant quatre jours de la circulation sur le fleuve l’hiver dernier.

Le gouvernement canadien consacrera 15,7 milliards de dollars à l’achat de ces nouveaux navires, mais n’a pas fourni beaucoup de précisions sur la nature de ces bateaux.

Deux d’entre eux, construits à Halifax, seront des patrouilleurs. Les 16 autres, pour l’instant affectés au chantier naval Seaspan de Vancouver, seront des « navires polyvalents devant servir à diverses missions, dont les services de brise-glace léger, d’intervention environnementale et de recherche et sauvetage en haute mer », affirme un communiqué de presse.

« Il n’y a pas d’énoncé clair pour des brise-glaces lourds, ceux dont on a besoin dans le Saguenay et le Saint-Laurent. Et ma plus grande crainte, c’est qu’il n’y a pas d’échéancier. » — Nicole Trépanier, présidente-directrice générale de la Société de développement économique du Saint-Laurent

Le député conservateur de la circonscription qui abrite le chantier naval Davie de Lévis, Steven Blaney, a dénoncé hier « l’improvisation pathétique des libéraux dans un dossier d’une aussi grande importance économique ».

Selon le porte-parole du ministre Jean-Yves Duclos, qui a participé à cette annonce mercredi, c’est en fait l’entièreté des 120 navires de la garde côtière qui seront éventuellement renouvelés. Les 18 navires annoncés ne constitueraient donc qu’une première vague. Il a toutefois refusé de préciser de quels types de navires il s’agit ou quand surviendrait une autre annonce.

Déjà du retard

Les deux chantiers choisis par Ottawa accusent déjà d’importants retards sur des contrats précédents donnés par Ottawa. Même si la nouvelle commande lancée avant-hier par Ottawa devait contenir des brise-glaces lourds, il faudra assurément patienter de nombreuses années avant de les voir patrouiller dans les eaux canadiennes.

L’annonce par Ottawa de l’ajout imminent d’un troisième chantier à la Stratégie nationale de construction navale, vraisemblablement le chantier Davie à Québec, pourrait accélérer les choses, d’autant que l’entreprise dit disposer de toutes les capacités nécessaires pour la construction de gros brise-glaces. Elle ne suffit toutefois pas à apaiser Mme Trépanier.

« C’est sûr qu’en théorie, ça va plus vite à trois. Mais il y a du flou de ce côté-là aussi. Si c’est Davie, bravo, mais on se pose toujours la question à savoir quand on aura des navires avec une force suffisante et en quantité suffisante pour assurer la fluidité du commerce à l’année. »

La SODES avait maintes fois dénoncé, avant l’embâcle de l’hiver dernier, le manque de brise-glaces à la disposition de la garde côtière et leur vétusté. Les craintes qu’elle exprimait se sont matérialisées à la fin janvier, quand le Saint-Laurent a dû être fermé pendant quatre jours.

Les brise-glaces « légers » auxquels fait référence le communiqué diffusé par Ottawa mercredi ne suffiront pas, prévient Mme Trépanier.

« Ça peut servir à déglacer l’accès à certains ports ou les piliers des ponts, mais ce ne sont pas eux qui vont ouvrir le Saguenay. »

Surtout, l’organisme se méfie de ce qui pourrait survenir au lendemain des élections qui auront lieu à l’automne.

« On a déjà souvent vu que l’arrivée d’un nouveau gouvernement fait en sorte qu’on rejette du revers de la main ce que le précédent a fait par rapport à la garde côtière. »