Connue depuis 2011 pour ses bacs dans lesquels on peut jeter ses vieux appareils électroniques, la PME montréalaise Électrobac a découvert en cours de route une aberration : bien des entreprises se débarrassent sans le savoir de téléphones qui contiennent encore des informations sensibles.

Aujourd'hui, les activités de l'entreprise fondée par Philip Bénard sont partagées en parts égales entre les fameux bacs et les services aux entreprises.

Ces entreprises, explique le jeune PDG, font affaire avec des firmes spécialisées pour se débarrasser des téléphones obsolètes de leurs employés. Ces firmes, qui seraient une vingtaine au Canada, assurent à leurs clients que les données contenues dans les téléphones sont effacées de façon sécuritaire. Les appareils sont ensuite revendus.

« C'EST UN PROBLÈME D'INDUSTRIE »

Pour en avoir le coeur net, Électrobac a acheté 25 de ces téléphones soi-disant « nettoyés ». Presque tous contenaient encore des informations qui auraient dû être effacées, dit M. Bénard. 

« On a le téléphone d'un haut responsable d'une compagnie canadienne d'informatique : on y trouve des SMS et des courriels encore lisibles. Ce téléphone-là, c'est une bombe », poursuit-il.

Comptes Facebook encore accessibles, registres téléphoniques, documents lisibles : peu importe la marque des appareils, que ce soient des iPhone, des Samsung ou des BlackBerry, il a été plutôt facile pour les techniciens d'Électrobac d'y trouver des données encore utilisables.

Et pourtant, ces téléphones avaient bel et bien été réinitialisés aux paramètres d'usine. Bien des enquêtes ont démontré que ce n'était pas suffisant.

« Ce n'est pas la faute des entreprises clientes ; en théorie, elles n'ont pas à se préoccuper de ça puisqu'on leur garantit que les téléphones seront effacés, dit M. Bénard. On ne veut pas pointer du doigt une entreprise en particulier, c'est un problème d'industrie. »

44 TÉLÉPHONES, 1 VOITURE

La stratégie d'Électrobac : recourir au meilleur logiciel disponible, Blancco, que des institutions financières et des entités gouvernementales utilisent, et être dûment certifiée par le Bureau de la qualification des recycleurs et l'Association pour le recyclage des produits électroniques. La disposition des téléphones d'entreprise est entourée de mesures de sécurité quasi militaires, effectuées dans une pièce surveillée où les employés ne peuvent apporter leur propre téléphone. Un autre employé teste ensuite les téléphones « nettoyés ».

S'ils sont encore utilisables, les téléphones sont reconditionnés et revendus. Sinon, ils sont envoyés à des recycleurs certifiés. Philip Bénard est particulièrement fier de l'effet environnemental de son entreprise. « Reconditionner 44 téléphones, c'est l'équivalent du retrait d'une voiture au Québec pendant un an, dit-il. Malheureusement, encore beaucoup d'appareils électroniques se retrouvent aujourd'hui aux poubelles. »

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ÉLECTROBAC, C'EST...

• 12 employés

• 16 types d'appareils électroniques récupérés

• 230 bacs au Québec

• « Quelques milliers » d'appareils traités par mois