Les créations d'emplois aux États-Unis se sont essoufflées en mai à la surprise des analystes tandis que le taux de chômage est tombé au plus bas depuis 17 ans, mais pas forcément pour les bonnes raisons.

L'économie américaine a créé 138 000 emplois en mai contre 174 000 le mois d'avant, selon le ministère du Travail vendredi. C'est plus faible que ce qu'espéraient les analystes qui misaient sur 185 000 nouvelles embauches.

Malgré ce tassement, le taux de chômage a continué à reculer, perdant un dixième de point pour tomber à 4,3%, son plus faible niveau depuis mai 2001. Actuellement, et au vu de l'évolution de la population active, il suffit d'une centaine de milliers d'emplois nouveaux par mois pour parvenir à faire baisser le taux de chômage.

L'économie américaine reste donc encore dynamique et, comme le relève Nariman Behravesh, économiste pour IHS Markit, il est peut-être un peu tôt pour parler de «passage à vide» après bientôt deux trimestres dans l'ère Trump.

La publication de ces chiffres intervient à dix jours d'une réunion monétaire de la Réserve fédérale (Fed) qui, selon les acteurs financiers, est dans les starting-blocks pour resserrer les taux à nouveau d'un quart de point.

«Nous ne pensons pas que ce rapport sur l'emploi va altérer la trajectoire de la Fed à court terme», ont réagi vendredi les analystes de la banque Barclays. Il se peut même que la banque centrale voit d'un bon oeil cet essoufflement des embauches qui permet d'éviter la surchauffe alors que l'économie frôle le plein emploi, ajoutent ces analystes.

En tout cas, malgré un marché du travail de plus en plus étroit où les entreprises se plaignent d'avoir du mal à pourvoir des postes qualifiés, les rémunérations - ajustées de l'inflation - stagnent. Sur un an, le salaire horaire est en hausse de 2,5%, à peine de quoi compenser l'inflation qui est de 2,2%, selon le CPI.

Rendez-vous avec la Fed

Plusieurs détails dans ces chiffres de l'emploi pourraient en outre faire réfléchir la Fed à deux fois avant de resserrer le coût du crédit le 14 juin.

La banque centrale prévoit normalement de relever les taux encore deux fois cette année, après une première hausse d'un quart de point de pourcentage en mars dernier.

Au rang des nouvelles mitigées, le ministère du Travail a drastiquement revu à la baisse les créations d'emplois de mars et d'avril (-66 000).

Autre mauvais signe pour l'économie, le taux de participation à l'emploi - qui compte ceux qui ont un emploi ou en cherchent un activement - a décliné, aidant mathématiquement à faire baisser le taux de chômage.

Dans son Livre beige, dernier rapport de conjoncture publié mercredi, la Fed avait notamment relevé que l'optimisme des entrepreneurs «se dégradait un peu». Porté par les promesses de Donald Trump de réduire les taxes des entreprises et de déréguler l'environnement des affaires, le moral des entreprises qui était au beau fixe après son élection commence à être ébranlé par «les incertitudes» liées au sort de ces mesures qui n'ont toujours pas passé le cap du Congrès.

La Maison-Blanche n'avait pas réagi vendredi matin à ces chiffres de l'emploi.

En mai, les secteurs qui ont embauché le plus ont été ceux de la santé et de l'extraction minière, un secteur soutenu par les mesures de l'administration Trump, qui vient de retirer les États-Unis de l'accord de Paris sur le climat destiné à limiter l'émission de gaz à effets de serre, notamment par la combustion d'hydrocarbures.

Le secteur public a détruit des emplois (9000) de même que le commerce de détail pour le troisième mois consécutif, à la lutte avec la concurrence de la vente par internet. L'emploi manufacturier est retombé dans le rouge après deux mois de redressement, affecté par une diminution des emplois dans le secteur automobile.