SNC-Lavalin pourrait réaliser sa plus importante acquisition - et sa première en près de trois ans - alors qu'elle propose d'acquérir la firme britannique WS Atkins pour 2,1 milliards de livres sterling, ou 3,52 milliards, ce qui lui permettrait d'effectuer une percée en Europe.

C'est la firme britannique spécialisée dans l'ingénierie et la gestion d'importants projets d'infrastructures qui a d'abord confirmé qu'il y avait des discussions, lundi, en début de journée, ce qui a incité la multinationale québécoise à faire de même en après-midi.

«Le conseil d'administration d'Atkins a indiqué à SNC-Lavalin qu'une éventuelle offre procurerait de la valeur pour les actionnaires à un niveau auquel le conseil serait prêt à la recommander, à condition que les deux entreprises s'entendent sur ses détails», fait valoir le conseil d'Atkins, par voie de communiqué.

Dans le cadre de l'offre, SNC-Lavalin propose 20,8 livres sterling, ou 34,80 $, en espèces pour chaque action d'Atkins. À la Bourse de Londres, le titre de la firme britannique a terminé la séance à 19,50 livres sterling, en hausse de 27 %.

Il n'y a néanmoins aucune certitude qu'une offre ferme soit déposée, ont précisé les deux sociétés. Sur le parquet torontois, les transactions sur le titre de SNC-Lavalin ont temporairement été suspendues après le communiqué diffusé par Atkins.

Advenant la conclusion d'une transaction, un montant de 1,9 milliard serait financé par l'entremise d'une injection de capitaux de 400 millions en provenance de la Caisse de dépôt et placement du Québec ainsi que par un prêt de 1,5 milliard garanti notamment par les flux de trésorerie de la participation de SNC-Lavalin dans l'autoroute 407 à Toronto.

La multinationale envisage aussi d'autres options de financement pour compléter le montage financier. Le mois dernier, elle avait déposé un prospectus simplifié auprès des autorités réglementaires afin de pouvoir émettre l'équivalent de 1,5 milliard de titres de créance, d'actions ordinaires et privilégiées, de reçus de souscription ainsi que de bons de souscription.

En vertu des règles britanniques, SNC-Lavalin a jusqu'au 1er mai pour confirmer si elle dépose ou non une offre formelle auprès d'Atkins.

Grossir en Europe

La dernière prise majeure de SNC-Lavalin remonte à 2014, lorsqu'elle avait mis la main sur la firme londonienne Kentz spécialisée dans les secteurs pétrolier et gazier, pour 2,1 milliards. Au cours des derniers mois, son président et chef de la direction, Neil Bruce, avait clairement indiqué être en bonne posture pour procéder à une acquisition, sans toutefois s'avancer sur un montant précis.

Atkins, qui compte quelque 18 000 employés, permettrait à SNC-Lavalin d'accroître sa présence de façon significative en Europe, une région qui n'a représenté que 5,3 % de son chiffre d'affaires l'an dernier. Le Vieux-Continent représente près de la moitié des revenus d'Atkins - également présente en Amérique du Nord, au Moyen-Orient ainsi qu'en Asie. La firme britannique a généré en 2016 un bénéfice avant impôt de 219 millions sur un chiffre d'affaires de 3,1 milliards.

«Cette offre a été télégraphiée par la direction de SNC-Lavalin, a écrit Yuri Link, de Cannacord Genuity, dans un rapport. L'entreprise voulait clairement procéder à une acquisition pour bonifier sa présence dans les secteurs des infrastructures et de l'énergie en Europe et/ou en Asie.»

En tenant compte de la dette d'Atkins, il évalue la transaction à environ 3,7 milliards. M. Link estime que le prix proposé est raisonnable, puisqu'avant les synergies, il représente 11 fois le bénéfice d'exploitation ajusté et 175 fois le bénéfice d'Atkins.

Pour sa part, Benoit Poirier, de Desjardins Marchés des capitaux, a indiqué qu'il serait difficile de spéculer sur les chances que la transaction puisse se concrétiser. Il s'est toutefois dit encouragé par les commentaires du conseil d'Atkins, qui se dit ouvert à recommander l'offre aux actionnaires de la société. Dans une note distincte, l'analyste a également estimé que la présence d'un investisseur bien établi comme la CDPQ devrait «renforcer la confiance des investisseurs».