Jevto Dedijer et son associé Michel Nadeau, de Failwatching, cherchent partout dans le monde des exemples d'échec. Leur but: les analyser et en tirer des leçons afin d'aider les entreprises d'ici. Voici trois déconfitures qu'ils ont scrutées à la loupe.

Toblerone, ou plutôt T-B-E-O-E

En Angleterre, Mondelez a modifié la forme de sa barre Toblerone. Les triangles ont été espacés, ce qui a permis de maintenir le prix de vente malgré une hausse du prix du cacao et un taux de change défavorable. Les Anglais n'ont pas tardé à crier au scandale. La nouvelle a fait le tour du monde. Le #tobleronegate a enflammé les réseaux sociaux. L'apparence de la nouvelle barre a été comparée à une foule de trucs, dont un support à vélos.

L'erreur: changer l'ADN d'une marque, d'un produit« Il ne faut pas jouer avec l'ADN d'une marque », résume Jevto Dedijer. La Toblerone est un bon exemple pour le démontrer, car le changement est visible. Donc, ça saute aux yeux ! « Ils ont touché à l'intégrité du produit, et les amateurs de Toblerone se sont sentis trahis. Il faut faire très attention lorsqu'on touche à la promesse d'une marque, à ce qui la rend reconnaissable et différente dans le marché », insiste l'expert en marketing. Kraft Heinz a su éviter le piège en retirant le colorant de son Kraft Dinner. Ils l'ont remplacé par des épices (curcuma, paprika et roucou). « Ils auraient pu se débarrasser du jaune, mais ce serait devenu de simples macaronis ! »

Wells Fargo et les faux comptes

L'une des plus grandes banques américaines a ouvert 1,5 million de comptes et émis 500 000 cartes de crédit à l'insu de ses clients. Ces comptes lui ont permis au fil des ans de récolter des millions de dollars en frais. En septembre, la banque a annoncé avoir congédié 5300 employés ayant participé au stratagème et elle a accepté de payer une amende record de 185 millions US.

L'erreur: mentir pour atteindre ses objectifs de vente« Il est essentiel que les entreprises fassent preuve d'honnêteté et de transparence totale », dit Jevto Dedijer. Car à quoi bon mentir ? Dans notre monde ultra-connecté, à peu près tout finit par se savoir, souvent avec des conséquences des plus fâcheuses. Pensez au scandale des moteurs diesels truqués de Volkswagen. Rien de très glorieux. La confiance sera longtemps ébranlée, et des milliers d'emplois ont été perdus. « Nous aimons les marques telles qu'elles sont, avec leurs défauts et leurs imperfections, à condition qu'elles ne mentent pas », ajoute l'expert, précisant que plus une entreprise est grande, plus il est difficile de rétablir le lien de confiance.

Danier Leather et les jeunes

Le détaillant de vêtements de cuir a fait faillite après avoir tenté en vain de gagner le coeur d'une clientèle plus jeune, au détriment de ses clients fidèles et plus âgés. Cela a « engendré des pertes de revenus importantes, et la croissance phénoménale des parkas en duvet a fini par avoir raison de ce détaillant de niche devenu un peu ringard », résume Jevto Dedijer.

L'erreur: essayer d'être ce qu'on est pasDanier Leather a souffert du syndrome du grand-père qui essaie d'avoir l'air cool sur Facebook ! lance l'instigateur de Failwatching. Aussi Danier a-t-elle été passive trop longtemps dans un environnement concurrentiel très dynamique. Il n'est pas simple de changer d'image et de clientèle, mais cela se fait. « Il faut procéder étape par étape tout en respectant les clients fidèles de la marque », suggère Jevto Dedijer. MEC a élargi sa gamme de produits et sa clientèle sans se mettre à dos les amoureux de plein air. Bouclair est passée progressivement du tissu à la décoration, avec succès. L'important est d'avoir un positionnement clair. « Il faut être capable de cataloguer une marque en quelques secondes. Si c'est trop compliqué, les gens laissent faire. »