En l'espace d'une saison parmi les plus froides des temps modernes, la plupart des vents mauvais qui soufflaient sur l'économie mondiale se sont apaisés.

La meilleure preuve en est sans doute l'évolution des taux sur les obligations des gouvernements dont les finances publiques sont jugées les plus solvables par les grands prêteurs de capitaux : États-Unis, Allemagne et Royaume-Uni bien sûr, mais aussi le Canada qui fait toujours partie de la petite brochette d'États à détenir la meilleure note de crédit.

Quand les détenteurs de capitaux retrouvent une confiance relative dans l'économie, ils ont tendance à moins parquer leurs avoirs dans le marché obligataire. Moins la demande est élevée, plus les emprunteurs doivent consentir des rendements plus élevés dans l'espoir de les attirer.

Le remboursement aujourd'hui par la Grèce d'un prêt de 750 millions d'euros au Fonds monétaire international est la dernière bonne nouvelle, et peut-être la plus rassurante, à survenir en zone euro depuis le début de l'année.

Eurostat va confirmer demain que la croissance s'est un peu accélérée au premier trimestre, au point de supplanter celle des États-Unis, estimée préliminairement à 0,2 % en rythme annualisé, ou du Canada, attendue à zéro.

À l'exception de la Grèce, les conditions d'emprunt des autres pays méditerranéens se sont améliorées. Cela tend à montrer que la politique monétaire de la Banque centrale européenne semble enfin fonctionner.

Le marché obligataire est aussi un peu moins attirant avec le raffermissement des prix du brut. Le baril de West Texas Intermediate a touché la barre des 60 $US la semaine dernière, un niveau qui tend à indiquer que l'excédent d'offre s'estompe.

Le dollar canadien s'est redressé dans sa foulée, au point où il a retrouvé son niveau d'équivalence avec le billet vert qu'il avait avant la baisse-surprise du taux directeur de la Banque du Canada, le 21 janvier.

Tout cela dissipe les risques de déflation qui avaient surgi en début d'année devant la brutalité du choc pétrolier et l'enlisement de l'économie de la zone euro.

Enfin, la perspective que la Réserve fédérale américaine remonte finalement la fourchette de son taux directeur plus tard cet automne exerce une poussée, si légère soit-elle, sur les Treasuries de 10 ans. Cela agit aussi sur les obligations canadiennes, qui évoluent en étroite corrélation avec la dette américaine de même échéance.

Cela dit, l'évolution des taux obligataires a déjoué les pronostics des experts plus souvent qu'à son tour au cours du présent cycle.

En début d'année, qui aurait prévu que la Suisse se fasse payer pour emprunter pendant dix ans, l'Allemagne et la Finlande pendant sept ans, le Danemark et l'Autriche pendant six ans, les Pays-Bas, la Belgique et la Suède pendant cinq ans et la France, quatre ?

C'était pourtant le cas, il y a un mois à peine.

Depuis, la situation aberrante des taux négatifs s'est passablement corrigée, même si elle subsiste pour les échéances les plus courtes des obligations des pays en qui les prêteurs font le plus confiance.

Les taux obligataires peuvent reculer à nouveau, advenant de nouvelles surprises sur les fronts économique et monétaire. Si, par exemple, la Réserve fédérale américaine hésite trop longtemps à amorcer son resserrement monétaire, si timide soit-il.

La remontée modérée des taux obligataires nord-américains est une excellente nouvelle pour les régimes de retraite. Elle déprécie la valeur du passif, ce qui accroît leur solvabilité qui s'était détériorée depuis l'été.

Elle signifie, par contre, que le financement de la dette publique sera un petit peu plus cher.

Pour le Québec en particulier, ça n'aura rien de dramatique. D'abord, ses besoins d'emprunt sont moins élevés cette année que l'an dernier. Ensuite, une bonne partie de ses besoins sont déjà préfinancés.

Enfin, la plus grande portion de ses emprunts servent cette année à refinancer sa dette. Il pourra le faire à bien meilleur taux. Ainsi, le 27 juillet, un prêt de 50 millions portant un taux de 11 % vient à échéance. Le 15 avril, Québec a émis sans difficulté une tranche de dette venant à échéance en 2045 et dont le coupon est de 3,5 % seulement. Comme il a obtenu 112,28 $ pour chaque tranche de 100 $, le rendement réel à l'investisseur est de 2,893 %, seulement.

Même en consentant un taux un peu plus élevé au cours des prochains mois, Québec sera loin des 11 %, pour notre plus grand bénéfice.