ANALYSE - En septembre, le déficit commercial du Québec avec le reste du monde a atteint 800 millions de dollars, ce qui représente une amélioration d'un peu plus d'un demi-milliard par rapport au mois précédent.

Fait intéressant, cette amélioration est due à une forte poussée des exportations, qui ont atteint un nouveau sommet de 6,7 milliards.

L'Institut de la statistique du Québec nous apprend aussi que les importations en provenance des États-Unis ont bondi de 10 % par rapport à la valeur de celles d'août. Dans le cas de la Chine, le bond est de 64 %, même si, depuis un an, leur valeur est stable.

Cette présentation des résultats va changer prochainement avec la grande réforme annoncée hier par Statistique Canada.

À compter du mois prochain, les données du commerce international de marchandises seront comptabilisées sur la base de la balance des paiements (BDP) plutôt que sur une base douanière, c'est-à-dire du pays d'origine.

Au final, cela ne changera pas le solde commercial. En revanche, cela modifiera grandement notre compréhension de la source de nos importations.

Plutôt que d'utiliser la base douanière, le concept de la BDP saisit le changement de propriété des biens échangés entre pays.

Ainsi, selon le concept du pays d'origine, la mise en vente des iPhone 6 et iPhone 6+ en septembre a été comptabilisée comme des importations en provenance de Chine. Cela explique sans doute pourquoi les importations du Québec ont connu un tel bond au cours du mois.

Désormais, elles seront comptabilisées comme un achat fait à la société américaine Apple.

Au final, la valeur des importations de Chine va diminuer et celle des États-Unis, augmenter selon cette nouvelle manière de comptabiliser les échanges internationaux de marchandises, mais le solde commercial ne sera pas modifié.

Selon les calculs homériques de l'agence fédérale qui a pioché dans des données de 27 pays en remontant jusqu'à 1997, la nouvelle méthode de calcul fera « mieux comprendre la propriété, la production mondiale et la performance macroéconomique du Canada ».

Cette méthode changera peu le tableau des exportations, bien qu'on puisse imaginer qu'une société canadienne livre en Chine des marchandises destinées à une filiale américaine, par exemple. Ou vice-versa, compte tenu de la croissance rapide des entreprises chinoises.

La nouvelle méthode captera les mouvements de propriété avec 27 pays, ce qui représente près de 95 % de la valeur du commerce extérieur canadien de marchandises.

En prime, elle pourra capter aussi ces mouvements dans le commerce de services et les investissements, dont le détail paraîtra chaque trimestre avec la publication des données sur la balance des paiements.

À court terme, c'est avant tout le portrait de nos échanges avec les États-Unis, la Chine et le Mexique qui sera grandement retouché.

Revenons aux importations avec les États-Unis et la Chine et gardons en tête l'exemple des produits Apple qui peut être multiplié presque à l'infini puisque la Chine est devenu le manufacturier du monde au cours du présent siècle.

Selon la comptabilité sur une base douanière, l'excédent du Canada avec les États-Unis s'élevait à 110 milliards, l'an dernier. Selon la BDP, il n'est plus que de 45 milliards. En revanche, le déficit du Canada avec le reste du monde passe de 114 milliards à 53 milliards seulement.

Avec la Chine, le remplacement du pays d'origine par celui d'exportation diminue de 20 milliards la valeur des importations canadiennes attribuées à la Chine puisque beaucoup de sa production est coordonnée par un pays extérieur.

Est-ce à dire que la comptabilité sur une base douanière va être abandonnée ? Pas du tout, puisqu'elle sert à évaluer celle de la BDP.

En plus, elle garde son utilité pour certains travaux d'analyse. Il peut être plus utile parfois de savoir d'où vient le riz que nous mangeons ou le pétrole que nous raffinons plutôt que le pays de l'entreprise qui possède les champs ou la production.

Il existe aussi une autre méthode de calcul des échanges internationaux. L'Organisation de coopération et de développement économiques et le Fonds monétaire international ont développé le concept d'Échanges en valeur ajoutée (EVA) qui vise à mesurer la contribution de chaque pays impliqué dans la production des biens et des services destinés à la consommation mondiale.

Précisons seulement que le taux de valeur ajoutée des exportations du Canada s'élevait à 80 % en 2009, contre 65 % pour la Chine et 85 % pour les États-Unis.