Une forte hausse des coûts de l'énergie et des prix des cigarettes a fait grimper l'inflation canadienne à 1,5 % le mois dernier, lui permettant d'égaler le plus haut niveau de l'indice annuel des prix à la consommation en près de deux ans.

Bien que significative, la progression était essentiellement conforme aux attentes des analystes, qui avaient calculé que le raffermissement observé des prix du pétrole et du gaz naturel le mois dernier jouerait un rôle dominant dans le rapport dévoilé jeudi.

Cependant, certains observateurs ont prédit qu'avec les prix du pétrole qui continuent de grimper, la tendance à la hausse de l'inflation n'est vraisemblablement pas terminée et celle-ci pourrait atteindre 2 % dès le mois prochain.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, a indiqué mercredi s'attendre à ce que l'inflation progresse de façon soutenue et atteigne la cible de 2 % privilégiée par la banque centrale au cours des quelques prochains mois. Mais il a ajouté qu'il croyait que l'inflation était toujours trop faible, attribuant sa récente accélération à des facteurs temporaires, particulièrement dans le secteur de l'énergie.

Pour obtenir un meilleur portrait des pressions inflationnistes sous-jacentes, M. Poloz a précisé qu'il porterait une plus grande attention à l'inflation de base, qui exclut les éléments les plus volatils - notamment ceux de l'énergie et des aliments frais. Celle-ci est demeurée faible en mars, n'avançant que d'un dixième de point à 1,3 %.

Malgré tout, l'économiste Derek Holt, de la Banque Scotia, croit que M. Poloz risque de se peinturer dans un coin en continuant trop longtemps de lancer des avertissements sur le risque de désinflation.

«Je crois toujours que des hausses de taux (de la banque centrale) sont lointaines, mais il est possible que les marchés se laissent effrayer lorsque la Banque du Canada va ultimement s'éloigner de son discours sur les risques à la baisse de l'inflation», a-t-il indiqué dans une note à ses clients.

Selon l'analyste Jimmy Jean, de Desjardins Marché des capitaux, le plus récent rapport de Statistique Canada permet de croire que l'inflation d'ensemble atteindra la cible de 2 % dès le mois prochain.

«À notre avis, les risques d'inflation à la baisse semblent minces pour l'instant», a-t-il noté.

L'économiste en chef de la Banque de Montréal, Doug Porter, fait remarquer que même si l'inflation d'ensemble semble vouloir montrer une vigueur plus soutenue, la faible inflation de base permet à la banque centrale de ne pas faire bouger ses taux d'intérêt pour un certain temps.

M. Poloz a dit ne pas s'attendre à ce que l'inflation de base, qu'il considère comme un reflet plus fidèle des pressions sous-jacentes, n'atteigne la cible de 2 % avant le début de 2016.

Le secteur de l'énergie est celui qui a le plus fait grimper l'inflation en mars, avec une progression de 4,6 % dans l'ensemble. Cela comprenait un bond de 17,9 % de l'indice du gaz naturel, tandis que les prix de l'électricité affichaient une hausse de cinq % et que ceux du mazout gagnaient 9,1 %.

Les prix des cigarettes ont avancé de 7,6 %, essentiellement en raison d'une nouvelle taxe annoncée dans le budget fédéral de février.

La plus forte hausse de l'inflation du mois dernier a été observée en Alberta, où les prix du gaz naturel ont explosé de 81,5 % par rapport à l'an dernier et de 49,6 % par rapport à février. L'inflation annuelle de la province a bondi à 3,9 % le mois dernier, comparativement à 2,4 % en février.

Sur une base mensuelle, les prix à la consommation ont progressé en moyenne de 0,6 %, essentiellement en raison d'une hausse de 3 % des prix de l'essence par rapport au mois de février.

Dans l'ensemble, les prix ont grimpé dans six des huit grandes composantes étudiées par Statistique Canada, même si la plupart de ces hausses ont été modestes.

Les prix des aliments, qui jouent un rôle important dans l'inflation d'ensemble, ont gagné 1,5 % en mars par rapport à l'an dernier. Les prix des fruits frais ont avancé de 8,8 %, ceux des légumes frais, de 5,3 %, et ceux de la viande, de 3,4 %.

Par ailleurs, les coûts du logement ont pris 2,7 %, ce qui était essentiellement attribuable aux hausses des prix du gaz naturel, de l'électricité et du mazout, mais aussi à la progression de l'impôt foncier. Les prix des automobiles ont gagné 1,5 % sur une base annuelle.

En revanche, le mois de mars était la période idéale pour acheter des vêtements et des souliers, puisque leurs prix ont glissé de 1,4 % par rapport à l'an dernier, tandis que ceux des soins de santé et des soins personnels ont échappé 0,2 %. Ce dernier recul était surtout attribuable à une diminution des prix des médicaments sur ordonnance.

Taux dans les provinces et territoires du pays (le chiffre du mois précédent figure entre parenthèses):

- Terre-Neuve-et-Labrador 2,0 (1,4)

- Île-du-Prince-Édouard 3,0 (2,7)

- Nouvelle-Écosse 1,7 (1,3)

- Nouveau-Brunswick 1,5 (1,1)

- Québec 0,9 (0,4)

- Ontario 1,5 (1,5)

- Manitoba 2,3 (2,2)

- Saskatchewan 2,8 (2,3)

- Alberta 3,9 (2,4)

- Colombie-Britannique 0,1 (-0,3)

- Whitehorse, Yukon 2,3 (2,3)

- Yellowknife, T.-N.-O., 1,9 (2,0)

- Iqaluit, Nunavut 1,3 (1,2)

Taux dans les grandes villes du pays :

- Saint-Jean, T.-N.-L., 2,1 (1,5)

- Charlottetown-Summerside, 2,9 (2,6)

- Halifax, 1,8 (1,4)

- Saint-Jean, N.-B., 1,5 (1,1)

- Québec, 0,7 (0,3)

- Montréal, 1,0 (0,5)

- Ottawa, 1,3 (1,2)

- Toronto, 1,8 (1,7)

- Thunder Bay, 1,5 (1,4)

- Winnipeg, 2,3 (2,1)

- Regina, 2,7 (2,3)

- Saskatoon, 2,6 (2,2)

- Edmonton, 3,3 (1,9)

- Calgary, 4,6 (2,9)

- Vancouver, 0,2 (-0,3)

- Victoria, -0,1 (-0,3)