L'opacité des tarifications des prestations médicales aux États-Unis explique les coûts excessifs des soins qui ont triplé au cours des vingt dernières années, ont expliqué mardi des experts.

Au total, les dépenses de santé comptent pour près de 18% du PIB américain, soit deux fois plus qu'au Japon, en Irlande et en Suède, où les populations sont généralement en meilleure santé et vivent plus longtemps.

Depuis 2000, 91% de l'augmentation des coûts de santé s'explique par les prix de la consultation des médecins, des médicaments, des équipements médicaux et des frais administratifs, selon un rapport publié dans le Journal of the American Medical Association (JAMA).

Ces conclusions contredisent l'argument le plus souvent avancé pour expliquer l'explosion des coûts des soins à savoir la forte augmentation de la demande de soins de la population vieillissante, souligne Hamilton Moses, le principal auteur de cette recherche.

«Les prix sont les coupables, pas la démographie!» a-t-il lancé lors d'une conférence de presse.

En outre, une grande partie de ces coûts restent inconnus du public et même des médecins eux-mêmes qui en sont informés après que soins eurent été donnés, a expliqué le Dr Moses, professeur de neurologie et ancien médecin en chef de l'hôpital Johns Hopkins à Baltimore (Maryland).

Souvent les tarifs «sont complètement invisibles aux patients et aux médecins», a-t-il affirmé, soulignant que la plupart sont fixés par le gouvernement fédéral ou négociés confidentiellement avec les hôpitaux . «Il ne s'agit en rien d'un marché...c'est même très loin d'être un marché».

Les frais administratifs initiés quand les médecins et hôpitaux cherchent à se faire payer par les compagnies d'assurance et les malades qui augmentent de 6% par an, sont un autre facteur important de l'envolée sans fin des coûts de santé.

Un système de tarification de référence fixant les remboursements des prestations comme cela se fait avec succès dans de nombreux pays européens, dont la France, l'Allemagne et le Danemark, serait préférable pour les États-Unis, estime le Dr Moses.

Son étude montre que les dépenses de santé aux États-Unis se sont élevées à  2700 milliards de dollars en 2011 soit 17,9% du PIB du pays, une part qui a ainsi doublé depuis 1980.

Les maladies chroniques ont compté pour 84% des coûts totaux des soins et contrairement à ce qui est souvent avancé, elles ne touchaient pas principalement les personnes plus âgées.

En fait, ces chercheurs ont constaté que 67% des dépenses de santé consacrées aux pathologies chroniques concernaient des personnes de moins de 65 ans.

«Ces 10%de malades comptent pour les deux tiers du coût des soins» aux États-Unis, a précisé le Dr Ezekiel Emanuel de la faculté de Médecine de l'Université de Pennsylvanie.

Pour lui, «la clé du contrôle des dépenses de santé et de transformer la manière dont sont prodigués les soins surtout pour les affections chroniques» comme l'insuffisance cardiaque congestive, les maladies cardio-vasculaires, le diabète, le cancer, l'asthme et l'arthrite.

Le Dr Moses a également estimé qu'il faudrait au moins dix ans pour savoir si la réforme de l'assurance maladie du président Barack Obama devant entrer en vigueur en janvier aura un effet pour contrôler la hausse des coûts des soins.

Cette réforme vise à assurer un plus grand nombre d'Américains - dont 50 millions sont actuellement sans couverture - tout en contenant les dépenses de santé.

Toutefois, le Dr Ezekiel voit le potentiel dans l'«Obamacare» de faire baisser les coûts des soins en ouvrant des marchés d'assurances médicales au public.

Selon lui, «ces échanges exercent des pressions à la baisse sur les tarifs des assureurs», en permettant aux usagers de choisir la prime la plus faible et le coût à payer de leur poche le plus bas.