Les producteurs québécois de séries d'animation pour enfants se sont rarement autant intéressés à une transaction au petit écran. Avec raison: certains de leurs futurs contrats avec Télétoon, leur principal client du pays, pourraient être en jeu, selon l'Association québécoise de la production médiatique.

Dans le cadre de la transaction Bell-Astral, Corus s'est entendue pour acheter sept chaînes de télé (Historia, Séries+, Cartoon Network et les quatre chaînes Teletoon) et de deux stations de radio d'Astral pour 400 millions de dollars. Un détail de cette transaction, qui doit être avalisée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), inquiète toutefois l'Association québécoise de production médiatique (AQPM).

En raison de leur licence actuelle, les quatre chaînes Teletoon doivent dépenser 47% de leurs revenus, soit 39,5 millions, en émissions canadiennes, dont 90% en émissions d'animation. Or, Corus demande à ce que l'obligation de programmation canadienne de Teletoon soit plutôt calculée de façon intégrée avec les autres chaînes de Corus, comme c'est le cas de ses concurrents Bell Média, Rogers Média et Shaw Media. Corus assure ne pas avoir l'intention de diminuer ses dépenses en programmation dans ses chaînes Teletoon, particulièrement sa chaîne francophone.

Dilemmes réglementaires

L'AQPM s'oppose «avec véhémence» à cette demande de Corus, qui signifierait «une réduction nette et significative des sommes allouées au financement d'émissions originales canadiennes d'animation au profit d'autres catégories d'émissions», selon elle.

La transaction Corus-Astral pose plusieurs autres dilemmes réglementaires au CRTC. Comme Corus et Shaw ont la famille Shaw comme actionnaire de contrôle, leurs parts de marché doivent être comptabilisées ensemble à des fins réglementaires. Résultat: le duo Corus-Shaw détient 35,6% des parts de marché anglophones au petit écran, soit légèrement au-delà du seuil de 35% où le CRTC commence à s'inquiéter de la saine concurrence. Le Conseil pourrait ainsi imposer à Corus et à Shaw les conditions de licence supplémentaires imposées à Bell pour acheter Astral (par exemple: code de déontologie, dépôt confidentiel de ses ententes de distribution).

Corus reconnaît que son cousin Shaw et elle deviendront plus imposants au Canada anglais à la suite de cette transaction, mais l'entreprise estime qu'elle aura aussi les reins plus solides pour croître au Québec. «Concurrencer Bell et Québecor au Québec n'est pas pour les coeurs sensibles», a dit le PDG, John Cassaday.