Du chinois Lenovo au fondateur de BlackBerry Mike Lazaridis, les candidats, présumés ou déclarés à la reprise de l'ex-fleuron canadien des téléphones intelligents se pressent à l'approche de l'expiration de l'offre de rachat du groupe financier Fairfax.

Au bord du gouffre, le pionnier des téléphones intelligents a conclu fin septembre un accord avec un consortium emmené par son premier actionnaire, le fonds d'investissement canadien Fairfax, en vue de son rachat pour quelque 4,7 milliards de dollars (3,4 milliards d'euros). L'offre, qui prévoit le retrait de BlackBerry de la Bourse, arrive à échéance le 4 novembre.

Les investisseurs ne semblent toutefois guère convaincus par cette solution. Depuis que le consortium a annoncé ses intentions, le titre de BlackBerry a toujours été inférieur aux 9 dollars proposés pour le rachat.

Les analystes doutent en effet que les potentiels acheteurs disposent des fonds nécessaires. Il est envisageable que le consortium révise son offre à 7 dollars par action, selon un scénario envisagé par la maison de courtage Jefferies.

C'est dans ce contexte d'incertitude que se sont bousculés ces derniers jours de nouveaux candidats au rachat de BlackBerry.

Mi-octobre, le Wall Street Journal annonçait que le géant chinois de l'électronique Lenovo avait conclu un accord de confidentialité avec BlackBerry afin d'avoir accès à ses livres comptables.

Le 3e constructeur mondial de PC envisagerait ainsi de déposer une contre-offre pour reprendre la totalité du groupe canadien. Le PDG de Lenovo, Yang Yuanqing, avait lui-même confié en avril être intéressé par BlackBerry, notamment afin de «pénétrer sur le marché professionnel de la téléphonie mobile».

La solution Lenovo «est celle que l'on préfère», ont indiqué les analystes du Crédit Suisse dans une récente note, remarquant que la société chinoise disposait d'environ 4,5 milliards de dollars de liquidités. De surcroît, BlackBerry est «toujours une marque forte en Asie» et «fournirait immédiatement à Lenovo une porte d'entrée sur le marché nord-américain des téléphones intelligents», remarquent les experts de la banque suisse.

Quelques jours avant que la piste Lenovo ne soit évoquée, c'était le fondateur de BlackBerry Mike Lazaridis - qui a quitté son poste de P-DG en janvier 2012 - qui indiquait vouloir mener une contre-offre.

Toujours actionnaire à hauteur de 5,7 %, M. Lazaridis a conclu un accord avec un autre cofondateur du groupe, le Canadien Douglas Fregin, afin d'examiner une possible offre conjointe.

La stratégie de M. Lazaridis serait, selon des informations de presse, de retirer BlackBerry de la cotation afin de mener une profonde restructuration à l'abri des soubresauts du marché... un scénario qui rappelle la transformation d'Apple opérée à la fin des années 1990 par Steve Job.

L'ombre de la marque à la pomme plane d'ailleurs sur BlackBerry depuis que le journal canadien The Globe and Mail a révélé jeudi que John Sculley - patron d'Apple entre 1983 et 1993 et dont les coups de sang avec Steve Jobs sont restés célèbres - «explorait une offre» avec des partenaires canadiens.

Sans vouloir commenter les informations du Globe, M. Sculley a déclaré au journal qu'il était «de longue date un fan et un utilisateur de BlackBerry».

Autre candidat en course: le fonds d'investissement américain Cerberus, qui s'était fait remarquer en prenant le contrôle du constructeur automobile américain en difficulté Chrysler entre 2007 et 2009. Une source proche du dossier avait confirmé début octobre la signature d'un accord de confidentialité pour éplucher les comptes du groupe canadien.

Une reprise de BlackBerry, assortie d'une douloureuse restructuration, n'est toutefois pas le seul dénouement anticipé par les observateurs du marché. Plusieurs évoquent en effet régulièrement un démantèlement de la société, tel Jefferies qui imagine une scission en trois parties: une division téléphones et système d'exploitation, une autre spécialisée dans les réseaux professionnels, et la dernière comprenant le système de messagerie BBM.

Jefferies indique d'ailleurs que Cisco et Google, notamment, seraient en discussion avec BlackBerry pour une reprise partielle de ses activités.

À quelques jours de l'expiration de l'offre de Fairfax, les options ne manquent donc pas. Une seule est toutefois bel et bien exclue: la survie en l'état du pionnier du téléphone intelligent.