L'éditeur français de jeux vidéo Ubisoft s'est effondré en bourse mercredi après l'annonce du report de la sortie de deux jeux majeurs, dont Watch Dogs, qui va entraîner des pertes pour 2013/2014 au lieu du bénéfice attendu.

Le titre a signé la pire baisse du SBF120, perdant plus du quart de sa valeur (-26,15%) pour tomber à 8,19 euros (environ 11$) en fin de séance à la Bourse de Paris, qui n'a concédé dans le même temps que 0,29%.

Un mois seulement avant sa sortie prévue en novembre, le troisième éditeur indépendant de jeux au niveau mondial a annoncé mardi soir que Watch Dogs, son jeu phare pour la fin de l'année, ne sortirait finalement qu'au printemps 2014 car il avait besoin de plus de temps pour le peaufiner.

Quant à The Crew, un jeu de course automobile qui devait être mis sur le marché début 2014, sa sortie est repoussée à l'été.

Au lieu du bénéfice espéré pour 2013/2014, Ubisoft a annoncé en conséquence s'attendre à une perte opérationnelle comprise entre 40 et 70 millions d'euros (un euro = 1,40$ CAN) - contre un bénéfice opérationnel compris entre 110 millions et 125 millions précédemment.

L'éditeur anticipe également un chiffre d'affaires désormais compris entre 995 millions et 1,05 milliard d'euros, contre 1,42 à 1,45 milliard prévu précédemment.

«Nous avons déjà en main un super jeu, mais nous voulons plus de temps pour qu'il atteigne son plein potentiel», a expliqué mardi soir le PDG du groupe Yves Guillemot concernant Watch Dogs, un jeu d'action-aventure qui place le joueur dans la position d'un hacker.

«Les décisions difficiles que nous prenons aujourd'hui afin de pleinement réaliser le potentiel majeur de nos nouvelles créations ont un impact sur notre performance à court terme», mais «à plus long terme, nous sommes convaincus que ces décisions seront positives tant en termes de satisfaction de nos fans que de création de valeur pour nos actionnaires», a assuré M. Guillemot.

«Cet avertissement majeur rappelle les vieux démons du groupe: manque de visibilité, de régularité industrielle dans la sortie des jeux, difficulté à sortir plus d'un blockbuster par an, incapacité à générer du free cash flow (flux de trésorerie, NDLR) dans un marché très concurrentiel», a jugé jeudi matin un analyste de la place de Paris.

Watch Dogs voué à être un best-seller»

Watch Dogs est un jeu «assez semblable» au jeu vidéo concurrent Grand Theft Auto V - le jeu le plus cher jamais réalisé sorti en septembre et dont les ventes ont dépassé le milliard de dollars de recettes en trois jours - et est «voué à être un best-seller», rappelle pour sa part le courtier Aurel BGC jeudi matin.

Il estime que le choix d'Ubisoft de reporter sa sortie «est compréhensible, compte tenu de l'accueil très positif reçu par GTA V et de l'importance de ne pas rater le premier opus d'une franchise vouée à durer plusieurs années».

Le courtier juge également qu'«il ne faut pas surestimer l'impact réel d'une telle annonce sur la valorisation fondamentale d'un titre comme Ubisoft: en effet, l'impact sur le chiffre d'affaires est important mais ces jeux sont toujours voués à générer d'importants revenus, avec seulement un décalage de six mois».

«Selon nous, le véritable problème avec le décalage de Watch Dogs est qu'Ubisoft va rater les fêtes de fin d'année et que le groupe perd en crédibilité», résume Aurel BGC.

Malgré ce revers, le patron d'Ubisoft a assuré aux analystes que le futur «était radieux pour cette industrie», et que le groupe allait faire «un retour en force» l'an prochain, grâce notamment à deux nouvelles consoles, la PlayStation 4 (Sony) et la XboxOne (Microsoft), qui devraient tirer le marché en 2014.

L'éditeur dit ainsi s'attendre à un résultat opérationnel respectivement d'«au moins 150 millions d'euros et 200 millions» pour les deux prochains exercices.

Ubisoft avait déjà annoncé cet été qu'il coproduisait un film tiré de Watch Dogs avec Sony Pictures Entertainment.