Principal moteur de la croissance, la consommation des ménages aux États-Unis a montré vendredi de nouveaux signes de faiblesse sur fond de baisse des salaires, brouillant les pistes sur le calendrier du resserrement de la politique monétaire.

Les dépenses de consommation des ménages ont grignoté seulement 0,1% en juillet, en rythme annualisé et en données corrigées des variations saisonnières, marquant une brutale décélération par rapport à l'avancée de 0,6% en juin, selon des données publiées vendredi par le département du Commerce.

Les analystes ont dans l'ensemble été surpris par cette baisse d'intensité et s'attendaient à une meilleure résistance des dépenses, à +0,3%.

En tenant compte de l'inflation, le tableau est encore plus maussade et affiche une stagnation de la consommation par rapport à juin.

«Il y a eu une perte d'élan évidente», résume Peter Newland, de Barclays Ressearch.

Les chiffres de la croissance américaine publiés jeudi témoignaient déjà d'un tassement des dépenses des ménages. Au deuxième trimestre, elles n'avaient augmenté que de 1,8% contre 2,3% pendant les trois premiers mois de l'année.

En juillet, le repli est particulièrement marqué pour la consommation des biens durables qui se replient de 0,2%, mettant fin à quatre mois de progression successifs.

«Cela reflète très probablement l'impact sur les ventes de voitures de l'augmentation des taux de financement» qui sont récemment repartis à la hausse aux États-Unis,  avance Chris Low de FTN Financial.

Les ménages auraient pu être encouragés par une faible inflation en juillet (+0,1% sur un mois) mais leurs ardeurs consommatrices ont été refroidies par l'évolution de leurs revenus: ils ont décéléré en  juillet pour ne progresser que de 0,1% contre 0,3% le mois précédent, selon les données du département du Commerce.

Les salaires et rémunérations ont été les plus affectés et ont même reculé en juillet (-0,3%) pour la première fois depuis janvier.

«Les revenus n'ont augmenté en juillet que grâce aux dividendes (versées aux actionnaires, ndlr). Si vous gagnez votre argent non pas en investissant mais en travaillant, c'est une tout autre histoire. La rémunération des travailleurs a brutalement chuté», souligne Joel Naroff.

«Avec des salaires qui stagnent, comment peut-on s'étonner que les dépenses de consommation soient là où elles sont?», a-t-il poursuivi.

Il n'est visiblement pas le seul à se poser la question. Jeudi, des milliers d'employés de chaîne de restauration rapide se sont mis en grève aux États-Unis pour réclamer le doublement de leur rémunération actuelle, souvent calquée sur le salaire minimum (7,25 dollars de l'heure).

Le projet du président Barack Obama de faire porter ce chiffre à 9 dollars se heurte à l'opposition du Congrès.

«Pas d'amélioration prochaine»

D'autres ménages disposent certes de revenus mais préfèrent, semble-t-il, l'épargner face aux incertitudes qui guettent l'activité aux États-Unis. Le taux d'épargne s'est ainsi maintenu à un taux élevé en juillet (4,4%).

Au-delà de ses implications sociales, le coup de froid sur la consommation pourrait bien, dans les mois à venir, peser sur la croissance américaine dont elle est le principal moteur.

«Les faibles dépenses de consommation en juillet marquent un mauvais départ pour le (troisième, ndr) trimestre tandis que la faible progression des revenus suggère qu'il ne faut pas s'attendre à une amélioration prochaine», souligne Chris Low.

Comment la Banque centrale américaine va-t-elle interpréter ces données? La Fed scrute la conjoncture pour décider du moment opportun d'alléger son soutien à l'économie américaine en réduisant ses injections de liquidités, qui s'élèvent actuellement à 85 milliards de dollars par mois.

Son comité de politique monétaire se réunit les 17 et 18 septembre mais il devrait, selon les experts, opter pour le statu quo face aux mauvaises nouvelles sur le front de la consommation.

«La Fed devrait prendre en compte la consommation des ménages au moment de prendre sa décision sur une réduction. Après tout, elle a lancé une nouvelle phase d'assouplissement monétaire (en septembre 2012, ndlr) notamment pour contrebalancer l'impact de la cure d'austérité budgétaire» sur les ménages, indique Chris Low.