Après Dell, l'investisseur Carl Icahn, connu pour ses opérations boursières hostiles, vient se mêler des affaires d'un autre groupe informatique américain, Apple, dans lequel il a annoncé mardi avoir une «forte» participation et auquel il réclame plus de rachats d'actions.

Dans son annonce, faite en deux messages sur son compte Twitter, Carl Icahn ne précise pas la hauteur de sa participation. D'après le Wall Street Journal, qui cite une source proche du dossier, l'investissement serait de l'ordre du milliard de dollars, ce qui sur la base de la capitalisation boursière du groupe lundi soir, avant l'annonce de l'investisseur, représenterait quelque 0,2% du capital.

Carl Icahn indique en revanche avoir eu mardi «une bonne conversation avec Tim Cook», directeur général du groupe à la pomme, notamment sur le fait «qu'un programme de rachat d'actions plus important devrait être fait maintenant». «Nous avons l'intention de discuter à nouveau dans peu de temps», ajoute-t-il.

Un porte-parole d'Apple a confirmé que «Tim avait eu une conversation positive avec M. Icahn». Le groupe «apprécie l'intérêt et l'investissement de tous (ses) actionnaires», a-t-il assuré.

L'annonce a fait bondir l'action Apple de 4,75% mardi. A 489,57 dollars en clôture, elle reste toutefois bien en-dessous du sommet historique de 702,10 dollars enregistré en septembre après la sortie du dernier smartphone d'Apple, l'iPhone 5.

«Nous pensons que l'entreprise est extrêmement sous-évaluée», a d'ailleurs commenté Carl Icahn sur Twitter. «Même sans croissance des bénéfices, nous pensons que son titre devrait valoir près de 625 dollars» si le groupe accélère ses rachats d'actions, a-t-il précisé au Wall Street Journal.

Le groupe avait déjà cédé sur ce sujet en avril aux pressions d'un autre investisseur «activiste»: David Einhorn, patron du fonds spéculatif Greenlight Capital, l'avait critiqué de manière virulente pour ne pas faire assez profiter ses actionnaires de ses énormes liquidités. Apple avait fini par promettre à ses actionnaires 100 milliards de dollars en deux ans et demi, dont 60 milliards via des rachats d'actions.

Comment être ami avec un requin?

L'intervention de Carl Icahn a de quoi réjouir les actionnaires, d'autant qu'il reste rarement inactif une fois au capital d'une entreprise.

Si elles n'ont pas toujours bien tourné, ses batailles boursières des dernières années lui ont permis de bâtir la 26e fortune mondiale, évaluée en mars à 20 milliards de dollars dans le classement du magazine Forbes.

Sa dernière cible en date est le fabricant d'ordinateurs Dell: il combat depuis plusieurs mois un projet de rachat par le PDG-fondateur Michael Dell. L'issue du bras de fer reste incertaine.

Carl Icahn avait en tout cas fait un pari gagnant l'an dernier sur le groupe de vidéo en ligne Netflix, en prenant environ 10% du capital fin octobre. L'action est depuis passée de quelque 70 dollars à près de 260 dollars. Il a aussi récemment forcé l'opérateur de plateformes pétrolières Transocean à remanier sa direction.

Roger Kay, analyste spécialisé dans le secteur technologique chez Endpoint Technologies Associates, se dit surpris du caractère «amical» que semble avoir eu la conversation entre MM. Cook et Icahn: «Comment pouvez-vous être ami avec un requin?»

Il juge toutefois Apple, avec ses liquidités toujours abondantes et son énorme capitalisation boursière --quelque 445 milliards de dollars mardi soir-- «moins vulnérable» que Dell par exemple: Tim Cook «a une grosse réserve de guerre pour se défendre» et «Icahn ne pourra probablement pas faire grand chose», notamment car il «n'a pas l'argent» pour augmenter de manière significative sa part dans le capital.

«Les deux-trois dernières années ont été de mauvaises années» pour le groupe, un manque de nouveaux produits coïncidant avec la perte de son patron historique Steve Jobs. Mais pour l'analyste, «si les lancements de septembre se passent bien et si les gens retrouvent de l'enthousiasme pour Apple, ça changera la dynamique».

Apple, dont la croissance a beaucoup ralenti, est sous pression pour lancer de nouveaux produits. Il devrait présenter un nouvel iPhone en septembre, mais le marché spécule surtout sur l'arrivée prochaine de nouvelles catégories de produits, comme une montre intelligente ou un service de télévision.