Les rumeurs de rachat du fabricant finlandais de téléphones portables Nokia (NOK) se sont succédé en quelques jours, les analystes voyant déjà trois candidats potentiels pour reprendre un groupe qu'une éventuelle réorganisation pourrait rendre plus attrayant.

Interrogé par l'AFP, Ari Hakkarainen, analyste indépendant de l'industrie des télécoms, s'avoue «étonné» que le rachat de Nokia n'ait pas encore eu lieu.

La valeur de l'ancienne vedette de la Bourse d'Helsinki n'a cessé de fondre, reculant de près de 30% ces deux dernières années. Elle était vendredi en dessous de 11 milliards d'euros. Les spéculations sur le rachat ont peu fait pour l'action, avec +3,63% jeudi ou +1,81% mardi.

Le Wall Street Journal a révélé mercredi que le géant américain de l'informatique Microsoft avait mené des négociations avancées ce mois-ci avec Nokia pour lui acheter ses téléphones portables.

Mardi, Richard Yu, un dirigeant de Huawei, concurrent chinois de Nokia, avait évoqué dans un entretien au quotidien britannique Financial Times l'éventualité que son groupe soit «ouvert» à des discussions avec Nokia.

Selon les analystes, le fabricant de PC chinois Lenovo pourrait aussi entrer en jeu.

La spéculation s'est intensifiée depuis l'arrivée à échéance du contrat qui liait Nokia et Siemens pour leur coentreprise, l'équipementier télécoms Nokia Siemens Networks. NSN a été important pour maintenir les finances du géant déchu, qui a affiché sept fois des pertes sur les huit derniers trimestres.

«Il est probable qu'il y aura une réorganisation concernant NSN. ... Une fois séparé de NSN, Nokia deviendrait plus attrayant pour un acheteur», dit à l'AFP un analyste d'Inderes, Mikael Rautanen à l'AFP.

Pour Hannu Rauhala, analyste chez Pohjola, NSN est «une société à part», alors que toutes les autres activités de Nokia sont «liées les unes aux autres».

Une fois NSN détaché du reste, la fabrication des téléphones portables et les services de localisation pourraient tenter un acheteur.

Microsoft est déjà liée à Nokia par son système d'exploitation Windows Phone, sur lequel a misé Nokia pour ses téléphones intelligents. Nokia doit même passer au tout Windows, puisque son modèle 808 PureView sera le dernier modèle utilisant son système d'exploitation maison, Symbian.

«Le plus logique serait que Microsoft achète les activités téléphoniques de Nokia», a dit M. Rautanen. Il prévient que la pression va être forte pour l'américain, au vu des initiatives de Huawei et Lenovo.

Une offre par l'un des deux groupes chinois «menacerait l'avenir de Windows, et Microsoft serait obligée de faire une offre d'achat à son tour», a estimé M. Rautanen.

En revanche, M. Hakkarainen pense que les Chinois seraient des acheteurs «plus logiques» car les «faibles» marques chinoises «pourraient avoir avec Nokia une marque reconnue mondialement», a-t-il dit à l'AFP.

Pour M. Rauhala, Huawei et Lenovo s'intéressent à Nokia parce qu'ils «ont besoin de canaux sur les marchés développés» et qu'ils «ont déjà cherché de la croissance par acquisitions».

Nokia a dominé le marché des téléphones portables pendant 14 ans, jusqu'à ce que Samsung le détrône en 2012 comme marque la plus vendue du monde.

Dépassée dans les téléphones intelligents par Apple (iPhone) et Samsung, la société finlandaise a basé toute sa stratégie depuis 2011 sur l'alliance avec Microsoft.

Depuis, les ventes des téléphones portables bas de gamme de Nokia ont entamé leur inexorable déclin.

Les ventes de Lumia (haut de gamme) sont en hausse, avec 5,6 millions d'unités vendues au premier trimestre 2013, mais la firme est encore loin de ses concurrents.

«Pour donner une idée, Apple vend dans le même temps 40 millions de téléphones concurrents», avait commenté à l'AFP Éric Beaudet de la banque Natixis en avril.

Les analystes semblent même ne plus croire à l'avenir de Nokia comme fabricant indépendant.

«Il serait plus naturel qu'une même entreprise fabrique appareils et logiciels», d'après M. Rautanen. Pour lui, il serait «illogique, par exemple, que les logiciels et les appareils d'Apple soient produits par deux entreprises différentes».