La Banque centrale européenne (BCE) s'est dite jeudi prête à continuer d'intervenir pour soutenir la zone euro toujours engluée dans la récession, sans en voir la nécessité ce mois-ci.

L'institution monétaire de Francfort a maintenu son principal taux directeur inchangé à 0,50%, un plus bas niveau historique qui a cours depuis mai. Quant aux mesures exceptionnelles qu'elle envisage depuis quelque temps, elles sont restées au stade de l'évocation.

«Le retour de la croissance attendu en fin d'année et des signes d'amélioration des indicateurs de confiance», ont permis la BCE de rester en retrait pour cette fois, a commenté Rob Wood, économiste de la banque Berenberg.

De fait, au sein du conseil des gouverneurs «un large consensus n'a pas vu pas de raisons suffisantes d'agir», a déclaré lors d'une conférence de presse le président de la BCE Mario Draghi, soulignant cependant que l'institution restait toujours prête à agir en cas de nécessité.

La discussion s'est poursuivie au cours de la réunion du conseil sur l'ensemble des mesures envisageables, a-t-il dit. Pour en tirer la conclusion que certaines d'entre elles étaient peut-être trop risquées pour l'instant.

Parmi les décisions à l'étude figurent de nouveaux prêts illimités à long terme (LTRO) aux banques, un abaissement du taux de dépôt auprès de la BCE à un niveau négatif, ou encore des mesures pour revigorer le marché des ABS, prêts adossés à des crédits. Ceux-ci sont un moyen possible de stimuler l'emprunt des petites et moyennes entreprises (PME) qui peinent à se financer.

«Certaines de ces mesures sont faciles à mettre en place et ont des conséquences claires», d'autres non, a prévenu M. Draghi.

C'est notamment le cas d'un taux de dépôt négatif, qui impliquerait que les banques paient pour pouvoir stocker leurs liquidités auprès de la BCE. M. Draghi a répété que la BCE était «techniquement» prête à y avoir recours pour pousser les établissements de crédit à prêter aux ménages et entreprises, mais les effets d'une telle mesure, notamment sur les marges des banques, sont difficiles à apprécier.

«Nous ne nous engageons pas à l'avance, mais je peux dire que tous les préparatifs pour s'aventurer en territoire négatif sont là», a-t-il ajouté.

Un groupe de travail, qui comprend notamment la Banque européenne d'investissement (BEI), va continuer à se pencher sur la question des ABS, a-t-il poursuivi, mais toute initiative dans ce domaine aura pour horizon «le moyen et long terme».

«Il semble qu'il faudra attendre des mois avant que nous n'entendions parler de mise en oeuvre de ces plans. C'est décevant», a jugé Marie Diron, du cabinet de conseil Ernst & Young.

Pour Annalisa Piazza, du courtier Newedge, la réaction des marchés boursiers européens, qui ont chuté après le début de la conférence de presse de M. Draghi, pourrait s'expliquer par «des doutes sur le fait que la BCE ait la volonté d'agir de sitôt».

Si la situation évolue comme attendu, avec un retour d'une croissance modeste en fin d'année et une inflation qui ne décroît pas, il n'y a effectivement rien de plus à attendre de la BCE, selon Rob Wood.

Une nouvelle baisse de taux -la mesure qui fait le moins polémique au sein des membres de la BCE- pourrait toutefois intervenir en cas de dégradation, ajoute-t-il.

La BCE a légèrement abaissé sa prévision de croissance pour la zone euro pour cette année à -0,6% contre -0,5% jusqu'ici. Elle table en revanche sur un rebond plus important du Produit intérieur brut (PIB) en 2014, à 1,1% (contre 1%).

Elle a également revu en baisse sa prévision d'inflation pour les 17 pays de l'euro à 1,4% pour cette année (1,6% précédemment). Pour l'an prochain, le pronostic est inchangé par rapport aux prévisions de mars, à 1,3%.

Pour autant M. Draghi a estimé le la zone euro n'était pas menacée de déflation. Pour le moment, «la baisse des prix est limitée à certaines catégories de biens, le pétrole et les biens d'alimentation», a-t-il dit.