La valeur des permis résidentiels de bâtir a bondi de 25,7%, à hauteur de 797 millions de dollars, au Québec, de mars à avril.

Si cela présageait un regain d'activité bienvenu pour les travailleurs de la construction, ça ne signifie pas pour autant que la correction en cours depuis un an tire à sa fin. Elle devrait se prolonger encore plusieurs mois, le temps que soit absorbé l'excédent accumulé depuis la reprise.

En dépit de ces bons chiffres publiés hier par Statistique Canada, la valeur des permis résidentiels accusait en avril un recul de 7,7% sur les 12 mois précédents. Les replis sont particulièrement sévères dans les régions de Saguenay (-11,1%) et surtout de Québec (-32,4%).

Dans ce dernier cas, il était grand temps que l'industrie s'attiédisse. Selon Hélène Bégin, économiste principale chez Desjardins, les prix des logements neufs, qui se stabilisent ailleurs dans la province, sont sur le point d'interrompre leur ascension dans la Vieille Capitale, surtout dans le segment de la copropriété. «Si la construction de copropriétés tarde à s'affaiblir dans la région de Québec, l'offre sera encore plus abondante et une correction des prix sera inévitable», écrivait-elle dans une récente analyse du marché.

Cette analyse est partagée par Diana Petramala, économiste à la TD: «Nous prévoyons une légère pression à la baisse sur les prix à Québec au cours des deux prochaines années. On s'attend à une chute de 6%, du sommet au creux, ou de 2% en moyenne en 2013 et 2014.»

Les promoteurs ont surtout trop bâti de condos de luxe. C'est dans ce créneau que se concentre l'offre excédentaire, tant à Québec qu'à Montréal qui comptent moins de fortunes personnelles que Vancouver, Calgary ou Toronto. Dans le centre-ville de Montréal, on trouve maintenant 30 vendeurs par acheteur pour les copropriétés de 1 million et plus, sur le marché de la revente, alors qu'il en faut au plus une dizaine pour que le marché soit jugé en équilibre.

Cette correction dans le segment du condo de luxe ne devrait pas cependant faire tache d'huile. La maison unifamiliale reste fortement demandée, peut-être davantage à Québec où l'accès à la propriété reste parmi les plus abordables au pays.

À Québec, un ménage consacrait en moyenne 18,7% de son revenu disponible à ses versements hypothécaires, l'an dernier. Seul Saint-Jean au Nouveau-Brunswick affichait une accessibilité un peu plus élevée.

En comparaison, le revenu alloué aux paiements hypothécaires atteignait 28,2% à Montréal, soit davantage qu'à Ottawa, Calgary ou Edmonton, mais moins qu'à Toronto (32,9%) et surtout Vancouver (55,7%), autant d'endroits où les revenus sont plus élevés.

L'accessibilité plus grande de Québec reflète le faible prix moyen des logements existants, estimé à 256 287$ l'an dernier par l'Association canadienne de l'immeuble. À Montréal, c'est plutôt 318 262$, un prix qui devrait diminuer cette année et l'an prochain, en raison des excédents de condos de luxe.

Dernière remarque: de 2006 à 2011, l'évaluation foncière des propriétés résidentielles a bondi de 54% d'un océan à l'autre, selon les données de Statistique Canada. Cela cache d'importantes disparités régionales. À Québec, la hausse a été de 75%, à Montréal, de 56%, à Régina, Saskatoon et Calgary, de plus de 100%.

Évidemment, les revenus disponibles n'ont pas suivi, d'où le niveau record d'endettement des ménages.