Le PDG sortant de Yellow Média (T.Y), Marc Tellier, n'a pas l'intention de renoncer à son indemnité de départ de 4,3 millions malgré la grogne de nombreux actionnaires et la situation financière difficile de l'entreprise.

À l'assemblée annuelle de l'éditeur des Pages Jaunes, tenue à Montréal hier, Céline Chouinard n'a pas raté l'occasion de dire sa façon de penser sur le sujet. Au terme de la récente recapitalisation de Yellow, les 4250 actions qu'elle détenait ont été converties en tout juste 21 actions de la «nouvelle» entreprise.

«Ce que vous avez accompli durant votre mandat, M. Tellier et votre équipe, a été de prendre une entreprise rentable et de la mener au bord de la faillite par votre mauvaise gestion, vos mauvaises décisions et votre manque de vision, a lancé Mme Chouinard. C'est ça qui vous vaut une prime de départ de plus de 4 millions et une pension de 450 000$ par année [à partir de 65 ans]. Pensez-vous réellement que vous méritez cet argent, M. Tellier?»

Le dirigeant, qui quittera ses fonctions à la mi-août après 12 ans à la tête de l'entreprise, n'a pas répondu à l'actionnaire, se contentant de laisser le président du conseil d'administration, Robert MacLellan, le faire à sa place.

Celui-ci a expliqué que l'indemnité était prévue au contrat d'emploi de M. Tellier et que les déboires de Yellow Média ne découlaient pas de la stratégie adoptée par la direction, mais plutôt de la rapide migration vers les médias numériques.

«L'entreprise était trop endettée, compte tenu du contexte, a néanmoins admis M. MacLellan. Il n'y avait pas d'autre façon de la sauver que de la recapitaliser.»

Marc Tellier a dit éprouver de l'«empathie» pour les actionnaires qui ont perdu gros dans cette opération visant à réduire le niveau d'endettement de Yellow. De nombreux retraités étaient actionnaires de l'ancienne mouture de l'entreprise pour profiter du généreux dividende qu'elle a versé pendant plusieurs années.

«Je ne suis pas prêt à dire que c'est plus difficile pour une personne que pour une autre, a soutenu M. Tellier à La Presse Affaires. C'est de valeur pour tout le monde.»

Plusieurs actionnaires se demandent s'il vaut mieux patienter quelques années dans l'espoir que Yellow retrouve la croissance ou vendre leurs actions dès maintenant et utiliser leur perte en capital pour réduire leurs impôts.

Inspiration française

Yellow Média observe avec intérêt son équivalent français, Solocal, qui tire maintenant 68% de son chiffre d'affaires du numérique et dont la baisse des revenus totaux ne dépasse pas 4% par année.

En comparaison, le chiffre d'affaires de Yellow a chuté de 12% pour atteindre 253 millions au premier trimestre. Une portion de 39% des revenus provient maintenant du numérique, comparativement à 30% il y a un an. Les profits nets se sont élevés à 53,5 millions (1,91$ par action). L'an dernier, l'entreprise avait subi une perte de près de 3 milliards en raison de lourdes radiations d'actifs.

«Les besoins de nos clients [les PME] n'ont pas changé, a dit Marc Tellier. Je dirais même qu'ils ont augmenté. Le défi de l'équipe, c'est d'y répondre. Il n'y a pas de feuille de route pour ce qu'on essaie de faire parce qu'il n'y a personne qui a réussi. Par contre, on peut s'inspirer des Français en partie. Il y a de l'espoir, mais aussi beaucoup de pain sur la planche.»

Concrètement, il faut convaincre les gros annonceurs de ne pas quitter le navire sans pour autant négliger le recrutement de nouveaux clients, a noté M. Tellier.

L'homme de 44 ans n'a pas encore décidé de ce qu'il fera après son départ de l'entreprise.

L'action de Yellow Média a gagné 7,2% hier pour clôturer à 9,95$ à la Bourse de Toronto.