Un dirigeant de la banque centrale américaine (Fed), Narayana Kocherlakota, a évoqué jeudi le risque d'une décennie perdue pour les épargnants aux États-Unis.

«La faiblesse des taux d'intérêt réels» est appelée à durer, a expliqué M. Kocherlakota lors d'une conférence à New York dont la Fed a publié la transcription.

Les taux d'intérêt réels correspondent aux taux d'intérêt nominaux (soit ceux qui sont annoncés sur un contrat d'épargne par exemple ou prévus pour un emprunt) défalqués des effets de l'inflation prévue sur la période correspondante.

Ils sont aujourd'hui négatifs.

Alors que le taux d'intérêt réel à cinq ans était de 2,5% avant le déclenchement de la crise en 2007, il est aujourd'hui de -1,3%, indique M. Kocherlakota, ce qui signifie qu'une personne épargnant 100$ renonce à 100$ de pouvoir d'achat aujourd'hui pour n'en récupérer qu'environ 94 dans cinq ans.

À 10 ans aussi, le taux d'intérêt réel est négatif (-0,7%).

Pour M. Kocherlakota, la faiblesse actuelle des taux d'intérêt réels est la conséquence du «durcissement des conditions d'accès au crédit», de la fragilité de la reprise économique et de la montée de l'endettement public, qui ne pourra être enrayée qu'en augmentant les impôts ou en réduisant les dépenses de l'État.

Ces trois facteurs incitent les ménages à épargner davantage, en vue d'emprunts futurs pour l'achat d'un logement, par exemple, ou tout simplement pour se protéger, et tout cela concourt à une «augmentation de la demande pour des actifs financiers sûrs», aux rendements nécessairement bas, ce qui fait baisser les taux, explique-t-il.

M. Kocherlakota estime que les restrictions à l'octroi du crédit et l'inquiétude des ménages et des entreprises vis-à-vis de l'évolution de l'économie et de l'endettement des États-Unis sont là pour rester «longtemps, probablement pendant les cinq à dix années qui viennent».

Selon lui, compte tenu de ces éléments, de la faiblesse attendue de l'inflation et du niveau encore très élevé du chômage, la Fed, qui pratique déjà une politique monétaire ultra-accommodante pour soutenir la reprise, va se retrouver contrainte «pendant de longues années encore (...) de maintenir des taux d'intérêt réels faibles pour atteindre» ses objectifs de plein emploi et de stabilité des prix.