Mort-né, le plan budgétaire présenté mercredi par le président Barack Obama illustre quand même à merveille l'état désastreux des finances publiques américaines que la classe politique paraît incapable d'assainir de manière convaincante.

Le déficit projeté de 744 milliards US équivaut à 4,4% de la taille de l'économie américaine estimée à 16 900 milliards en 2014.

C'est une nette amélioration par rapport à l'estimation de 973 milliards, ou 6,0% du PIB nominal, pour l'exercice en cours qui prend fin le 30 septembre. De 2009 à 2012, le déficit avait chaque fois, rappelons-le, franchi la barre des 1000 milliards.

Malgré l'amélioration, le déficit projeté demeure néanmoins pire que ceux de la France et de l'Italie dont les finances publiques font pourtant l'objet des conjectures les plus noires parmi leurs électeurs et les spéculateurs internationaux.

Ni les électeurs américains, ni les spéculateurs ne se montrent jusqu'ici mobilisés, voire seulement inquiets, devant ce qui exigera, tôt ou tard, énergiques coups de barre, douloureux sacrifices et beaucoup de sang-froid.

D'ici là, la Maison-Blanche et le Congrès poursuivent le bras de fer commencé depuis que les républicains ont conquis la majorité de la Chambre des représentants, à l'automne 2010.

En mars, le représentant républicain et candidat malheureux à la vice-présidence, Paul Ryan, avait présenté son plan budgétaire, adopté par la Chambre, mais rejeté sur-le-champ par l'administration Obama. Celle-ci s'est fait rendre la monnaie de sa pièce mercredi.

Entre les plans Ryan et Obama, il y a un écart de revenus de 1000 milliards en 10 ans, écart qu'il ne sera pas facile de combler.

Hier soir, le président conviait à dîner une douzaine de républicains dans l'espoir de rapprocher les parties.

On se dirige vraisemblablement vers un autre psychodrame semblable à celui de l'été 2011 qui avait porté sur le relèvement du plafond de la dette. Fixé depuis à 16 400 milliards, il sera atteint en août ou septembre. La dette aura alors la taille de l'économie américaine, un niveau jugé dangereux par la plupart des économistes qui s'inquiètent du jour où les taux d'intérêt, et conséquemment les coûts d'emprunt de Washington, vont grimper.

En comparaison, la dette brute du Canada, en incluant les emprunts des provinces, équivaut à 86% de son PIB, tout comme celle de l'Allemagne, selon les calculs de l'OCDE.

Les États-Unis rejoindront ainsi les autres membres du G7.

À la différence de ces derniers toutefois, les plans budgétaires de MM. Ryan et Obama ne prévoient pas de retour à l'équilibre. Celui de la Maison-Blanche projette que le déficit équivaille à 2,8% du PIB en 2016 et encore à 1,7% en 2023.

Tout au mieux vise-t-on à stabiliser le poids de la dette brute sur le PIB aux environs de 100% en misant sur une croissance plus soutenue que celle enregistrée depuis le début du présent cycle.

Les documents budgétaires projettent d'ailleurs que la dette devrait atteindre 26 000 milliards d'ici 10 ans. On doit donc se préparer à beaucoup de tensions et de démagogie au sein de la classe politique au cours des années à venir.

Il est bien possible que les finances publiques américaines soient redressées moins vite encore que selon le scénario présenté par le président.

Contrairement à Ottawa ou même à Québec, la réduction projetée du déficit est fondée sur des hypothèses de croissance économique plus optimistes que la prévision consensuelle des économistes du secteur privé.

Le rythme d'expansion réelle projeté est de 2,3%, alors que la prévision du secteur privé est plutôt de 2,0%, soit deux dixièmes de moins que la croissance de 2012. La projection se situe toutefois dans la partie inférieure de la fourchette de celle présentée par la Réserve fédérale, le 20 mars.