Pourquoi les banques prennent-elles une hypothèque supérieure au montant du prêt qu'elles accordent? Quel est leur intérêt?

«La motivation fondamentale des banques, c'est qu'elles veulent s'arranger pour ne perdre à peu près rien sur chacun de leurs prêts», répond Richard Guay, professeur de finances à l'UQAM et ancien dirigeant de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Disons qu'une banque prête 200 000$ au propriétaire d'une maison qui en vaut 300 000$. Si elle prend une garantie hypothécaire de 400 000$, elle s'assure de reprendre toutes ses billes, même dans le pire scénario.

En cas de défaut de paiement du propriétaire, la banque pourra récupérer non seulement la somme prêtée, mais aussi tous les frais liés à la procédure de saisie: les intérêts et les pénalités, la facture de l'agent d'immeubles, les frais judiciaires, etc.

Le risque de la banque est donc très faible, ce qui lui permet de réduire ses coûts de financement... et de consentir un taux d'intérêt plus faible aux propriétaires qui empruntent.

Cela est d'autant plus vrai que les banques peuvent revendre facilement ces hypothèques «peu risquées» sur les marchés financiers, car les investisseurs ont un appétit dévorant pour les titres sécuritaires depuis la crise du crédit.

Il faut savoir que les banques revendent souvent leur portefeuille d'hypothèques, dans un processus qu'on appelle la titrisation. Disons qu'une banque prête 200 000$ à un propriétaire. Au lieu de conserver la créance et de récolter les intérêts, elle regroupe plusieurs hypothèques dans un véhicule financier qu'elle revend à des investisseurs sous forme d'obligations (CDO ou obligations adossées à des actifs).

La titrisation permet à la banque de se libérer du risque de crédit, car elle n'est plus directement responsable en cas de défaut de paiement. Et en encaissant le produit de la vente des obligations, la banque accède à des liquidités qui lui permettent de prêter à de nouveaux clients... et de réaliser encore plus de profits.

Tout cela contribue à faciliter l'accès au crédit pour les clients de la banque et à maintenir des taux d'intérêt faibles sur ce type de prêt, explique M. Guay.

Par contre, les clients en difficulté financière voient l'autre côté de la médaille. Le propriétaire incapable de rembourser son hypothèque risque de perdre encore plus que le montant qu'il doit à la banque.

Pour l'emprunteur qui n'arrive plus à faire ses paiements hypothécaires, il est préférable d'appeler tout de suite l'agent d'immeuble pour vendre la maison au plus vite, plutôt que d'attendre de se faire saisir par la banque avec tous les frais que cela comporte.

«De loin, la meilleure décision, c'est de prendre les devants pour éviter tous les frais reliés du processus juridique que vous allez payer implicitement», dit M. Guay. Et les experts de la banque ne s'organiseront pas nécessairement pour minimiser les frais...