Durant les dernières années, l'économie canadienne, dont celle du Québec, a dû compter sur elle-même pour assurer sa croissance, freinée par les vents mauvais qui soufflaient de l'étranger.

Les dépenses des administrations publiques, celles des ménages de même que la vitalité de la construction résidentielle ont compensé pour la mollesse de la reprise américaine ou la récession européenne.

Il semble bien que ces nuages se dissipent quelque peu. «L'économie américaine va mieux. Elle pourrait nous surprendre à la hausse et croître à un rythme annualisé de 3,5% au quatrième trimestre», croit Carlos Leitao.

Cette prévision suppose que le mur budgétaire et fiscal de 600 milliards aura été aplani de façon à ne pas compromettre complètement l'expansion.

Le scénario privilégié par nos quatre experts mise sur un compromis qui entrave la croissance de un point à un point et demi de pourcentage l'an prochain, surtout au premier semestre.

«On peut s'attendre à la reprise du secteur immobilier puisque les ménages ont diminué leur endettement, renchérit Maurice Marchon. En plus, les entreprises ont beaucoup de liquidités.»

Et puis, notre grand voisin pourra encore compter sur sa banque centrale pour apporter les coups de pouce opportuns. «La Réserve fédérale est très proactive», rappelle François Dupuis, qui ne serait pas surpris de la voir prendre les devants sur le Congrès dès la semaine prochaine.

Cela dit, un échec des négociations au Congrès entraînerait non seulement les États-Unis en récession, mais aussi la décote de la qualité de leur dette. En pareil cas, les taux obligataires plongeraient davantage et les grands indices boursiers reculeraient.

«La Fed va changer son langage, mais elle va aussi lancer une quatrième ronde de détente quantitative», assure M. Marion.

La détente quantitative est un programme dont la forme et l'ampleur peuvent varier, mais qui consiste en bout de ligne à actionner la planche à billets pour stimuler le crédit et la croissance.

Quant à l'Europe, si la stagnation persiste, les réformes structurelles se poursuivent assez pour ne plus être une source d'inquiétude aussi aiguë qu'il y a un an.

«Certains prédisent même que ce sont les Bourses européennes qui gagneront le plus de terrain en 2013», note M. Marchon.

Finalement, la Chine paraît avoir surmonté son ralentissement.

Tout cela est de nature à créer de la demande pour les biens canadiens, si nous restons compétitifs, bien entendu.

Des risques

Tout prévisionniste sait que son scénario est entaché de risques. Nos quatre experts s'entendent que le plus immédiat serait l'incapacité de Washington à forger un compromis fiscal et budgétaire susceptible de ne pas compromettre l'expansion tout en stabilisant la dette à moyen terme.

Mais il y en a d'autres.

> François Dupuis:

«Il ne faut pas oublier le Moyen-Orient. La Syrie, l'Iran et encore l'Égypte. Il ne faudrait pas que ça dérape.»

> Carlos Leitao:

«L'économie européenne sera encore en récession en 2013. En Italie, Mario Monti a fait des réformes. En France, par contre, de gros problèmes pointent à l'horizon.»

> Maurice N. Marchon

«Le risque principal reste l'ampleur du déficit américain à moyen terme.»

> Stéfane Marion

«Ma plus grosse peur, c'est la déflation salariale. Aux États-Unis, ça commence. En Europe, ça va devenir un problème. Ça s'en vient peut-être au Canada. Si ça devait arriver, on ne pourra plus résoudre le problème budgétaire.»